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06/08/2010 | FRANCE | N°10DA00100

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (ter), 06 août 2010, 10DA00100


Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903249 du 9 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rouen, après avoir accordé à titre provisoire l'aide juridictionnelle à M. Venancio A, a annulé l'arrêté du 7 décembre 2009 décidant sa reconduite à la frontière et condamné l'Etat à verser à Me Demir, avocat, une somme de 1 000 euros en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991

;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

Il soutient que, le 7 décembre 2009...

Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903249 du 9 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rouen, après avoir accordé à titre provisoire l'aide juridictionnelle à M. Venancio A, a annulé l'arrêté du 7 décembre 2009 décidant sa reconduite à la frontière et condamné l'Etat à verser à Me Demir, avocat, une somme de 1 000 euros en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

2°) de rejeter la demande de M. A ;

Il soutient que, le 7 décembre 2009, l'état de santé de l'intéressé ne présentait aucune pathologie et qu'il ne peut être reproché au préfet de ne pas prendre en compte des éléments portés à sa connaissance postérieurement ; que c'est le lendemain, 8 décembre 2009, que de tels éléments ont été portés à sa connaissance et que l'exécution de la reconduite a été suspendue dans l'attente de l'avis du médecin inspecteur de santé publique ; que c'est à tort que le premier juge a jugé illégale sa décision au motif qu'elle avait été prononcée à l'encontre d'un étranger malade ; que, lors de l'audience, M. A n'a produit aucun justificatif probant et que rien ne démontre qu'une intervention chirurgicale devait avoir lieu ; que M. A n'a engagé aucune démarche en vue de l'obtention d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'examen des pièces du dossier desquelles il résulte que la requête a été régulièrement communiquée à M. A qui n'a pas produit d'observation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, et les conclusions de M. Alain de Pontonx, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 7 décembre 2009 décidant la reconduite à la frontière de M. A qui, né en 1964, est ressortissant capverdien ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsque l'état de santé de l'étranger résidant habituellement en France nécessite une prise en charge médicale et que le défaut d'une telle prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement lui faire obligation de quitter le territoire français ou en décider la reconduite à la frontière que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est entré en France le 8 décembre 2003 muni d'un passeport en cours de validité revêtu d'un visa de court séjour, à l'issue de la durée de validité duquel il s'est toutefois maintenu en France sans demander la délivrance d'un premier titre de séjour avant le 16 août 2007, date à laquelle il a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 28 mars 2008, le préfet du Val d'Oise a rejeté cette demande et assorti ce rejet d'une obligation de quitter le territoire français ; que, l'intéressé s'étant toutefois maintenu sur le territoire français à l'issue d'un délai d'un mois suivant la notification, le 15 avril 2008, de cet arrêté, il a été interpellé le 7 décembre 2009 à Tancarville (Seine-Maritime) ; que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ne conteste pas que M. A réside habituellement en France à la date du 7 décembre 2009 ;

Considérant que, postérieurement à l'édiction le 7 décembre 2009 de l'arrêté de reconduite à la frontière le concernant, M. A, alors maintenu au centre de rétention administrative d'Oissel (Seine-Maritime), a été examiné par un médecin attaché à ce centre le 8 décembre 2009 ; que, le même jour, ce médecin a établi un certificat d'après lequel M. A présente une pathologie grave nécessitant une prise en charge médicale dont l'arrêt pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, cette prise en charge n'étant pas possible au Cap-Vert, pays d'origine de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, le 15 janvier 2009, M. A a été victime d'un accident à l'occasion duquel il s'est fracturé le quatrième métacarpien gauche ; qu'à la suite de cette fracture, un arrêt de travail a été prescrit le 15 janvier 2009 à l'intéressé, qui exerçait, dans des conditions irrégulières, une activité de maçon, et ce, jusqu'au 15 février 2009 ; que M. A a bénéficié d'une prise en charge médicale et que lui ont été prescrites par un médecin d'un hôpital de Sarcelles (Val d'Oise), le 14 février 2009, dix séances de rééducation fonctionnelle, dont le dossier ne permet pas de déterminer si elles se sont effectivement tenues ; que, toutefois, il résulte d'un certificat établi le 24 juillet 2009 par un médecin généraliste de Sarcelles que M. A présentait alors une impossibilité d'extension complète d'au moins trois des doigts de la main gauche ; qu'il est également suffisamment établi par les pièces produites devant le premier juge qu'une opération chirurgicale a été prévue et qu'il n'en ressort en revanche pas qu'elle aurait été pratiquée avant le 7 décembre 2009 ; que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ne conteste pas que, lors de l'audience du 9 décembre 2009, le premier juge a constaté que M. A n'avait plus l'usage de sa main gauche ; que, si le certificat du médecin du centre de rétention d'Oissel est postérieur au 7 décembre 2009, il a été établi dès le lendemain et, dans ces conditions, rend nécessairement compte d'une situation qui aurait pu être identiquement constatée dès la veille et ce, alors même qu'un autre médecin a constaté le 7 décembre 2009 que l'état de santé de M. A était compatible avec la poursuite de la garde à vue dans les locaux de la police ou de la gendarmerie ; qu'ainsi, il est établi qu'à cette date, l'état de santé de M. A nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, savoir la perte de l'usage d'une main ;

Considérant, enfin, que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ne conteste pas que M. A ne peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et n'apporte aucun élément propre à établir qu'il pourrait toutefois y bénéficier d'un tel traitement ; que ceci ne ressort pas non plus des pièces du dossier ; que, dès lors, les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faisaient obstacle à ce que, le 7 décembre 2009, soit décidée la reconduite de M. A à la frontière et ce, alors même qu'à cette date les éléments portés à la connaissance du préfet ne révélaient pas la nécessité d'une prise en charge médicale ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le PREFET DE LA

SEINE-MARITIME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 7 décembre 2009 décidant la reconduite de M. A à la frontière ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DE LA SEINE-MARITIME est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à M. Venancio A.

Copie sera adressée au PREFET DE LA SEINE-MARITIME.

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N°10DA00100 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 10DA00100
Date de la décision : 06/08/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Gayet
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: M. de Pontonx

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-08-06;10da00100 ?
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