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04/11/2010 | FRANCE | N°09DA01574

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 04 novembre 2010, 09DA01574


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 4 novembre 2009, présentée pour M. Etienne A, demeurant ..., par Me Roguet, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Lille n° 0803496 du 1er octobre 2009 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige, assortie des intérêts moratoires ;

Il soutient que la

procédure d'imposition est viciée dès lors qu'au vu des erreurs de rédaction de la p...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 4 novembre 2009, présentée pour M. Etienne A, demeurant ..., par Me Roguet, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Lille n° 0803496 du 1er octobre 2009 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige, assortie des intérêts moratoires ;

Il soutient que la procédure d'imposition est viciée dès lors qu'au vu des erreurs de rédaction de la proposition de rectification concernant le nombre de jours travaillés, il n'a pu utilement contester les redressements ; que l'administration a retenu des kilométrages et un nombre de jours travaillés erronés et n'a pas retenu au titre des frais déductibles les sommes exactes telles que définies par la doctrine (réponse n° 4919 à M. Jean Briane du 7 février 1994) ; que le requérant ayant par déclaration rectificative renoncé à la réduction au titre d'un don, il ne pouvait faire l'objet d'un redressement ultérieur sur ce point ; que M. A a fait mention expresse de tous les éléments dont il entendait se prévaloir pour le calcul de ses frais professionnels déductibles ; qu'il ne pouvait lui être appliqué les intérêts de retard prévus par l'article 1732 du code général des impôts ; qu'il n'était pas de mauvaise foi et ne pouvait donc pas se voir supprimer l'abattement de 20 %, ni appliquer les pénalités de mauvaise foi ou les pénalités pour manoeuvres frauduleuses, ces dernières ne pouvant s'appliquer au titre d'une rectification inexistante ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut au non-lieu à statuer à hauteur de 861,26 euros, en base, et au rejet du surplus des conclusions de la requête aux motifs que la proposition de rectification du 20 décembre 2006 était suffisamment motivée pour permettre au contribuable de la contester utilement et ne comportait aucune mention erronée du nombre de jours travaillés ; que seuls les frais professionnels justifiés dans leur principe et leur montant peuvent être admis en déduction ; que M. A n'a apporté aucune justification de la réalité des frais engagés et ne peut donc se plaindre de ce que ses frais réels déductibles ont été réduits dès lors que la somme retenue par le service est encore supérieure à la déduction forfaitaire normale ; que c'est donc à bon droit que les frais réels admissibles ont été ramenés de 13 596 euros à 8 621 euros pour 2003 et de 11 478 euros à 5 388 euros pour 2004 ; que toutefois, il y a lieu d'admettre en sus les frais d'entretien du véhicule justifiés à hauteur de 861,26 euros ; que la réponse ministérielle Briane ne comporte aucune interprétation des dispositions de l'article 83-3° du code général des impôts dont le requérant puisse se prévaloir ; que, dès lors que M. A avait renoncé à sa demande de réduction pour un don fictif au-delà du délai de déclaration, l'administration était en droit de réparer l'inexactitude de déclaration qui lui a été ainsi signalée ; que dès lors que le contribuable fait l'objet d'une procédure de reprise, il ne peut avoir droit à l'abattement de 20 % appliqué sur les seuls revenus déclarés spontanément ; que la mauvaise foi du contribuable ne lui permet pas de prétendre au rétablissement de cet abattement sur le fondement des doctrines 5 F-3121 et 5 F-254 ; que ne peuvent constituer une mention expresse ouvrant droit à la dispense d'intérêts le simple renvoi à une législation ou la mention d'éléments chiffrés non assortis d'explications ; que M. A, du fait de ses fonctions d'inspecteur des impôts, ne pouvait ignorer que seuls sont déductibles les frais réels justifiés ; que sa mauvaise foi est ainsi établie ; qu'en produisant une attestation de don fictive, M. A a intentionnellement et délibérément commis une infraction aux règles fiscales en mettant en oeuvre un procédé de nature à en masquer l'existence ; qu'ainsi, l'application des pénalités pour manoeuvres frauduleuses est justifiée ;

Vu la décision du directeur des services fiscaux du Pas-de-Calais en date du 30 avril 2010, prononçant un dégrèvement au bénéfice de M. A ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 juin 2010, présenté pour M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bertrand Boutou, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision du 30 avril 2010, postérieure à l'introduction de la présente instance, l'administrateur général des finances publiques du Pas-de-Calais a accordé un dégrèvement de 24 euros en droits et pénalités au titre de l'année 2003 et de 340 euros en droits et pénalités au titre de l'année 2004 ; que, dans cette mesure, la requête est devenue sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ; que les circonstances que la proposition de rectification du 20 décembre 2006 reçue par M. A, ne comportait pas le détail du nombre de jours travaillés en 2004 ou que le courrier par lequel l'employeur de M. A a indiqué au service cette information n'était pas joint à cette proposition ne suffisent pas à caractériser une insuffisance de motivation de cette dernière, au sens de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dès lors que le motif du redressement en cause, relatif à l'importance des frais de déplacement exposés à titre professionnel par le contribuable, était par ailleurs suffisamment détaillé et permettait à ce dernier de formuler utilement ses observations ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit, par suite, être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne les frais réels professionnels :

Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts alors en vigueur : Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut, après défalcation des cotisations, contributions et intérêts mentionnés aux 1° à 2° quinquies et à l'article 83 bis ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu. (...) Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels, soit dans la déclaration visée à l'article 170, soit sous forme de réclamation adressée au service des impôts dans le délai prévu aux articles R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales. Le montant des frais réels à prendre en compte au titre de l'acquisition des immeubles, des véhicules et autres biens dont la durée d'utilisation est supérieure à un an s'entend de la dépréciation que ces biens ont subie au cours de l'année d'imposition. (...) Les frais de déplacement de moins de quarante kilomètres entre le domicile et le lieu de travail sont admis, sur justificatifs, au titre des frais professionnels réels. Lorsque la distance est supérieure, la déduction admise porte sur les quarante premiers kilomètres, sauf circonstances particulières notamment liées à l'emploi justifiant une prise en compte complète ;

Considérant, en premier lieu, que, pour demander la déduction de ses traitements et salaires des années 2003 et 2004 de ses frais professionnels réels, M. A s'est borné à présenter, en annexe à sa déclaration, un état de frais de déplacement calculé de façon théorique, sur la base de la distance entre son domicile et son lieu de travail et en fonction de ses déplacements professionnels, en tenant compte d'un nombre théorique de journées de travail ; que devant le Tribunal administratif de Lille, puis devant la Cour, il n'a pas apporté d'autres justificatifs de la réalité du kilométrage parcouru et s'est borné à présenter des factures d'entretien et d'assurance de son véhicule personnel, dont le montant n'atteint pas le montant de la déduction forfaitaire de 10 % à laquelle il pouvait prétendre en tout état de cause ; que dès lors qu'il lui appartient de justifier le montant de ses frais réels professionnels, M. A ne peut se plaindre de ce que le service a retenu un montant de frais réels supérieur à cette déduction forfaitaire ; que, par suite, le moyen tiré de ce que c'est à tort que l'administration fiscale n'a pas retenu le montant des frais réels dont il demandait la déduction doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, que les termes de la réponse ministérielle Briane du 7 février 1994 dont se prévaut M.A, à supposer qu'ils s'appliquent à la situation du requérant, ne donnent pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle énoncée ci-dessus ; que le requérant ne peut donc utilement les opposer à l'administration fiscale sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne l'abattement de 20 % :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 158 du code général des impôts alors en vigueur : (...) 5.a. Le revenu net obtenu en application de l'article 83 et, en ce qui concerne les pensions et retraites après application des dispositions des deuxième et troisième alinéas ci-dessus, n'est retenu dans les bases de l'impôt sur le revenu que pour 80 % de son montant déclaré spontanément (...) ; qu'il résulte de ces dispositions, combinées avec celles de l'article 83-3° précité du code général des impôts, que la remise en cause, à l'issue d'un contrôle de l'administration fiscale, de la déduction pour frais professionnels mentionnée par un contribuable sur sa déclaration de revenus fait perdre à celui-ci, à due concurrence du montant du redressement, le bénéfice de l'abattement de 20 % prévu au 4ème alinéa de l'article 158 5. a du code général des impôts, qui n'est applicable qu'aux revenus nets déclarés spontanément ; que M. A ne peut donc prétendre au bénéfice de cette mesure sur le montant du redressement en litige afférent aux frais réels qu'il a déduit à tort de ses traitements et salaires pour les années 2003 et 2004 ;

S'agissant de l'application de la doctrine administrative :

Considérant que si M. A peut opposer à l'administration, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les dispositions de l'instruction du 30 septembre 1994 référencée 5 F 9-94 et celles du paragraphe 5 de la doctrine administrative référencée 5 F 254, qui prévoient le rétablissement de l'abattement de 20 % au profit des contribuables de bonne foi ou bénéficiant des dispositions de l'article 1732 alors en vigueur du code général des impôts, il résulte de ce qui est dit après que M. A n'était ni de bonne foi, ni susceptible de bénéficier des dispositions de l'article 1732 du code général des impôts ; que, par suite, il n'entre pas dans les prévisions des doctrines invoquées ; que ce moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne la réduction pour don à une association :

Considérant que, pour bénéficier de la réduction prévue à l'article 200-1 du code général des impôts relative aux dons faits aux associations, M. A a produit à l'appui de sa déclaration de revenus de l'année 2003, une fausse attestation de versement d'un don de 1 000 euros à l'association Nord-Nature ; qu'il a ensuite renoncé au bénéfice de cette réduction, en déposant une déclaration rectificative le 18 décembre 2004 ; que, dès lors que ladite déclaration rectificative a été déposée au-delà du délai de déclaration et après que l'impôt sur le revenu de l'année 2003 a été mis en recouvrement, l'administration fiscale disposait du droit, prévu à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, de réparer cette inexactitude dans la déclaration du contribuable après un contrôle sur pièces ; que M. A n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le redressement en question reposait sur un motif inexistant ;

Sur les pénalités :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts alors en vigueur : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droits au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, d'une part, que M. A, qui exerce la profession d'inspecteur des impôts, ne pouvait ignorer qu'en se bornant à produire, à l'appui de ses déclarations, un calcul théorique de ses frais de déplacement, il ne pouvait en aucun cas justifier la réalité du kilométrage parcouru et des frais qu'il entendait déduire de ses traitements et salaires, alors surtout qu'il avait déjà fait, antérieurement, l'objet d'une procédure de redressement pour des motifs identiques ; que l'administration fiscale établit, par suite, qu'elle était fondée à appliquer, pour ces motifs, les pénalités de mauvaise foi prévue à l'article 1729 précité du code général des impôts ;

Considérant, d'autre part, qu'en produisant, à l'appui de sa déclaration de revenus de l'année 2003, une attestation fictive de versement d'un don à une association, dans le but d'éluder l'impôt, M. A, dont les fausses déclarations étaient justifiées par un montage, s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ; que l'administration fiscale est fondée à soutenir que, pour ce motif, M. A était passible des pénalités au taux de 80 % prévues à l'article 1729 du code général des impôts sur ce chef de redressement ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1732 du code général des impôts alors en vigueur : Lorsqu'un contribuable fait connaître, par une indication expresse portée sur la déclaration ou l'acte, ou dans une note y annexée, les motifs de droit ou de fait pour lesquels il ne mentionne pas certains éléments d'imposition en totalité ou en partie, ou donne à ces éléments une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée, ou fait état de déductions qui sont ultérieurement reconnues injustifiées, les rectifications opérées à ces titres n'entraînent pas l'application de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 ; que le bénéfice de ces dispositions suppose l'existence d'une mention expresse, par le contribuable, sur sa déclaration, des motifs de droit et de fait pour lesquels il estime que les éléments en cause ne sont pas imposables ou sont déductibles ; qu'il résulte de l'instruction, qu'en l'espèce, M. A s'est borné à mentionner, en annexe de ses déclarations, le montant des frais réels dont il entendait pratiquer la déduction résultant d'un calcul forfaitaire et non appuyé de justificatifs, sans expliquer les raisons pour lesquelles il estimait pouvoir se dispenser d'apporter les justifications exigées par l'article 83-3° du code général des impôts ; que, dans ces conditions, le requérant, qui n'a porté aucune mention expresse sur sa déclaration, au sens de l'article 1732 du code général des impôts, ne peut revendiquer le bénéfice de l'exonération des intérêts de retard appliqués sur les redressements en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de M. A à hauteur de 24 euros, en droits et pénalités, au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2003 et de 340 euros, en droits et pénalités, au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2004.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Etienne A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°09DA01574


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09DA01574
Date de la décision : 04/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Bertrand Boutou
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : SELARL FISCASSO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-11-04;09da01574 ?
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