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04/11/2010 | FRANCE | N°10DA00702

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 04 novembre 2010, 10DA00702


Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Claire A née B, demeurant ..., par Me Navy, avocat ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000074 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 11 décembre 2009, du préfet du Nord refusant de lui délivrer une carte de séjour en qualité de réfugié, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrê

té attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour d'un an...

Vu la requête, enregistrée le 14 juin 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Claire A née B, demeurant ..., par Me Navy, avocat ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000074 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 11 décembre 2009, du préfet du Nord refusant de lui délivrer une carte de séjour en qualité de réfugié, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour d'un an dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, le préfet n'était pas tenu de lui refuser la délivrance d'une carte de résident en l'absence de reconnaissance du statut de réfugié ; qu'elle pouvait prétendre à un titre sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ; qu'elle vit en France avec ses deux enfants depuis août 2008 ; qu'elle est francophone ; que ses enfants poursuivent leur scolarité avec succès ;

- que le Tribunal a fait une mauvaise appréciation des documents produits ; qu'ils n'ont pas été tous examinés ; que la décision du préfet a été prise en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la décision du 9 juillet 2010 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme A ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 août 2010, présenté par le préfet du Nord ; il conclut au rejet de la requête et fait valoir :

- qu'il a à bon droit refusé de délivrer à Mme A un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 314-11 8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette dernière s'étant vu refuser la qualité de réfugié par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, refus confirmé par la Cour nationale du droit d'asile ; que le refus de délivrer un titre de séjour à un étranger auquel la qualité de réfugié a été refusée doit être regardé comme ayant été pris en réponse à une demande d'admission, dès lors que la reconnaissance du statut de réfugié implique la délivrance d'une carte de résident ; qu'elle ne justifie pas se trouver dans l'un des cas dans lesquels un étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire ;

- qu'il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation, Mme A ne justifiant pas d'une vie privée et familiale pouvant lui permettre d'obtenir une carte de séjour vie privée et familiale ; que l'arrêté attaqué n'a pas contrevenu aux dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que sa décision ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la requérante n'apporte pas d'éléments suffisamment précis et probants de nature à établir qu'elle serait réellement exposée de façon directe, personnelle et actuelle à des traitements contraires à l'article 3 précité en cas de retour dans son pays ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sylvie Appèche-Otani, président-assesseur, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que Mme A, ressortissante congolaise, née en 1968, est, selon ses déclarations, entrée irrégulièrement en France le 18 août 2008, accompagnée de deux de ses trois enfants ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'ayant sollicité son admission au statut de réfugié, sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 décembre 2008, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 22 octobre 2009 ; que, par un arrêté en date du 11 mai 2009, le préfet du Nord a alors refusé de lui délivrer un titre de séjour en cette qualité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et, à défaut pour elle d'y satisfaire, a fixé le pays de destination de son renvoi d'office ; que Mme A relève appel du jugement du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, Mme A ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre du refus opposé à sa demande de titre de séjour, laquelle n'a pas été présentée sur le fondement de cet article ;

Considérant que, pour refuser la délivrance de la carte de résident, le préfet du Nord ne s'est pas exclusivement fondé sur le rejet de la demande d'asile formée par Mme A par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru, à tort, lié par ces décisions et qu'il n'aurait pas procédé à un examen particulier de l'ensemble de la situation de Mme A avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ;

Considérant que Mme A déclare être arrivée en France, avec deux de ses trois enfants, depuis le 18 août 2008 ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile par une décision du 31 décembre 2008, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 22 octobre 2009 ; qu'elle soutient qu'elle connaît les valeurs de la République, qu'elle est francophone et que ses enfants poursuivent une scolarité satisfaisante ; qu'elle est sans nouvelle de son mari et de son troisième enfant depuis son arrivée en France ; que ces circonstances, à les supposer établies, ne sauraient suffire à établir que l'autorité préfectorale a, en prenant cette décision, commis une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que Mme A soutient que le demi-frère de son époux, secrétaire exécutif de l'association les héritiers de la justice a été assassiné en juillet 2005 ; que son mari est depuis lors menacé et recherché par les autorités congolaises ; qu'ainsi qu'il a été dit, Mme A s'est vue refuser le statut de réfugié ; que les pièces versées au dossier, à savoir des articles de presse décrivant la situation générale en République démocratique du Congo, de plusieurs attestations de proches ainsi qu'une copie d'un avis de recherche, dont l'authenticité n'est pas garantie, ne sont ni suffisamment précises, ni suffisamment probantes pour établir que Mme A encourrait personnellement des risques pour sa vie ou sa liberté en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'en outre, le tribunal n'était pas tenu, dans son jugement, d'énumérer chacune des pièces versées au dossier par la requérante ; que cette dernière ne peut utilement soutenir que le tribunal administratif n'aurait pas examiné toutes les pièces du dossier au seul motif qu'elles ne sont pas exhaustivement reprises dans le jugement ; qu'il s'ensuit que la décision contestée n'a, par conséquent, pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 11 décembre 2009, du préfet du Nord refusant de lui délivrer une carte de séjour en qualité de réfugié, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le rejet des conclusions à fin d'annulation entraîne, par voie de conséquence, celui des conclusions à fin d'injonction ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme A la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Claire A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10DA00702
Date de la décision : 04/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: Mme Sylvie Appeche-Otani
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : NAVY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-11-04;10da00702 ?
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