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16/11/2010 | FRANCE | N°10DA00972

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 16 novembre 2010, 10DA00972


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 3 août 2010 et confirmée le 5 août 2010 par la production de l'original, présentée pour Mme Faroudja A née B, demeurant ..., par Me Berthe ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0908322 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 18 décembre 2009, par laquelle le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire ;
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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 3 août 2010 et confirmée le 5 août 2010 par la production de l'original, présentée pour Mme Faroudja A née B, demeurant ..., par Me Berthe ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0908322 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 18 décembre 2009, par laquelle le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Nord, en date du 18 décembre 2009, en ce qu'il emporte refus de séjour et obligation de quitter le territoire ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un certificat de résidence algérien vie privée et familiale dans les deux mois de la notification de la décision à intervenir, et ce, sous astreinte de 155 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre, subsidiairement, au préfet de l'admettre provisoirement au séjour dans les quinze jours de la décision à intervenir et de procéder au réexamen de sa situation, et ce, sous astreinte de 155 euros par jour de retard ;

5°) de condamner l'Etat à verser à son avocat, sous réserve que ce dernier renonce à la part contributive de l'Etat, la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient qu'elle a fixé le centre de ses intérêts en France, où son mari avait vécu la quasi-intégralité de sa vie et où elle a été accueillie par la famille de sa fille, vivant en situation régulière ; qu'eu égard à son grand âge et à son état de santé préoccupant, et compte tenu de l'impossibilité pour sa famille restée en Algérie de la prendre en charge, elle ne peut être accueillie que par sa fille ; que sa présence en France est d'ailleurs utile à cette dernière, puisqu'elle s'occupe et contribue à l'éducation de ses petits-enfants ; qu'elle perçoit une pension de réversion et ne constitue donc pas une charge pour la collectivité ; que, si elle a effectivement vécu 70 ans en Algérie, elle n'est plus en mesure d'y vivre dignement et s'est donc tournée vers les seuls membres de sa famille qui étaient en mesure de s'occuper d'elle ; que le refus de séjour, malgré la présence en France d'autres membres de sa famille, porte ainsi une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît les engagements internationaux de la France ; que l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ; qu'elle méconnaît, en tout état de cause, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, eu égard à l'âge et l'état de santé de la requérante, qui n'a plus de logement en Algérie et ne peut bénéficier du soutien de sa famille sur place, alors qu'elle vit depuis plus de deux ans chez sa fille et son beau-fils, qui lui apportent un soutien indispensable sur le plan matériel et affectif ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du 22 juin 2010 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme A ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2010, présenté par le préfet du Nord qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que Mme A n'est entrée en France qu'il y a deux ans et trois mois et qu'elle a vécu en Algérie jusqu'à l'âge de 70 ans, dont quatre années pendant lesquelles elle était déjà veuve ; que les articles 6-1) et 7 bis e) et f) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 subordonnent la délivrance du certificat de résidant algérien à une durée minimum de dix ans de résidence habituelle ou de situation régulière en France, ce qui n'est pas le cas de la requérante, qui ne bénéficie pas non plus des stipulations protectrices de l'article 9 du même accord, étant entrée en France sous couvert d'un visa de court séjour ; que sa demande de certificat de résidence algérien a été déposée plus de deux mois après son arrivée en France, en violation de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la requérante n'établit pas s'être insérée dans la société française ; que l'intéressée n'a pas informé les services préfectoraux de ses problèmes de santé, lesquels ne sont d'ailleurs pas établis ; que la requérante n'est pas isolée en Algérie où vivent encore six de ses enfants, qui peuvent l'assister ; qu'hormis son séjour en France en 2002-2003 et son retour récent sur le territoire national, l'intéressée a toujours vécu en Algérie, où vit encore la plus grande partie de sa famille et où elle ne saurait prétendre être isolée socialement ; que ses ressources lui permettraient de vivre décemment en Algérie ; que le refus de séjour était donc justifié ; qu'eu égard à ce qui précède, l'obligation de quitter le territoire n'est entachée ni d'une erreur manifeste d'appréciation, ni d'une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret

n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Vladan Marjanovic, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que Mme A, ressortissante algérienne revenue sur le territoire national le 3 octobre 2007, sous couvert d'un visa de court séjour, a demandé, le 4 février 2008, la délivrance d'un certificat de résidence algérien portant la mention vie privée et familiale ; qu'elle relève appel du jugement, en date du 11 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 18 décembre 2009, par laquelle le préfet du Nord lui a refusé la délivrance de ce certificat et l'a obligée à quitter le territoire national ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord

franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, susvisé : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

Considérant que, si Mme A expose qu'eu égard à son grand âge et à son état de santé défaillant, elle a dû revenir en France en 2007 pour être prise en charge et assistée par la famille de sa fille, résidant régulièrement sur le territoire national, il est toutefois constant que la requérante, qui n'avait jusqu'alors séjourné en France que pendant les quelques mois précédant le décès de son mari survenu en 2003, n'est pas isolée dans son pays d'origine, où elle a vécu, la plupart du temps sans son mari, jusqu'à l'âge de 70 ans, et où vivent encore ses six autres enfants et deux de ses soeurs ; que, si les enfants de Mme A restés en Algérie déclarent ne pas être en mesure, compte tenu de leurs situations, de prendre en charge leur mère, qui indique, quant à elle, percevoir une pension de réversion d'un montant mensuel de 640 euros et être atteinte de diabète et d'hypertension artérielle, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence de la requérante en France aux côtés de sa fille serait indispensable pour lui permettre de continuer à vivre dignement ; que, dans ces conditions, et nonobstant la contribution de Mme A à l'éducation de ses petits-enfants vivant en France, le préfet du Nord, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale ; que les moyens tirés de la violation des stipulations susrappelées des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 6-5) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doivent ainsi être écartés ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire national :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à exciper, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité du refus de séjour qui lui a été opposé ; qu'eu égard aux circonstances de fait rappelées ci-dessus, Mme A n'est pas davantage fondée à soutenir que l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire national porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'enfin, à supposer même que Mme A ne dispose plus de son ancien logement en Algérie, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet du Nord ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 décembre 2009 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le rejet des conclusions à fin d'annulation entraîne, par voie de conséquence, celui des conclusions à fin d'injonction ;

Sur les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991:

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans l'instance, soit condamné à verser au conseil de Mme A la somme demandée au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Faroudja A née B et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie sera adressée au préfet de la région Nord/Pas-de-Calais, préfet du Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 10DA00972
Date de la décision : 16/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Vladan Marjanovic
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : BERTHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-11-16;10da00972 ?
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