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18/11/2010 | FRANCE | N°09DA00036

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 18 novembre 2010, 09DA00036


Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Rabah A, demeurant ..., par Me Farcy, avocat ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500718 du 12 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rouen, après avoir prononcé la décharge des pénalités de mauvaise foi afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales relatives aux années 1997, 1998 et 1999, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la dé

charge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impô...

Vu la requête, enregistrée le 8 janvier 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Rabah A, demeurant ..., par Me Farcy, avocat ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500718 du 12 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rouen, après avoir prononcé la décharge des pénalités de mauvaise foi afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales relatives aux années 1997, 1998 et 1999, a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1997, 1998 et 1999 et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens ;

2°) de prononcer la décharge des suppléments d'imposition restant en litige ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que M. A n'a pas de domicile fiscal en France ; que, de 1997 à juillet 1998, le centre de ses intérêts économiques se trouvait en Egypte et qu'à compter de juillet 1998, il se trouvait en Algérie ; qu'il est fondé à se prévaloir de l'article 81 A du code général des impôts, qui s'applique aux ressortissants étrangers d'un pays ayant conclu avec la France un traité de réciprocité, ce qui est le cas de l'Algérie, de l'Egypte et de la Finlande ; qu'il ne peut subir une double imposition sur une seule source de revenus ; que les revenus d'origine indéterminée sont d'origine déterminée et ne constituent pas des revenus imposables mais proviennent de la clôture d'un compte bancaire ouvert au Luxembourg, du remboursement de prêts familiaux ; que la somme de 299 813,07 francs ne constitue pas non plus un revenu imposable ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation de l'article 1er du jugement et à ce que les pénalités de mauvaises foi dont ont été assortis les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis à la charge de M. et Mme A au titre des années 1997 à 1999 soient remises à leur charge ; il fait valoir que M. et Mme A avaient en France leur domicile fiscal au sens des articles 4 A et 4 B du code général des impôts et que l'application en l'espèce des conventions bilatérales avec l'Egypte et l'Algérie n'est pas de nature à tenir en échec l'application de ces articles ; que les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 81 A du code général des impôts ; que c'est à bon droit que plusieurs sommes ont été taxées d'office en tant que revenus d'origine indéterminée ; que la somme transférée d'un compte ouvert à l'étranger constitue un revenu imposable en application de l'article 1649 A du même code ; que les requérants ont fait preuve d'une intention délibérée d'éluder l'impôt en portant sur leurs déclarations des informations inexactes sur leur situation familiale et en minorant dans une proportion importante leurs revenus imposables ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 1er avril 2009, présenté pour M. et Mme A, qui concluent aux mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens et concluent, en outre, au rejet des conclusions d'appel incident présentées par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; ils soutiennent que la preuve de la mauvaise foi n'est pas rapportée ;

Vu les observations, enregistrées le 28 avril 2009, présentées par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 mai 2009, présenté pour M. et Mme A, qui concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Vu les nouvelles observations, enregistrées le 28 mai 2009, présentées par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention du 19 juin 1980 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République arabe d'Egypte en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole) ;

Vu la convention du 17 mai 1982 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance réciproque en matière d'impôts sur le revenu, d'impôts sur les successions, de droits d'enregistrement et de droit de timbre ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Farcy, pour M. et Mme A ;

Considérant qu'à la suite de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont ils ont fait l'objet au titre des années 1997, 1998 et 1999, des redressements ont été notifiés à M. et Mme Rabah A, par voie de taxation d'office s'agissant de revenus d'origine indéterminée, selon la procédure contradictoire dans la catégorie des traitements et salaires ainsi que, sur le fondement de l'article 1649 A du code général des impôts, à raison de sommes en provenance de l'étranger par l'intermédiaire d'un compte bancaire ouvert au Luxembourg ; que M. et Mme A relèvent appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté le surplus des conclusions de leur demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires en ayant résulté, tandis que, par la voie de l'appel incident, le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique demande que les pénalités pour mauvaise foi dont ont été assortis les droits supplémentaires d'imposition et dont les premiers juges ont décidé la décharge soient remises à la charge de M. et Mme A ;

Sur l'appel principal de M. et Mme A :

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de la résidence fiscale de M. et Mme A :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : 1. Sont considérés comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b) Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c) Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques (...) ; que le foyer est le lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles ; que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que s'il ne possède pas de foyer ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années 1997 à 1999, M. et Mme A, qui sont respectivement de nationalités algérienne et finlandaise et de nationalité finlandaise et après avoir disposé d'un logement au Val-de-Reuil (Eure) jusqu'au 30 juin 1997, ont loué à Rouen un logement où résidaient de manière habituelle et effective Mme A et leurs enfants et pour lequel M. A avait souscrit divers abonnements ainsi qu'une police d'assurance ; que M. et Mme A étaient titulaires en France de comptes bancaires desquels étaient débités les loyers de ces appartements et sur lesquels étaient créditées les rémunérations versées à M. A par les sociétés l'employant et sises en France qui l'ont détaché successivement en qualité de responsable d'un bureau de représentation au Caire (Egypte) puis, à compter de juillet 1998, d'ingénieur des ventes à Alger (Algérie), lesquels détachements ne faisaient toutefois pas obstacle à l'existence d'une communauté de vie entre les époux, M. A se rendant à Rouen au moins une fois par mois ; qu'ainsi, alors même que M. A avait la disposition d'une habitation successivement en Egypte et en Algérie et quelle qu'ait été la durée des séjours que, pour l'exercice de son activité professionnelle, il était conduit à effectuer dans ces deux pays, il devait alors être regardé comme ayant en France le lieu de son foyer au sens des dispositions précitées du a) de l'article 4 B du code général des impôts ;

Considérant, en deuxième lieu, que les requérants soutiennent que l'application à leur cas des stipulations des conventions bilatérales susvisées des 19 juin 1980 et 17 mai 1982 entre, d'une part, la France et l'Egypte et, d'autre part, la France et l'Algérie, fait obstacle à ce que soit admise leur résidence fiscale en France et doit, dès lors, conduire à écarter l'application des dispositions précitées du code général des impôts ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 de la convention franco-égyptienne du 19 juin 1980 susvisée : 1 - Au sens de la présente convention, l'expression résident d'un Etat désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat à raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont pas assujetties à l'impôt dans cet Etat ou pour la fortune qui y est située. / 2 - Lorsque selon les dispositions du paragraphe 1 une personne physique est un résident des deux Etats, sa situation est réglée de la manière suivante : / a ) Cette personne est considérée comme résident de l'Etat où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent ; si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat avec lequel ses liens personnels et économiques sont plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; / b) Si l'Etat où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminée ou si elle ne dispose pas d'un foyer d'habitation permanent dans chacun des Etats, elle est considérée comme résident de l'Etat où elle séjourne de façon habituelle ; c) Si cette personne ne séjourne de façon habituelle dans les deux Etats ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme un résident de l'Etat dont elle possède la nationalité ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 2 de la convention franco-algérienne susvisée du 17 mai 1982 : 1. Au sens de la présente convention, l'expression résident d'un Etat désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujetti à l'impôt dans cet Etat à raison de son domicile, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. / 2. Lorsque, selon la disposition du paragraphe 1, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles suivantes : / a. Cette personne est considérée comme un résident de l'Etat où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent ; si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années 1997 à 1999, M. A, qui justifie par les pièces produites en appel qu'il a été assujetti à l'impôt en Egypte et en Algérie au titre de ces années à raison de traitements et salaires versés par ses employeurs français, disposait de manière durable de résidences d'habitation tant en France que, successivement, en Egypte et en Algérie et, ainsi, disposait de foyers d'habitation permanents dans ces pays au sens des stipulations des conventions internationales précitées ; que l'épouse de M. A et leurs enfants résidaient seulement en France mais non en Egypte ou en Algérie ; que M. A disposait en France de comptes bancaires sur lesquels étaient versées les rémunérations servies par ses employeurs, lesquels étaient des sociétés de droit français dont les sièges se situaient en France ; que ces rémunérations constituaient des revenus de source française et que M. A ne soutient pas qu'il aurait disposé de revenus de source égyptienne ou algérienne ou qu'il aurait possédé un patrimoine immobilier en Egypte ou en Algérie ; que les requérants ne contestent pas que, comme le fait valoir l'administration, M. A se rendait à Rouen dans sa famille au moins une fois par mois ; qu'ainsi, M. A entretenait des liens personnels et économiques, définissant le centre de ses intérêts vitaux au sens des conventions précitées, plus étroits avec la France qu'avec l'Egypte ou l'Algérie ; que, dès lors et par application des stipulations du b) du paragraphe 2 de l'article 4 de la convention franco-égyptienne du 19 juin 1980 et de celles du a. du paragraphe 2 de l'article 2 de la convention franco-algérienne du 17 mai 1982, M. A était, en matière d'impôts sur le revenu, résident en France et non en Egypte et en Algérie et ce, alors même qu'il ressort des pièces produites au soutien de la requête qu'il a acquitté de tels impôts en Egypte au titre de 1997 et du premier semestre 1998 et en Algérie au titre des années 1998 et 1999 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, s'agissant des années 1997 à 1999, les stipulations précitées des conventions franco-égyptienne du 19 juin 1980 et franco-algérienne du 17 mai 1982 ne faisaient pas obstacle à l'application des dispositions précitées des articles 4 A et 4 B du code général des impôts ; que c'est donc à bon droit que, sur le fondement de ces dispositions, l'administration a estimé qu'au titre desdites années M. A avait son domicile fiscal en France et qu'il y était passible de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales sur l'ensemble de ses revenus ;

S'agissant des traitements et salaires :

Considérant qu'aux termes de l'article 81 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années 1997 à 1999 : I. Les traitements et salaires perçus en rémunération de leur activité à l'étranger par des personnes de nationalité française qui ont leur domicile fiscal en France et qui sont envoyées à l'étranger par un employeur établi en France ne sont pas soumis à l'impôt lorsque le contribuable justifie que les rémunérations en cause ont été effectivement soumises à un impôt sur le revenu dans l'Etat ou s'exerce son activité et que cet impôt est au moins égal aux deux tiers de celui qu'il aurait à supporter en France sur la même base d'imposition. / II. Les traitements et salaires perçus en rémunération de leur activité à l'étranger par des personnes de nationalité française autres que les travailleurs frontaliers, qui ont leur domicile fiscal en France et qui, envoyées à l'étranger par un employeur établi en France, justifient d'une activité à l'étranger d'une durée supérieure à 183 jours au cours d'une période de douze mois consécutifs, ne sont pas soumis à l'impôt. / Cette exonération n'est accordée que si les rémunérations considérées se rapportent aux activités suivantes à l'étranger : a) Chantiers de construction ou de montage, installation d'ensembles industriels, leur mise en route et leur exploitation, la prospection et l'ingénierie y afférentes ; / b) Prospection, recherches ou extraction de ressources naturelles. / III. Lorsque l'intéressé ne peut bénéficier de ces exonérations, ces rémunérations ne sont soumises à l'impôt en France qu'à concurrence du montant du salaire qu'il aurait perçu si son activité avait été exercée en France. Cette disposition s'applique également aux contribuables visés au 2 de l'article 4 B ;

Considérant, en premier lieu, que M. A n'étant pas de nationalité française, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions précitées des I et II de l'article 81 A du code général des impôts ; qu'en outre, ils ne se prévalent pas des dispositions du III ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. et Mme A, qui sont ressortissants d'un pays membre de l'Union européenne depuis 1995, soutiennent que les dispositions de l'article 81 A précité bénéficient également aux salariés étrangers ressortissants d'un pays ayant conclu avec la France un traité de réciprocité et que tel est le cas de la Finlande et de l'Algérie ; que, toutefois, s'il doivent ainsi être regardés comme revendiquant, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice de la doctrine administrative comportant de telles énonciations, les requérants ne justifient pas, par les pièces qu'ils produisent, que les traitements et salaires perçus par M. A en 1997, 1998 et 1999 ont été effectivement soumises en Egypte ou en Algérie à un impôt sur le revenu au moins égal aux deux tiers de celui qui, en ce qui concerne les droits d'imposition, leur a été assigné en France à raison de ces traitements et salaires ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction que les fonctions exercées par M. A en Egypte puis en Algérie au service des sociétés Flexibox et I.D.P. International étaient au nombre de celles mentionnées aux a) et b) du II de l'article 81 A du code général des impôts ;

Considérant, en troisième lieu, que, si les requérants soutiennent que M. A a déclaré à l'administration fiscale égyptienne, au titre de ses revenus de l'année 1997, le salaire afférent au mois de décembre 1996, lequel a été crédité sur son compte bancaire le 1er janvier 1997, et qu'il a ainsi respecté le paragraphe 6 de la documentation de base 5 B 214 du 15 juin 1993, ce moyen n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ;

S'agissant des revenus d'origine indéterminée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales : (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements et de justifications prévues à l'article L. 16 ; qu'aux termes de l'article L. 193 du même livre : Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient au requérant d'établir le mal fondé de ceux des suppléments d'imposition qu'ils contestent qui procèdent de la taxation de revenus regardés par le service comme d'origine indéterminée ;

Considérant, en premier lieu, que les requérants soutiennent que les versements d'espèces sur un compte bancaire effectués les 13 janvier, 27 février et 26 mai 1997 pour un montant total de 58 000 francs (8 842 euros) correspondent à des remboursements de prêts consentis par M. A en 1987 et 1988 à deux de ses frères en vue de l'acquisition ou de la construction de logements en Algérie ; que, toutefois, alors que les requérants ne produisent aucun document contemporain de l'octroi des prêts allégués et qui pourrait être regardé comme ayant date certaine, les attestations des frères de M. A en date du 28 octobre 2000, postérieures de douze ou treize ans aux prêts dont s'agit, ne sont, alors même qu'elles ont été établies devant un officier d'état civil, pas propres à établir la réalité de tels prêts et ce, en particulier, à défaut d'éléments de nature à établir une corrélation, dans le temps et par les montants, entre ces versements d'espèces et des décaissements correspondants effectués par les frères de M. A ;

Considérant, en second lieu, que, si les requérants soutiennent également que le versement en espèces d'une somme de 20 000 francs (3 048,98 euros) sur un compte bancaire le 24 octobre 1997 résulte de la clôture, le 1er août 1997 - et non en octobre 1997 comme il est allégué -, d'un compte bancaire détenu par M. A au Luxembourg, lequel présentait à la clôture un solde créditeur de 42 401,88 francs (6 464,12 euros) qui aurait été retiré par l'intéressé en espèces, ils ne l'établissent pas, en l'absence tant de corrélation entre les dates de ces versement et clôture ainsi qu'entre les montants de la somme ainsi versée en espèces et de ce solde créditeur que de preuve du retrait en espèces de ce dernier ;

Sur les sommes en provenance de l'étranger :

Considérant qu'aux termes de l'article 1649 A du code général des impôts : Les administrations publiques, les établissements ou organismes soumis au contrôle de l'autorité administrative et toutes personnes qui reçoivent habituellement en dépôt des valeurs mobilières, titres ou espèces doivent déclarer à l'administration des impôts l'ouverture et la clôture des comptes de toute nature. / Les personnes physiques, les associations, les sociétés n'ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France sont tenues de déclarer, en même temps que leurs déclarations de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger. Les modalités d'application du présent alinéa sont fixées par décret. / Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables ; que ces dispositions instituent une présomption légale spécifique de revenus d'origine indéterminée à hauteur du montant transféré à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés ; que le fait générateur de l'impôt sur le revenu dû sur ce montant est constitué par son transfert et non par la perception initiale du revenu ; qu'il appartient au requérant de combattre cette présomption légale en apportant des éléments de nature à établir que la somme transférée n'entre pas dans le champ d'application de l'impôt sur le revenu, ou qu'elle constitue un revenu qui a déjà été soumis à l'impôt, ou qu'elle est exonérée de cet impôt ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 30 juillet 1997, a été porté au crédit d'un compte bancaire détenu par M. A un virement d'un montant de 299 813 francs (45 706,20 euros) provenant du débit d'un compte bancaire détenu par l'intéressé au Luxembourg auprès d'une banque luxembourgeoise ; qu'il est constant que M. A s'était abstenu de procéder à la déclaration des références de ce compte à l'étranger exigée par les dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A précité ; que, si les requérants soutiennent à cet égard que cette somme constitue partie de la garantie d'un prêt consenti par une banque luxembourgeoise en 1992 et que le montant constituant cette garantie a été bloqué sur un compte rémunéré à terme trimestriel ouvert auprès de cette banque, ces circonstances, à les supposer suffisamment établies par les pièces du dossier, ne sont toutefois pas propres à prouver que la somme ainsi virée en France le 30 juillet 1997 n'a pas constitué un revenu imposable, alors surtout que les requérants soutiennent que le dépôt de garantie dont s'agit a été constitué au moyen de sommes portées par M. A à son retour de Dubaï en 1988 au crédit d'un compte ouvert auprès de la même banque et précisent que ce dépôt a été productif d'intérêts, lesquels constituent un revenu, mais ne soutiennent en revanche pas que ces sommes n'auraient pas constitué un revenu imposable ; qu'ils ne soutiennent pas non plus que la somme ainsi portée en compte en 1988 aurait constitué le produit de la cession d'un élément de patrimoine ; que, dès lors que le fait générateur de l'impôt est constitué par le transfert en 1997 de la somme de 299 813 francs (45 706,20 euros), ils ne sauraient non plus utilement soutenir que M. A avait initialement perçu tout ou partie du revenu correspondant dès 1988 ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à prétendre que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté le surplus des conclusions de leur demande ;

Sur l'appel incident du ministre concernant les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) ;

Considérant qu'au cours des années 1997 à 1999, M. et Mme A, qui ne sont pas de nationalité française, ont été matériellement séparés pendant de longues durées du fait des activités professionnelles de M. A en Egypte puis en Algérie ; que le ministre ne conteste pas, en appel, que M. et Mme A étaient également séparés de biens, ni qu'ont été déclarés aux administrations fiscales égyptienne et algérienne les revenus salariaux tirés par M. A de ces activités dans ces deux pays ; qu'il est également constant que le centre des impôts des non-résidents avait considéré que les revenus perçus par M. A du fait de son activité salariée en Egypte en 1995 et 1996 n'étaient pas soumis à l'impôt en France et ce, après que ce dernier avait souscrit des déclarations au titre de ces deux années auprès de ce centre des impôts ; que, compte tenu de ces éléments, le ministre n'établit pas que les circonstances que Mme A, sur la déclaration distincte de revenus qu'elle avait souscrite en 1996 au titre de l'année 1995, s'était déclarée à tort, à la suite du départ de son époux en Egypte, comme séparée de ce dernier et, par la suite et au titre des années 1997 à 1998, n'avait pas modifié la mention vous êtes séparée ou divorcée portée sur les déclarations de revenus pré-imprimées adressées au contribuable, procéderaient d'une volonté délibérée, constitutive de la mauvaise foi, d'éluder l'impôt ; que la circonstance que le compte détenu au Luxembourg et depuis lequel a été effectué le 30 juillet 1997 le virement susmentionné n'a pas été déclaré dans les conditions exigées par l'article 1649 A du code général des impôts n'est pas, en l'espèce, propre à établir la mauvaise foi, dès lors que les requérants ont pu, quoiqu'à tort, croire qu'ils n'étaient pas astreints à souscrire en France une déclaration d'ensemble de leurs revenus au titre de l'année 1997 ; que si les opérations de contrôle ont conduit à des majorations importantes des revenus déclarés par M. et Mme A dans les déclarations qu'ils ont souscrites à la suite des mises en demeure qui leur ont été adressées par le service, cette circonstance n'est pas non plus de nature à établir une intention délibérée d'éluder l'impôt, alors surtout qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A ont pu justifier de l'origine et du caractère non imposable de 94 % des sommes ayant fait l'objet des demandes de justifications qui leur avaient été adressées sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; qu'il en résulte que le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er de son jugement, le Tribunal administratif de Rouen a prononcé la décharge des pénalités pour mauvaise foi infligées à M. et Mme A ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance et pour l'essentiel la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme A à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident présentées par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Rabah A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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N°09DA00036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 09DA00036
Date de la décision : 18/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Appeche-Otani
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : SELARL GUY FARCY-OLIVIER HORRIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-11-18;09da00036 ?
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