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25/11/2010 | FRANCE | N°10DA00787

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 25 novembre 2010, 10DA00787


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 1er juillet 2010, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le PREFET DE LA SEINE-MARITIME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000423 du 1er juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de M. Mehmet A, son arrêté, en date du 18 janvier 2010, refusant de délivrer au demandeur un titre de séjour ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Le PREFET DE LA SEINE-MARITIME soutient q

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 1er juillet 2010, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le PREFET DE LA SEINE-MARITIME demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000423 du 1er juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de M. Mehmet A, son arrêté, en date du 18 janvier 2010, refusant de délivrer au demandeur un titre de séjour ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Rouen ;

Le PREFET DE LA SEINE-MARITIME soutient que c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté sur la base des stipulations de l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association entre la Communauté économique européenne et la Turquie, dès lors que M. A n'était titulaire d'aucun titre de séjour et qu'il ne détenait que le récépissé délivré au demandeur du statut de réfugié prévu à l'article R. 742-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 août 2010 et régularisé le 20 septembre 2010, présenté pour M. Mehmet A, domicilié ..., par Me Demir, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispostions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; M. A soutient que le préfet a méconnu l'autorité de chose jugée, un précédent arrêté, en date du 9 décembre 2009, ayant été annulé par un jugement du Tribunal administratif de Rouen, en date du 6 avril 2010 ; que la décision n° 1/80 du conseil d'association du 19 septembre 1980 est d'applicabilité directe dans le droit national ; qu'il réunissait les conditions pour se voir délivrer de plein droit le renouvellement de son autorisation de travail ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord instituant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie, en date du 12 septembre 1963, approuvé et confirmé par la décision n° 64/732/CEE du Conseil du 23 décembre 1963 ;

Vu la décision n° 1/80 du conseil d'association du 19 septembre 1980 relative au développement de l'association entre la Communauté économique européenne et la Turquie ;

Vu la décision n° C-237/91 du 16 décembre 1992 de la Cour de justice des communautés européennes ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller, les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association institué par l'accord d'association conclu le 12 septembre 1963 entre la Communauté économique européenne et la République de Turquie : 1. Sous réserve des dispositions de l'article 7 relatif au libre accès à l'emploi des membres de sa famille, le travailleur turc, appartenant au marché régulier de l'emploi d'un Etat membre : / - a droit, dans cet Etat membre, après un an d'emploi régulier, au renouvellement de son permis de travail auprès du même employeur, s'il dispose d'un emploi (...) ; qu'aux termes de l'article R. 742-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Le demandeur d'asile auquel une autorisation provisoire de séjour a été délivrée en application de l'article R. 742-1 est mis en possession d'un récépissé de la demande d'asile valant autorisation provisoire de séjour dans un délai maximal de trois jours à compter de l'expiration de la validité de l'autorisation provisoire de séjour mentionnée à l'article R. 742-1, sur présentation de la lettre de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides l'informant de l'enregistrement de sa demande d'asile ou de la décision de procéder à un nouvel examen de cette demande. / Ce récépissé porte la mention récépissé constatant le dépôt d'une demande d'asile et a une durée de validité de trois mois renouvelable jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. / L'accès au marché du travail ne peut être autorisé au demandeur d'asile que dans le cas où l'office, pour des raisons qui ne sont pas imputables au demandeur, n'a pas statué sur la demande d'asile dans un délai d'un an suivant l'enregistrement de la demande. Dans ce cas, le demandeur d'asile est soumis aux règles de droit commun applicables aux travailleurs étrangers pour la délivrance d'une autorisation provisoire de travail. La situation de l'emploi lui est opposable (...) ; qu'aux termes de l'article R. 742-3 du même code : Sur présentation de l'accusé de réception d'un recours devant la Cour nationale du droit d'asile contre une décision négative de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou du reçu de l'enregistrement du recours délivré par la Cour nationale du droit d'asile, le demandeur d'asile obtient le renouvellement du récépissé de la demande d'asile visé à l'article R. 742-2 d'une durée de validité de trois mois renouvelable jusqu'à la notification de la décision de la cour. / Lorsqu'un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, le demandeur d'asile qui a obtenu le renouvellement de son récépissé dans les conditions prévues à l'alinéa précédent est soumis aux règles de droit commun applicables aux travailleurs étrangers pour la délivrance d'une autorisation provisoire de travail (...) ;

Considérant que le PREFET DE LA SEINE-MARTIME relève appel du jugement du 1er juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a annulé, à la demande de M. A, son arrêté, en date du 18 janvier 2010, refusant de délivrer au demandeur un titre de séjour, décision assortie d'une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination en cas de renvoi ;

Considérant que M. A, ressortissant turc, né en 1981, déclare être sur le territoire français le 12 octobre 2007 ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'ayant sollicité son admission au statut de réfugié le 29 novembre 2007, sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 mai 2008, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 9 novembre 2009 ; que l'intéressé est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminé, en date du 14 octobre 2008 ;

Considérant qu'il résulte de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes, en date du 16 décembre 1992, susvisé, que l'article 6 premier paragraphe, premier tiret, de la décision du 19 septembre 1980 du conseil d'association, qui a un effet direct en droit interne, doit être interprété en ce sens que, d'une part, un ressortissant turc qui a obtenu un permis de séjour sur le territoire d'un Etat membre et y a travaillé depuis plus d'un an auprès du même employeur sous le couvert d'un permis de travail valide a droit au renouvellement de son permis de travail en vertu de cette disposition et que, d'autre part, un travailleur turc qui remplit les conditions de l'article 6, premier paragraphe, premier tiret, de la décision susmentionnée peut obtenir, outre la prorogation du permis de travail, celle du permis de séjour, le droit de séjour étant indispensable à l'accès et à l'exercice d'une activité salariée ; que l'exercice des droits que les ressortissants turcs tirent de la décision susmentionnée n° 1/80 du conseil d'association du 19 septembre 1980 n'est subordonné à aucune condition relative au motif pour lequel un droit d'entrée et de séjour leur a été initialement accordé de l'Etat membre d'accueil ; que la circonstance que M. A avait, préalablement à sa demande de titre de séjour, été admis sur le territoire français au titre de demandeur d'asile, statut qui lui permettait régulièrement d'avoir accès au marché du travail d'un Etat membre, ne pouvait fonder le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté, en date du 18 janvier 2010 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DE LA SEINE-MARITIME est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à M. Mehmet A.

Copie sera transmise au PREFET DE LA SEINE-MARITIME.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 10DA00787
Date de la décision : 25/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mulsant
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guyau
Rapporteur public ?: M. Larue
Avocat(s) : DEMIR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-11-25;10da00787 ?
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