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02/12/2010 | FRANCE | N°10DA01030

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 02 décembre 2010, 10DA01030


Vu la requête, enregistrée le 13 août 2010 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée par la production de l'original le 18 août 2010, présentée pour M. Sidi A, demeurant ..., par la Selarl Gryner, Levy ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002595 du 9 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 25 mars 2010, du préfet du Pas-de-Calais refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixan

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Vu la requête, enregistrée le 13 août 2010 par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et confirmée par la production de l'original le 18 août 2010, présentée pour M. Sidi A, demeurant ..., par la Selarl Gryner, Levy ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002595 du 9 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 25 mars 2010, du préfet du Pas-de-Calais refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant comme pays de destination le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays pour lequel il établit être légalement admissible, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte fixée à 30 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le refus de titre de séjour a été signé par une autorité incompétente ; que l'arrêté ne comporte pas la mention selon laquelle le signataire agissait en l'absence ou en cas d'empêchement du préfet ; que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il est marié à une ressortissante française depuis le 6 mars 2010, avec qui il vit depuis ; qu'il réside en France depuis le 13 juin 2007 ; qu'il est intégré à la société française ; qu'il peut prétendre à un titre sur le fondement de l'article L. 313-11 4° ; que ce texte n'impose pas la production d'un visa de long séjour ; que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2010, présenté par le préfet du

Pas-de-Calais ; il conclut au rejet de la requête et fait valoir que le signataire de l'acte a régulièrement reçu délégation pour signer l'arrêté contesté ; que la délégation n'est pas subordonnée à l'absence ou l'empêchement du préfet ; que la délivrance de plein droit d'un titre de séjour à un étranger marié à une ressortissante française est subordonnée à la production d'un visa de long séjour au regard des dispositions combinées des articles L. 313-11 4° et L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la demande de titre déposée par M. A ne pouvait être regardée comme une demande implicite de visa de long séjour au motif qu'il ne justifiait ni de six mois de vie commune avec son épouse, ni de la régularité de son séjour sur le territoire français ; qu'il n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Côte d'Ivoire du 21 septembre 1992 relative à la circulation et au séjour des personnes ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sylvie

Appèche-Otani, président-assesseur, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête ;

Considérant que M. A, ressortissant ivoirien, est entré en France, selon ses déclarations, le 13 juin 2007, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes ; qu'après avoir épousé une ressortissante française le 6 mars 2010, il a sollicité le 16 mars 2010 une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint de ressortissante française ; que, par un arrêté en date du 25 mars 2010, le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ; que M. A relève appel du jugement, en date du 9 juillet 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité ;

Sur la légalité du refus de titre :

Considérant, en premier lieu, que M. A reprend en appel de manière identique, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce moyen doit être écarté par adoption du motif retenu par les premiers juges ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 14 de la convention

franco-ivoirienne susvisée : Les points non traités par la convention en matière d'entrée et de séjour des étrangers sont régis par les législations respectives des deux États ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour compétences et talents sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; qu'aux termes des quatrième et sixième alinéas de l'article L. 211-2-1 du même code : Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour (...) ;

Considérant que M. A, né le 30 décembre 1978 et de nationalité ivoirienne, est, selon ses déclarations, entré en France le 13 juin 2007 ; qu'il s'est marié, le 6 mars 2010, avec une ressortissante française et a déposé, le 16 mars suivant, une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité de conjoint d'un ressortissant de nationalité française ; que l'intéressé doit être regardé comme ayant également demandé la délivrance d'un visa de long séjour sur le fondement de l'article L. 211-2 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susrappelé ; que, le 25 mars 2010, le préfet a pris un arrêté par lequel il a explicitement refusé de délivrer un titre de séjour à M. A, décision assortie d'une obligation de quitter le territoire français et d'une décision fixant le pays de destination, et lui a implicitement, mais nécessairement, refusé de donner suite à la demande de visa de long séjour ; que si le requérant est entré en Italie le 13 juin 2007, muni d'un visa de court séjour Etats Schengen valable du 13 au 30 juin 2007, il ne justifie pas être entré régulièrement en France pendant la durée de validité dudit visa de court séjour ; qu'il n'est pas davantage établi qu'il aurait séjourné avec son conjoint depuis plus de six mois à la date de la décision litigieuse ; que, dans ces conditions, M. A ne pouvant prétendre à la délivrance d'un visa de long séjour sur le fondement du quatrième alinéa de l'article L. 211-2 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, c'est à bon droit que le préfet a rejeté sa demande de titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante de nationalité française ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant, d'une part, que le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article

L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant dès lors que la demande de titre de séjour présentée par M. A était fondée non sur ces dispositions mais sur celles de l'article L. 313-11 4° dudit code ;

Considérant, d'autre part, que M. A soutient, sans l'établir, résider en France depuis 2007 et être marié avec une ressortissante française ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier qu'il était marié depuis seulement 19 jours à la date de la décision attaquée ; qu'il ne justifie pas, par les seules attestations produites et postérieures à celle-ci, de l'ancienneté de leur relation ; qu'il n'est pas isolé en Côte d'Ivoire où réside le reste de sa famille ; qu'il se borne à alléguer être parfaitement intégré à la société française ; que, dans ces conditions et eu égard au caractère très récent de son mariage, le refus de titre de séjour que lui a opposé le préfet n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour attaquée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant doit être écarté ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux indiqués précédemment, M. A n'établit pas, en invoquant les éléments de fait susmentionnés, que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences ou méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le rejet, par le présent arrêt, des conclusions à fin d'annulation, entraîne, par voie de conséquence, celui des conclusions à fin d'injonction ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Sidi A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

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N°10DA01030 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Foucher
Rapporteur ?: Mme Sylvie Appeche-Otani
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : SELARL GRYNER LEVY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Date de la décision : 02/12/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10DA01030
Numéro NOR : CETATEXT000023564026 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-12-02;10da01030 ?
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