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25/01/2011 | FRANCE | N°09DA01148

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 25 janvier 2011, 09DA01148


Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE RANSART, représentée par son maire en exercice, par Me Delevacque ; la COMMUNE DE RANSART demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305894 du 26 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de M. Jean-Louis A, de la SARL Entreprise de peinture Boubet, de la SA Euridep, de la SARL de peinture industrie Bauduin, de la SA Artebat, de la SARL Camus JP ainsi que de M. Gérard C au

paiement d'une somme de 33 607,60 euros ainsi que d'une somme de ...

Vu la requête, enregistrée le 31 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la COMMUNE DE RANSART, représentée par son maire en exercice, par Me Delevacque ; la COMMUNE DE RANSART demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0305894 du 26 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de M. Jean-Louis A, de la SARL Entreprise de peinture Boubet, de la SA Euridep, de la SARL de peinture industrie Bauduin, de la SA Artebat, de la SARL Camus JP ainsi que de M. Gérard C au paiement d'une somme de 33 607,60 euros ainsi que d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de mettre à la charge de M. Jean-Louis A, de la SARL Entreprise de peinture Boubet, de la SA Euridep, de la SARL de peinture industrie Bauduin, de la SA Artebat, de la SARL Camus JP et de M. Gérard C la somme de 50 705,66 euros TTC, à la charge de M. Jean-Louis A et de M. Gérard C la somme de 3 700 euros TTC et enfin, à la charge de M. Jean-Louis A et de la SARL Camus JP la somme de 18 500,45 euros TTC, ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2007, les intérêts étant eux-mêmes capitalisés et, ensemble, une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que l'humidité excessive qui règne dans l'église depuis les travaux de rénovation, dégrade ses murs et rend le sol glissant ; qu'elle a également entraîné la déformation du parquet chauffant ; qu'il ressort du rapport de l'expert judiciaire que cet excès d'humidité provient d'une aération insuffisante ; que ce défaut de ventilation est imputable au maître d'oeuvre, tant au niveau de la conception de l'ouvrage que de la réalisation des travaux ; que la société Entreprise de peinture Boubet est également responsable de cette situation pour avoir mis en oeuvre une peinture inadaptée à la configuration des lieux et pour ne pas avoir attiré l'attention du maître de l'ouvrage sur les conséquences de l'absence d'un dispositif adapté de ventilation et d'aération sur la peinture ; que la société Euridep est responsable, en sa qualité de fabricant de la peinture, pour n'avoir pas déconseillé son emploi ; que la société de peinture industrie Bauduin a manqué à son devoir de conseil, quant aux insuffisances du dispositif de ventilation et d'aération, en sa qualité d'entreprise chargée du lot plâtrerie ; que la société Artebat a manqué à son devoir de conseil en qualité de titulaire du gros oeuvre ; que, de plus, cette société n'a pas exécuté correctement les travaux de gros oeuvre du mur du choeur ; que la responsabilité de la société Camus doit être engagée dans la mesure où celle-ci n'a pas signalé le caractère manifestement inadéquat du dispositif de survitrage étanche et non ouvrant ; qu'il en va de même en ce qui concerne M. Gérard C qui a procédé à la mise en place du plancher chauffant sans alerter le maître d'ouvrage sur le défaut d'aération du bâtiment ; que ces entreprises responsables doivent être condamnées à prendre en charge les travaux de reprise de peinture, qui s'élèvent à 13 688,38 euros TTC, ainsi que des travaux d'amélioration de la ventilation qui s'élèvent à 8 900 euros TTC ; que ces entreprises doivent être également condamnées à prendre en charge le coût du dispositif de déshydratation, qui s'élève à 20 909 euros TTC ; que la détérioration des vitraux du fait de la pose d'un survitrage est imputable au maître d'oeuvre, M. A, et à la société Camus JP, titulaire du lot menuiseries extérieures, représentant un montant total de réfection de 18 500,45 euros TTC ; que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que des taches et des moisissures superficielles ne constituaient pas des désordres susceptibles d'engager la responsabilité des constructeurs ; que la déformation du parquet, par l'effet de l'humidité, et la présence de condensation sur le carrelage sont également susceptibles d'entraîner des chutes de personnes ; que la responsabilité de la dégradation du sol chauffant incombe à la fois à M. A et à M. C ; que c'est à tort que le tribunal a écarté ce facteur de désordre au motif que le soulèvement du parquet de 2 cm ne portait pas atteinte à l'accessibilité du bâtiment aux personnes handicapées ; que la responsabilité du maître d'oeuvre, au titre de son obligation de conseil au maître d'ouvrage, serait engagée si le désordre associé au parquet chauffant était considéré comme apparent lors de la réception de l'ouvrage ; que le mur du choeur est également affecté des désordres résultant d'une humidité excessive due à l'insuffisance de renouvellement d'air, à des remontées capillaires favorisées par l'enduit étanche et par la mauvaise exécution des travaux de rejointoiement du soubassement ; que ces désordres, dont la réparation représente une somme de 9 900 euros TTC, sont imputables à l'architecte, tant au niveau de la conception que de la réalisation des travaux, mais également à la société Artebat, qui a appliqué l'enduit et exécuté les joints, ainsi qu'à l'ensemble des entreprises ou, subsidiairement, au seul maître d'oeuvre du fait d'un défaut de conseil lors de la réception des travaux ; que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que les fissures du soubassement étaient préexistantes aux travaux et qu'elles auraient été visibles lors des opérations de réception ; que, subsidiairement, à défaut de responsabilité au titre de la garantie des constructeurs, la commune demande la mise en jeu de la garantie contractuelle des entreprises, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés précédemment, notamment au titre de la garantie de parfait achèvement, dès lors que les désordres ont été dénoncés dans le cadre de l'année de parfait achèvement ; que son action en référé, ayant eu pour effet d'interrompre le délai de prescription, elle est fondée à demander le bénéfice de la garantie de parfait achèvement ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 août 2009, présenté pour la société PPG AC France venant aux droits de la société Sigmakalon Euridep, dont le siège social est situé Immeuble les Fontaines, 10 rue Henri Sainte-Claire Deville à Rueil-Malmaison (92565), par Me Raynard ; elle conclut à la confirmation du jugement, au rejet de la requête et à la condamnation de la commune à lui payer une somme de 1 000 euros pour procédure abusive ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient, qu'en tant que fabricant du produit, elle n'a pas la qualité de constructeur ; que, de plus, le produit a été vendu à l'entreprise de peinture par l'intermédiaire d'un fournisseur tiers ; que, dès lors, le fabricant, qui ignorait totalement l'emploi qui allait être fait de son produit, ne peut être tenu pour responsable de son caractère inadapté au travail effectué ; que la qualité intrinsèque du produit n'est pas mise en cause par le rapport d'expertise ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2009, présenté pour la société Artebat, dont le siège social est situé ZA Longs Champs à Beaurains (62217), par Me Dutat ; elle conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que les désordres ne relèvent pas de la garantie décennale, dans la mesure où la présence d'humidité ne porte pas atteinte à la solidité de l'édifice et ne le rend pas impropre à sa destination, ainsi qu'il ressort du rapport d'expertise qui qualifie les désordres affectant la peinture de superficiels ; que l'aggravation des désordres, revendiquée par la commune en dehors de toute procédure contradictoire, ne peut être admise ; que les travaux de gros oeuvre exécutés par l'entreprise sont sans rapport avec l'humidité ; que l'entreprise, qui n'était pas concernée par la ventilation de l'édifice, ne peut se voir reprocher un défaut de conseil sur ce point ; que, de plus, l'entreprise n'est intervenue que sur la façade extérieure de l'église ; que le montant des indemnités demandées est, en tout état de cause, excessif dans la mesure où la déshumidification de l'intérieur de l'église n'était prévue par l'expert qu'à titre complémentaire ; qu'elle doit être garantie par M. A des condamnations éventuellement prononcées contre elle ; qu'elle n'est pas davantage responsable des désordres affectant le mur du choeur dans la mesure où les cloques de la peinture ne correspondent pas à un désordre ayant un caractère décennal ; qu'elle n'est pas davantage responsable du défaut de ventilation intérieure de l'église, pas plus que de la fuite en toiture ; que la fissuration du soubassement était préexistante et était visible lors de la réception des travaux ; que la demande d'un montant de 5 000 euros, correspondant au devis de la société Murprotec, est excessive car celui-ci ne représente que 2 308 euros TTC ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2009, présenté pour la société Entreprise de peinture Boubet, dont le siège social est situé ZAC du Val de Lys, rue Jean Monnet à Aire sur la Lys (62120), pour la SARL Camus JP, dont le siège social est situé 4 rue Gustave Eiffel à Arras (62000) et pour M. Gérard C, demeurant ..., par la SCP Verley et Pille ; ils concluent à la confirmation du jugement attaqué, au rejet de la requête et à la condamnation de la commune à leur payer une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent qu'il ressort du rapport d'expertise que les survitrages posés par la société Camus JP sont conformes au cahier des clauses techniques particulières ; que l'origine des désordres doit être recherchée dans la conception de l'ouvrage ; qu'aucun défaut d'exécution ne peut être reproché à l'entreprise ; que la société demande à être garantie des condamnations éventuellement prononcées contre elle par M. A en sa qualité de maître d'oeuvre ; que la commune n'est pas davantage fondée à invoquer la responsabilité de M. C, en qualité de constructeur du plancher chauffant, lequel n'est pas affecté de désordres le rendant impropre à sa destination, la différence de niveau affectant le sol chauffant étant, d'une part, dans la limite des tolérances admises et, d'autre part, visible lors de la réception des travaux, sans qu'elle ait fait l'objet de réserves ; que la société Boubet n'est pas susceptible de voir sa responsabilité de constructeur engagée en ce qui concerne l'exécution des travaux de peinture dans la mesure où les dommages visés au niveau du choeur sont consécutifs à une fuite en couverture et à des remontées capillaires ; que, pour l'essentiel, les désordres sont dus à un manque de ventilation ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 février 2010, présenté pour M. Jean-Louis A, demeurant ..., par Me Ducloy ; il conclut à la confirmation du jugement attaqué, au rejet de la requête ainsi qu'à la condamnation de la COMMUNE DE RANSART à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que la recevabilité de la requête d'appel, enregistrée le 31 juillet 2009, n'est pas établie par rapport à la date de notification du jugement ; que la requête d'appel de la commune n'est pas accompagnée de la copie du jugement attaqué ; que la COMMUNE DE RANSART ne peut s'appuyer sur un rapport d'expertise non contradictoire ; que la garantie des travaux de peinture n'est pas de 10 ans et que la réclamation présentée à ce titre est tardive ; que les désordres affectant la peinture n'ont qu'un caractère superficiel, auquel il peut être remédié en procédant à un simple nettoyage ; que les modifications qui pourraient être apportées à l'aération de l'église procureraient un enrichissement sans cause à la commune ; que le maître d'oeuvre ne peut être tenu pour responsable d'une différence de niveau de 2 cm ou de 4 cm affectant le plancher chauffant ; que la comparaison du rapport de l'expert D avec le rapport Cecanord ne constitue pas la démonstration d'une aggravation du phénomène de moisissures ; qu'il ressort du rapport de l'expert D que l'origine exacte du cloquage de la peinture n'a pas été précisément déterminée ; que la garantie de parfait achèvement invoquée par la commune ne peut être dirigée contre l'architecte ; qu'il demande, en cas de condamnation, à être relevé de sa responsabilité par les autres défendeurs, chacun en ce qui le concerne ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 17 mars 2010 et régularisé par la production de l'original le 19 mars 2010, présenté pour la COMMUNE DE RANSART ; elle conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et, en outre, à ce que le maître d'oeuvre n'est pas fondé à soutenir que l'appel aurait été formé après l'expiration du délai de 2 mois dans la mesure où le jugement a été notifié le 2 juin 2009 et où la requête d'appel a été enregistrée le 31 juillet 2009 ; qu'elle a été accompagnée de la production du jugement attaqué ; que le rapport d'expertise de la société Cecanord, qui émane d'un cabinet d'expertise spécialisé, constitue un élément de preuve du dossier opposable aux autres parties ; que l'humidité excessive qui affecte l'édifice ne touche pas seulement la peinture mais également les plâtres et le plancher chauffant ; que les désordres résultent d'un défaut de ventilation de l'édifice qui rend l'ouvrage impropre à sa destination ; que les menuiseries, mises en oeuvre par la société Camus JP, sont totalement inadaptées au regard de l'aération de l'édifice ; que le dispositif de survitrage, mis en place par l'entreprise, ne ventile que l'espace compris entre le vitrail de l'église et le châssis de protection ; que, s'agissant du plancher chauffant, le seuil de 2 cm invoqué par M. C n'est pas justifié ; que la différence de niveau de 2 cm s'est considérablement accrue et atteint désormais 3 voire 4 cm et constitue un risque de chute pour le public ; que la commune, qui n'est pas un professionnel, ne peut se voir reprocher de ne pas avoir émis de réserves lors de la réception ; que la société Artebat est intervenue en qualité de constructeur et engage, à ce titre, sa responsabilité au regard des principes contenus dans les articles 1792 et suivants du code civil ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er avril 2010, présenté pour la société de peinture industrie Bauduin, dont le siège social est situé 180 rue Jean-Jaurès prolongée, BP 82 à Aniche (59580), par la SCP Lamoril Robiquet Lamoril Delevacque ; elle conclut au rejet de la requête par les motifs qu'il n'a été relevé aucun désordre dans la pièce dans laquelle elle est intervenue, qui est située dans la sacristie, à gauche du choeur ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 avril 2010, présenté pour M. Jean-Louis A qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ; il ajoute, en outre, que l'expert judiciaire n'a relevé aucune aggravation des désordres entre le 27 mai 2003 et le 16 septembre 2004, date de sa dernière visite ; qu'il avait préconisé à la commune d'ouvrir les portes de la galerie située au-dessus de l'entrée de manière à améliorer l'aération de l'édifice ; qu'il n'est pas établi que la commune se serait conformée à ces prescriptions ; que les mesures et analyses effectuées par le cabinet d'expertise appelé par la commune n'ont pas été réalisées contradictoirement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Delevacque, pour la COMMUNE DE RANSART, Me Ducloy, pour M. A, Me Verley, pour la SARL Entreprise de peinture Boubet, pour la SARL Camus JP et pour M. C ;

Considérant que la COMMUNE DE RANSART a fait procéder à une réfection de son église comprenant, d'une part, l'application d'un enduit extérieur côté choeur, la pose de vitrages de protection extérieurs et la peinture de l'intérieur de l'édifice et, d'autre part, le remplacement du plafond et de l'isolation de la sacristie ainsi que la pose d'un plancher chauffant ; que, postérieurement à la réception des travaux intervenue le 17 décembre 2001, des désordres associés à une humidité excessive ont affecté l'intérieur de l'édifice et le plancher chauffant ; que la COMMUNE DE RANSART relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lille du 26 mai 2009 qui a rejeté ses demandes tendant à la condamnation des entreprises à la garantir desdits désordres tant au titre de la garantie des constructeurs qu'à celui de la garantie de parfait achèvement ;

Considérant que la COMMUNE DE RANSART demande la condamnation de la société Sigmakalon Euridep, anciennement dénommée Seigneurie, aux droits de laquelle vient la société PPG AC France, prise en sa qualité de fournisseur des peintures mises en oeuvre sur le chantier ; qu'il résulte de l'instruction que cette société s'est bornée à fournir à la société Santune les peintures mises en oeuvre par la société Entreprise de peinture Boubet, chargée du lot n° 7 peintures ; que, dès lors, la société Sigmakalon Euridep n'a ni la qualité de constructeur, ni celle de cocontractant de la personne publique ; que, par suite, les litiges auxquels peuvent donner lieu les contrats conclus par cette société, dans le cadre du chantier dont s'agit, ne sont pas de ceux qu'il appartient à la juridiction administrative de connaître ; qu'il s'ensuit que la COMMUNE DE RANSART n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions dirigées contre la société Sigmakalon Euridep ;

Sur les conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité décennale des constructeurs :

En ce qui concerne les désordres liés à la présence d'une humidité excessive à l'intérieur de l'édifice :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du rapport d'expertise établi par l'expert M. D, désigné par le président du tribunal administratif, que les désordres qui affectent, sous forme de taches, de moisissures ou de cloquages, les peintures murales intérieures de l'église de Ransart, présentent un caractère superficiel ; que ces désordres, qui affectent des travaux de réfection, ne sont, en tout état de cause, pas de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage, ni à le rendre impropre à sa destination ; que, dès lors, c'est à bon droit que le tribunal a estimé qu'ils ne relevaient pas de la garantie décennale fondée sur les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270, aujourd'hui repris à l'article 1792-4-1 du code civil ;

Considérant, en second lieu, que, si la COMMUNE DE RANSART invoque un désordre constitué par le taux d'humidité excessif qui affecte l'intérieur de l'église, et qui se manifeste par la présence de gouttelettes d'eau sur le sol et d'un taux élevé d'humidité dans les murs, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert susmentionné, que les travaux de réfection effectués par les sociétés Artebat, Peinture industrie Bauduin, Camus JP, Entreprise de peinture Boubet et M. Gérard C, sous la conduite du maître d'oeuvre, M. Jean Louis A, seraient à l'origine de cette humidité ; que l'expert écarte, en particulier, toute incidence de l'emploi d'une peinture pliolite à l'intérieur du bâtiment ainsi que la pose de survitrages à l'extérieur ; que, s'il attribue une aggravation de la présence d'humidité à l'enduit appliqué à l'extérieur sur le mur du choeur, il exclut que cet enduit puisse être à l'origine de cette humidité, laquelle provient du mur de soubassement affecté par des fissures antérieures aux travaux en cause ; que, par suite, les désordres dont se plaint la COMMUNE DE RANSART ne sont pas imputables aux travaux exécutés par les entreprises susmentionnées ;

Considérant qu'il ressort également du rapport d'expertise que les vitraux ne sont pas affectés par des désordres ;

En ce qui concerne les désordres affectant le plancher chauffant :

Considérant que la pose d'un plancher chauffant sur le sol a créé un seuil de 2 cm, correspondant à l'épaisseur des panneaux ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de M. D et des photographies annexées au rapport du cabinet Cecanord Eurexo, que si, dans son état initial, ce seuil était apparent lors de la réception de l'ouvrage, les panneaux se sont ensuite déformés pour constituer une surélévation atteignant par endroit une hauteur de 4 cm par rapport au sol ; que, toutefois, cette différence de niveau, même si elle n'était pas apparente lors de la réception de l'ouvrage, s'avère limitée et circonscrite au pourtour de la zone couverte par lesdits panneaux ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle modifierait substantiellement le sol tel qu'il résultait des travaux prévus au marché ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, cette différence de niveau ne présente pas, du fait de son amplitude limitée et de sa localisation, un désordre de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination ;

Sur les conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité contractuelle des entreprises :

Considérant qu'il est constant que les différents lots du marché en cause ont fait l'objet d'une réception en date du 17 décembre 2001 et que les réserves émises à cette occasion ont été levées, au plus tard, le 17 octobre 2002 ; que cette réception a mis fin aux rapports contractuels entre la COMMUNE DE RANSART, maître de l'ouvrage, et ses cocontractants, en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ; que cette réception fait obstacle à ce que les fautes invoquées par la commune puissent être regardées comme de nature à engager la responsabilité contractuelle de ses cocontractants ;

Sur la mise en jeu de la garantie de parfait achèvement :

Considérant qu'aux termes de l'article 44-1 du cahier des clauses administratives générales - travaux, intitulé Délai de garantie : Le délai de garantie est, sauf stipulation différente du marché et sauf prolongation décidée comme il est dit au 2 du présent article, d'un an à compter de la date d'effet de la réception, ou de six mois à compter de cette date si le marché ne concerne que des travaux d'entretien ou des terrassements. / Pendant le délai de garantie, indépendamment des obligations qui peuvent résulter pour lui de l'application du 4 de l'article 41, l'entrepreneur est tenu à une obligation dite obligation de parfait achèvement au titre de laquelle il doit : a) Exécuter les travaux ou prestations éventuels de finition ou de reprise prévus aux 5 et 6 de l'article 41 ; b) Remédier à tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage ou le maître d'oeuvre, de telle sorte que l'ouvrage soit conforme à l'état où il était lors de la réception ou après correction des imperfections constatées lors de celle-ci ; c) Procéder, le cas échéant, aux travaux confortatifs ou modificatifs dont la nécessité serait apparue à l'issue des épreuves effectuées conformément au CCAP ; d) Remettre au maître d'oeuvre les plans des ouvrages conformes à l'exécution dans les conditions précisées à l'article 40. / Les dépenses correspondant aux travaux complémentaires prescrits par le maître de l'ouvrage ou le maître d'oeuvre ayant pour l'objet de remédier aux déficiences énoncées aux b et c ci-dessus ne sont à la charge de l'entrepreneur que si la cause de ces déficiences lui est imputable. / L'obligation de parfait achèvement ne s'étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l'usage ou de l'usure normale. / A l'expiration du délai de garantie, l'entrepreneur est dégagé de ses obligations contractuelles, à l'exception de celles qui sont mentionnées au 3 du présent article ; les sûretés éventuellement constituées sont libérées dans les conditions prévues au 16 de l'article 4. ; qu'aux termes de l'article 44-2 du même cahier, intitulé Prolongation du délai de garantie : Si, à l'expiration du délai de garantie, l'entrepreneur n'a pas procédé à l'exécution des travaux et prestations énoncés au 1 du présent article ainsi qu'à l'exécution de ceux qui sont exigés, le cas échéant, en application de l'article 39, le délai de garantie peut être prolongé par décision de la personne responsable du marché jusqu'à l'exécution complète des travaux et prestations, que celle-ci soit assurée par l'entrepreneur ou qu'elle le soit d'office conformément aux stipulations du 6 de l'article 41. ;

Considérant, ainsi qu'il a déjà été indiqué, que la SA Euridep, aux droits de laquelle vient désormais la société PPG AC France, n'a conclu, dans le cadre de l'opération litigieuse, aucun contrat avec la COMMUNE DE RANSART ; que cette dernière n'est, dès lors, pas fondée à rechercher la mise en jeu de la responsabilité de la société PPG AC France sur le fondement de la garantie contractuelle de parfait achèvement ;

Considérant que la COMMUNE DE RANSART ne saurait non plus rechercher la mise en jeu de la responsabilité de M. A, architecte, sur le fondement de la garantie de parfait achèvement, laquelle ne s'applique qu'aux entrepreneurs et non aux maîtres d'oeuvre ;

Considérant qu'il ne ressort pas du rapport d'expertise établi par M. D que les travaux de réfection de l'église confiés par la COMMUNE DE RANSART à la SARL Entreprise de peinture Boubet, à la SARL de Peinture industrie Bauduin, à la SA Artebat, à la SARL Camus JP, et à M. Gérard C, n'auraient pas respecté les prescriptions du cahier des clauses techniques particulières ou auraient été mal exécutés ; que, par ailleurs, en se bornant, pour solliciter la mise en jeu de la garantie de parfait achèvement à l'égard des entreprises susmentionnées, à faire état des manquements au devoir de conseil qu'auraient commis ces dernières, et sans indiquer plus précisément les manquements aux obligations contractuelles incriminés, la COMMUNE DE RANSART n'établit pas qu'ils seraient à l'origine des désordres dont elle se plaint ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE RANSART n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions relatives à la mise en oeuvre de la responsabilité décennale, de la responsabilité contractuelle à l'encontre des sociétés Artebat, Peinture industrie Bauduin, Camus JP, Entreprise de peinture Boubet, de M. Gérard C et du maître d'oeuvre, M. Jean-Louis A, ou encore, de la garantie de parfait achèvement ;

Sur l'appel incident de la société PPG AC France :

Considérant que, si la société PPG AC France venant aux droits de la société Sigmakalon Euridep demande la condamnation de la COMMUNE DE RANSART à lui payer une indemnité de 1 000 euros en réparation du préjudice résultant d'une procédure abusive, elle ne justifie pas de la réalité du préjudice dont elle demande réparation ; que, par suite, lesdites conclusions doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la COMMUNE DE RANSART contre la SARL Entreprise de peinture Boubet, la SARL de peinture industrie Bauduin, la SA Artebat, et la SARL Camus JP, contre M. Gérard C et contre M. Jean-Louis A doivent, dès lors, être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la COMMUNE DE RANSART à payer à la société PPG AC France, venant aux droits de la société Sigmakalon Euridep, à la SARL Entreprise de peinture Boubet, à la SA Artebat et à la SARL Camus JP, à M. Gérard C et à M. Jean-Louis A une somme de 1 500 euros, chacun, au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE RANSART est rejetée.

Article 2 : L'appel incident de la société PPG France est rejeté.

Article 3 : La COMMUNE DE RANSART versera à la société PPG AC France, venant aux droits de la société Sigmakalon Euridep, à la SARL Entreprise de peinture Boubet, à la SA Artebat, à la SARL Camus JP, à M. Gérard C et à M. Jean-Louis A, chacun, une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE RANSART, à la société PPG AC France venant aux droits de la société Sigmakalon Euridep, à la SARL Entreprise de peinture Boubet, à la SARL de peinture industrie Bauduin, à la SA Artebat, à la SARL Camus JP, à M. Gérard C et à M. Jean-Louis A.

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N°09DA01148


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 09DA01148
Date de la décision : 25/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Michel Durand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : DUCLOY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-01-25;09da01148 ?
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