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03/02/2011 | FRANCE | N°09DA01682

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (bis), 03 février 2011, 09DA01682


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 4 décembre 2009, présentée pour Mme Chedlia A, demeurant ..., par Me Valles ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700340 du 1er octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 4 décembre 2006 par laquelle le président du conseil général de la Seine-Maritime a refusé de renouveler son agrément en qualité d'assistante maternelle ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décisi

on ;

3°) de mettre à la charge du conseil général de la Seine-Maritime une somm...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 4 décembre 2009, présentée pour Mme Chedlia A, demeurant ..., par Me Valles ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700340 du 1er octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 4 décembre 2006 par laquelle le président du conseil général de la Seine-Maritime a refusé de renouveler son agrément en qualité d'assistante maternelle ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre à la charge du conseil général de la Seine-Maritime une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme A soutient que c'est à tort que le président du conseil général de la Seine-Maritime a refusé de renouveler son agrément alors qu'une décision implicite accordant cet agrément était née ; que la décision litigieuse est insuffisamment motivée ; que le président du conseil général de la Seine-Maritime et la commission consultative départementale paritaire ne pouvaient prendre en compte un rapport établi par le service de l'aide sociale à l'enfance dont elle n'était plus salariée et qui contenait des éléments erronés sur l'accueil des enfants qui lui étaient précédemment confiés ; que les droits de la défense ont été violés, la requérante n'ayant pas été à même de faire valoir son point de vue auprès des services de l'aide sociale à l'enfance ; que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 août 2010, présenté pour le président du conseil général de la Seine-Maritime, dont le siège est l'Hôtel du Département, Quai Jean Moulin à Rouen cédex (76001), par la SCP Emo, Hebert et Associés, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; le président du conseil général soutient que la requête est irrecevable faute d'avoir produit l'intégralité du jugement contesté et faute d'avoir développé des moyens d'appel ; qu'il pouvait valablement retirer la décision implicite accordant l'agrément à la requérante dans un délai de deux mois, celle-ci étant illégale ; que la décision précise les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'il pouvait, ainsi que la commission consultative paritaire départementale, prendre connaissance de tous éléments de nature à éclairer leur avis ou décision ; que la procédure suivie a respecté la règle du contradictoire et qu'aucune disposition n'impose que les rapports des services sociaux doivent être soumis à cette règle ; que sa décision est pleinement justifiée au regard de l'attitude de la requérante vis-à-vis des enfants en bas âge ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 8 septembre 2010 et régularisé par la production de l'original le 10 septembre 2010, présenté pour Mme A, qui conclut aux fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 19 janvier 2011 et régularisé par la production de l'original le 21 janvier 2011, présenté pour le président du conseil général de la Seine-Martitime ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller, les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que par une décision en date du 4 janvier 2004 le président du conseil général de la Seine-Maritime a retiré l'agrément d'assistante maternelle de Mme A ; que par un jugement en date du 28 février 2006 le Tribunal administratif de Rouen a annulé cette décision ; que par une décision en date du 4 décembre 2006 le président du conseil général de la Seine-Maritime a refusé de renouveler ledit agrément, laquelle décision doit être regardée, suite au jugement précité du 28 février 2006, comme un nouveau retrait d'agrément ; que Mme A relève appel du jugement en date du 1er octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 4 décembre 2006 du président du conseil général de la Seine-Maritime ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par le conseil général de la Seine-Maritime :

Considérant que, d'une part, la requête déposée par Mme A devant la Cour étant accompagnée de l'intégralité du jugement attaqué, elle répondait, dès lors, aux exigences de l'article R. 412-1 du code de justice administrative ; que, d'autre part, la requête de Mme A, qui ne constitue pas la seule reproduction littérale de sa demande présentée au Tribunal administratif de Rouen, contient l'exposé des faits et des moyens ainsi que l'énoncé des conclusions soumises à la Cour ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ; que, dès lors, les fins de non-recevoir opposées par le conseil général de la Seine-Maritime, tirées du défaut de production du jugement attaqué et du défaut de motivation de la requête, doivent être écartées ;

Sur la légalité de la décision du 4 décembre 2006 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles : L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil général du département où le demandeur réside. (...) L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. Les modalités d'octroi ainsi que la durée de l'agrément sont définies par décret. Cette durée peut être différente selon que l'agrément est délivré pour l'exercice de la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial. Les conditions de renouvellement de l'agrément sont fixées par ce décret ; qu'aux termes de l'article R. 421-3 du même code : Pour obtenir l'agrément (...), le candidat doit : 1° Présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif ; 2° Passer un examen médical qui a pour objet de vérifier que son état de santé lui permet d'accueillir habituellement des mineurs et dont le contenu est fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la famille ; 3° Disposer d'un logement dont l'état, les dimensions, les conditions d'accès et l'environnement permettent d'assurer le bien-être et la sécurité des mineurs compte tenu du nombre et, s'agissant d'un candidat à l'agrément d'assistant maternel, de l'âge de ceux pour lesquels l'agrément est demandé ; qu'aux termes de l'article R. 421-11 dudit code : Les dispositions des articles R. 421-1 à R. 421-10 sont applicables aux demandes de renouvellement d'agrément ;

Considérant que, pour retirer l'agrément de Mme A en tant qu'assistante familiale, le président du conseil général de la Seine-Maritime a fondé sa décision, d'une part, sur un rapport d'évaluation, en date du 25 septembre 2006, réalisé par l'équipe médico-sociale du conseil général qui concluait aux nombreuses lacunes de la requérante dans le domaine du développement de l'enfant, et d'autre part, sur un rapport, en date du 9 octobre 2006, du service de l'aide sociale à l'enfance, faisant état de difficultés rencontrées lors de l'accueil d'adolescentes à son domicile ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que l'avis de la commission consultative paritaire départementale, qui a entendu Mme A le 30 novembre 2006, était partagé, seule la voix prépondérante de la présidente permettant à celle-ci de se prononcer en faveur d'un retrait d'agrément ;

Considérant que, par ailleurs, si le rapport d'évaluation, en date du 25 septembre 2006, rédigé par une assistante sociale et une infirmière puéricultrice, concluait à des lacunes sur le plan de l'alimentation des enfants en bas âge ainsi que sur le plan de leur éveil, à une non remise en cause de ses connaissances et une absence de compréhension des exigences du service du conseil général en matière de sécurité, il ressort néanmoins que ces conclusions sont contredites par les termes même de ce rapport d'évaluation ; qu'ainsi l'appartement de la requérante permet d'accueillir des enfants en toute sécurité et Mme A a fait disposer un verrou sur une fenêtre tel que les signataires du rapport l'avaient exigé lors de leur première visite domiciliaire ; que la requérante, qui a élevé ses quatre enfants, dispose d'un agrément régulièrement renouvelé depuis 1994 et a bénéficié de formations professionnelles au cours de sa carrière ; que, par ailleurs, le rapport rédigé le 2 mai 2002, en vue d'un précédent renouvellement d'agrément, reconnaissait les compétences professionnelles de Mme A ;

Considérant, d'autre part, que les deux adolescentes placées chez Mme A ont été retirées le 20 octobre 2003 suite à une plainte pour agression de la part du mari de la requérante sur une d'entre elles ; que l'avis du service de l'aide sociale à l'enfance en date du 9 octobre 2006 reprend les termes de cette plainte alors que celle-ci a fait l'objet d'un classement sans suite de la part du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Rouen le 4 septembre 2009 et sans apporter d'éléments nouveaux probants ; que les faits ainsi dénoncés par les adolescentes et repris dans cet avis étaient contredits par un précédent rapport rédigé le 2 mai 2002, en vue d'un précédent renouvellement d'agrément, sans qu'il soit fait mention d'une évolution des compétences professionnelles de la requérante ;

Considérant que, dans ces circonstances, Mme A est fondée à soutenir que la décision du 4 décembre 2006 du président du conseil général de la Seine-Maritime ne pouvait intervenir sur ces bases ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 décembre 2006 du président du conseil général de la Seine-Maritime ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande le conseil général de la Seine-Maritime au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge du conseil général de la Seine-Maritime une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Rouen du 1er octobre 2009 et la décision du président du conseil général de la Seine-Maritime du 4 décembre 2006 sont annulés.

Article 2 : Le conseil général de la Seine-Maritime versera à Mme A une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Chedlia A et au président du conseil général de la Seine-Maritime.

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N°09DA01682


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Mulsant
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guyau
Rapporteur public ?: M. Larue
Avocat(s) : SCP EMO HEBERT et ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (bis)
Date de la décision : 03/02/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 09DA01682
Numéro NOR : CETATEXT000023762646 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-02-03;09da01682 ?
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