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10/02/2011 | FRANCE | N°09DA00281

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (ter), 10 février 2011, 09DA00281


Vu la requête, enregistrée le 23 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. François A, demeurant ..., par Me Racle, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0700531 du 22 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens, après avoir condamné le Centre hospitalier d'Amiens à lui verser une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral causé par la suspension de ses fonctions décidée le 6 mars 2002, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande, tendant à la condamnation du Cent

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Vu la requête, enregistrée le 23 février 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. François A, demeurant ..., par Me Racle, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0700531 du 22 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens, après avoir condamné le Centre hospitalier d'Amiens à lui verser une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral causé par la suspension de ses fonctions décidée le 6 mars 2002, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande, tendant à la condamnation du Centre hospitalier d'Amiens à lui verser une somme de 707 562,68 euros en réparation des préjudices que lui a causé la mesure de suspension de ses fonctions à demi-traitement du 6 mars 2002 au 14 novembre 2003 ;

2°) de condamner le Centre hospitalier d'Amiens à lui verser la somme de 707 562,68 euros à titre de dommages et intérêts, toutes causes de préjudices confondues ;

3°) de condamner le Centre hospitalier d'Amiens à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la demande de première instance n'était pas tardive ; que la sanction de suspension à demi-traitement dont il a fait l'objet l'a mis dans l'impossibilité de faire face à ses engagements financiers et à l'entretien de ses enfants poursuivant des études supérieures ; qu'il a également été porté atteinte à son honorabilité, à sa dignité et à son crédit ; que le jugement a sous-évalué le préjudice moral allégué ; que, du fait de la privation de partie de sa rémunération, il a été contraint à des mesures de gestion financière imprévues affectant la constitution de son patrimoine et que le coût d'une année supplémentaire suivie par son fils moralement affecté doit être intégré à l'évaluation du préjudice ; que les désagréments et préjudices financiers n'ont pas pour cause la procédure pénale mais ont pour cause directe les décisions prises par le Centre hospitalier d'Amiens et que le versement a posteriori des traitements n'est pas de nature à réparer ces préjudices ; que, s'agissant du préjudice moral, il réclame la somme de 600 000 euros pour toute la famille ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 24 août 2009 et régularisé par la production de l'original le 25 août 2009, présenté pour le Centre hospitalier universitaire d'Amiens, représenté par son directeur en exercice, dont le siège social est situé place Victor Pauchet à Amiens (80054), par la SCP Cottignies, Cahitte, Cottinet, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A à lui payer une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir que ce n'est que postérieurement au jugement du Tribunal correctionnel d'Amiens du 30 octobre 2001 qu'une instance disciplinaire a été engagée à l'encontre de M. A, la décision de suspension étant intervenue seulement le 6 mars 2002 ; que le CHU n'a pas fait preuve de précipitation et que M. A a été, en 2004, rétabli dans ses droits et sa rémunération ; qu'il n'a subi aucun préjudice de carrière et a été autorisé à prolonger son activité au-delà de 60 ans ; que les préjudices allégués ne sont pas consécutifs aux fautes reprochées au CHU ; que n'est communiquée aucune pièce justifiant de l'existence des préjudices allégués et de leur imputabilité ; que M. A, qui est le seul requérant mais sollicite la réparation d'un préjudice moral pour toute sa famille , invoque des préjudices qui ne semblent pas être les siens ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 octobre 2009, présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 octobre 2009, présenté pour le Centre hospitalier d'Amiens, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A à lui payer une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, et les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. François A, masseur-kinésithérapeute exerçant au sein du centre hospitalier universitaire d'Amiens, a, par arrêté du directeur général de cet établissement du 2 novembre 2001, fait l'objet à compter du 6 novembre 2001 d'une mesure de suspension, avec maintien du traitement et ce, à la suite d'une condamnation infligée à M. A par jugement du Tribunal correctionnel d'Amiens du 30 octobre 2001, ensuite frappé d'appel ; que, par arrêté du 6 mars 2002, le directeur général du centre hospitalier universitaire d'Amiens décida de prolonger cette mesure de suspension jusqu'à ce que soit rendu l'arrêt de la Cour d'appel d'Amiens, avec retenue égale à la moitié du traitement ; que, par arrêt, qui est définitif, du 14 novembre 2003, la Cour d'appel d'Amiens a infirmé le jugement correctionnel du 30 octobre 2001 et prononcé la relaxe de M. A de tous chefs de poursuite ; que, par décision du 7 juillet 2004, le directeur général du centre hospitalier universitaire d'Amiens, après avoir décidé qu'aucune sanction disciplinaire n'est infligée à M. A, l'a réintégré dans ses fonctions à temps plein à compter du 15 novembre 2003 et décidé qu'il bénéficiera du versement de la rémunération afférente à son emploi qui avait fait l'objet d'une retenue pour la période du 6 mars 2002 au 14 novembre 2003 ; que, par jugement n° 0200887 du 5 octobre 2004, qui est définitif, le Tribunal administratif d'Amiens, statuant à la demande de M. A, a annulé la décision de suspension avec versement du demi-traitement prise le 6 mars 2002, au motif de légalité interne que son auteur avait fait une inexacte application des dispositions de l'article 30 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 ; que, par le jugement dont M. A demande la réformation, le Tribunal administratif d'Amiens, après avoir retenu en son principe la responsabilité du centre hospitalier universitaire d'Amiens à raison des fautes résidant tant dans cette décision illégale du 6 mars 2002 que dans le caractère tardif de la réintégration décidée seulement le 7 juillet 2004 alors que l'établissement avait été informé au plus tard le 24 février 2004 de la relaxe prononcée par la Cour d'appel d'Amiens, l'a condamné à verser à M. A une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi par ce dernier ;

Considérant, en premier lieu, que M. A soutient qu'il a subi des préjudices financiers résidant dans des charges et dépenses supplémentaires exposées pour pallier la privation temporaire de partie de sa rémunération, laquelle privation l'a, d'après lui, contraint à réaliser des actifs mobiliers et immobiliers et à supporter à la suite de cette réalisation des impositions sur des plus-values ; qu'il ajoute que la prolongation de la scolarité de l'un de ses enfants en Belgique pendant une année scolaire l'a contraint à supporter diverses dépenses ainsi que, pour cela, à contracter un prêt et qu'elle a constitué un trouble dans les conditions d'existence familiale ; qu'il a supporté des honoraires d'avocats et subi des troubles dans ses conditions d'existence du fait des répercussions des décisions prises par le centre hospitalier universitaire d'Amiens sur les conditions matérielles de sa vie de famille ; que, toutefois, alors que, comme le fait valoir à bon droit le défendeur, il ne produit aucun document propre à établir la réalité des préjudices financiers dont il fait état, il ne résulte pas de l'instruction que les divers préjudices ainsi allégués auraient eu pour cause directe les fautes commises en 2002 et 2004 par le centre hospitalier universitaire d'Amiens et non les poursuites pénales engagées contre l'intéressé, qui ont pour origine une plainte, assortie d'une constitution de partie civile, émanant d'un tiers mais ne sont pas le fait de cet établissement public;

Considérant, en deuxième lieu, que, si M. A établit, par les pièces qu'il produit, qu'il a supporté en 2005 un impôt sur ses revenus de l'année 2004 plus important que celui supporté en 2004 sur ses revenus de l'année 2003 et ce, en raison du versement en 2004 des demi-traitements retenus à la suite de la décision susmentionnée du 6 mars 2002, il n'établit toutefois pas, par cette seule circonstance, qu'en l'absence des fautes commises par le centre hospitalier universitaire d'Amiens, il aurait, à raison de l'ensemble de ses revenus salariaux des années 2002, 2003 et 2004, été assujetti à un impôt sur le revenu moindre que celui auquel il a été effectivement assujetti au titre des mêmes années ;

Considérant, en troisième lieu, que, si M. A demande réparation d'un préjudice moral qu'il évalue à la somme de 600 000 euros pour toute la famille , il ne saurait toutefois prétendre à réparation que pour le préjudice qu'il a personnellement subi ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en évaluant à 10 000 euros le préjudice moral causé à M. A par les fautes commises à son encontre par le centre hospitalier universitaire d'Amiens, les premiers juges se sont livrés à une juste appréciation des circonstances de l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à prétendre que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté le surplus de sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du Centre hospitalier universitaire d'Amiens, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande à ce titre M. A ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A la somme que le centre hospitalier universitaire d'Amiens demande au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire d'Amiens tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. François A et au centre hospitalier universitaire d'Amiens.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 09DA00281
Date de la décision : 10/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Appeche-Otani
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : RACLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-02-10;09da00281 ?
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