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17/02/2011 | FRANCE | N°10DA01318

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 17 février 2011, 10DA01318


Vu, I, sous le n° 10DA01318, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 22 octobre 2010 et régularisée par la production de l'original le 27 octobre 2010, présentée pour M. Wajdi A, demeurant ..., par la SCP Conil, Ropers, Gourlain-Parenty, Rogowski ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001678 du 23 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 17 mai 2010, par laquelle le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la d

livrance d'un titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation ...

Vu, I, sous le n° 10DA01318, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 22 octobre 2010 et régularisée par la production de l'original le 27 octobre 2010, présentée pour M. Wajdi A, demeurant ..., par la SCP Conil, Ropers, Gourlain-Parenty, Rogowski ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001678 du 23 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 17 mai 2010, par laquelle le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de résident de 10 ans dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt de la Cour, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt de la Cour, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) à titre infiniment plus subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt de la Cour, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d'un délai de 10 jours suivant la notification de l'arrêt de la Cour ; de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au profit de la SCP Conil, Ropers, Gourlain-Parenty, Rogowski, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l'Etat ;

M. A soutient que le préfet était tenu, au préalable, de saisir la commission du titre de séjour conformément aux dispositions de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il remplit les conditions prévues par les stipulations de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, modifié, pour se voir délivrer une carte de résident de 10 ans, compte tenu de sa qualité de père d'un enfant français ; qu'il peut également se voir délivrer une carte de séjour provisoire portant la mention vie privée et familiale sur la base des stipulations de l'article 7 du même accord et des dispositions de l'article L. 313-11-6° du code précité, toujours en raison de sa paternité ; que c'est à tort que le Tribunal administratif de Rouen a considéré que l'intéressé constituait une menace à l'ordre public, sa condamnation étant liée à sa rétention administrative, et qu'il n'a pas fait l'objet de poursuites pour les faits de violences qui lui sont reprochés à l'encontre de sa conjointe ; qu'en raison de la combinaison des stipulations de l'article 7 de l'accord précité et de l'article L. 313-11-7° du même code, l'intéressé a également un droit au séjour en raison de l'intensité de ses liens familiaux et amicaux en France ; qu'en outre, l'atteinte portée à sa vie privée en familiale viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée, par la voie de l'exception d'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que cette même décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'intéressé n'a plus d'attaches dans son pays d'origine ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu l'ordonnance du 8 novembre 2010 portant clôture de l'instruction au 4 janvier 2011 ;

Vu la décision du 22 novembre 2010 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai admettant M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 3 janvier 2011 et confirmé par la production de l'original le 6 janvier 2011, présenté par le préfet de la Seine-Maritime, qui conclut au rejet de la requête ; le préfet soutient qu'il n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre sa décision ; que le requérant ne pouvait se voir délivrer une carte de résident selon les termes de l'article 10 de l'accord franco-tunisien dés lors qu'il séjournait irrégulièrement sur le territoire français ; que la réalité de la vie commune n'est pas établie, ni que l'intéressé contribue à l'entretien et à l'éducation de son enfant ; qu'au demeurant, M. A ne peut prétendre à un titre de séjour en tant que parent d'enfant français, ni au titre du respect de sa vie privée et familiale, en raison de la menace qu'il fait peser sur l'ordre public ;

Vu l'ordonnance du 6 janvier 2011 prononçant la réouverture de l'instruction ;

Vu, II, sous le n° 10DA01511, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 29 novembre 2010 et régularisée par la production de l'original le 30 novembre 2010, présentée pour M. Wajdi A, demeurant ..., par la SCP Conil, Ropers, Gourlain-Parenty, Rogowski ; M. A demande à la Cour d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement n° 1001678 du 23 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 17 mai 2010, par laquelle le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

M. A soutient qu'il y a urgence à suspendre le jugement attaqué en raison des conséquences difficilement réparables sur sa vie privée et familiale qu'entraînerait un retour dans son pays d'origine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 1er décembre 2010 portant clôture de l'instruction au 4 janvier 2011 ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 4 janvier 2011 et confirmé par la production de l'original le 6 janvier 2011, présenté par le préfet de la Seine-Maritime, qui conclut au rejet de la requête ; le préfet soutient que le requérant n'est plus maintenu dans un centre de rétention administrative ; que, dès lors, la condition d'urgence n'existe plus ;

Vu l'ordonnance du 6 janvier 2011 prononçant la réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988, modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller, les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que les requêtes nos 10DA01318 et 10DA01511 présentées pour M. A tendent au sursis à l'exécution et à l'annulation du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête n° 10DA01318 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : (...) Les ressortissants tunisiens bénéficient dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ;

Considérant que M. A, ressortissant tunisien, né en 1987 et déclarant être entré sur le territoire français en janvier 2007, relève appel du jugement 23 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 17 mai 2010, par laquelle le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des attestations concordantes et circonstanciées produites, que le requérant vit avec une ressortissante française depuis le mois de janvier 2008 et a eu un enfant le 11 janvier 2009 ; qu'il est constant que le couple vit désormais dans un logement autonome depuis le mois d'avril 2009 ; que, si M. A ne dispose d'aucune ressource propre, il vit au côté de sa compagne et de leur enfant depuis la naissance de celui-ci ; que, nonobstant la situation familiale précaire du couple, il ressort des pièces produites, et notamment de l'ordonnance d'action éducative en milieu ouvert prononcée par le juge des enfants du Tribunal de grande instance de Rouen, en date du 15 mai 2009, et du jugement de renouvellement de cette action, en date du 30 novembre 2009, que le requérant contribue à l'éducation de son enfant et que sa présence aux côtés de sa compagne est nécessaire pour que soit garanti le bon développement de leur fils ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 17 mai 2010, du préfet de la Seine-Maritime lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que, par voie de conséquence, les décisions d'obligation de quitter le territoire français et de fixation du pays de destination sont annulées ;

Sur la requête n° 10DA01511 :

Considérant que la présente décision statue sur la requête n° 10DA01318 de M. A tendant à l'annulation du jugement dont il est demandé le sursis à exécution ; que, dès lors, la requête à fin de sursis à exécution du jugement est devenue sans objet ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; que le présent arrêt annule le jugement rejetant le recours pour excès de pouvoir contre la décision par laquelle le préfet de la Seine-Maritime a rejeté la demande présentée par M. A pour se voir délivrer un titre de séjour ; qu'ainsi, l'autorité de la chose jugée qui s'attache à ses motifs implique, au sens des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative précité, la délivrance d'une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale ; qu'il y a lieu, dès lors, de prescrire au préfet de la Seine-Maritime de délivrer ledit titre à M. A dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Conil, Ropers, Gourlain-Parenty, Rogowski, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat, pour le compte de la SCP Conil, Ropers, Gourlain-Parenty, Rogowski une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A tendant au sursis à l'exécution du jugement.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Rouen du 23 septembre 2010 et la décision du préfet de la Seine-Maritime du 17 mai 2010 sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Maritime de délivrer à M. A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à la SCP Conil, Ropers, Gourlain-Parenty, Rogowski la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi n° 91-64 du 10 juillet 1991, sous réserve que ledit avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Wajdi A, au préfet de la Seine-Maritime et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10DA01318
Date de la décision : 17/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Mulsant
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guyau
Rapporteur public ?: M. Larue
Avocat(s) : SELARL CONIL - ROPERS - GOURLAIN-PARENTY - ROGOWSKI ; SELARL CONIL - ROPERS - GOURLAIN-PARENTY - ROGOWSKI ; SELARL CONIL - ROPERS - GOURLAIN-PARENTY - ROGOWSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-02-17;10da01318 ?
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