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08/03/2011 | FRANCE | N°10DA01269

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 08 mars 2011, 10DA01269


Vu la requête, enregistrée le 8 octobre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DU NORD ; le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003577 du 22 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille, à la demande de Mme Yamina A, d'une part, a annulé l'arrêté du 18 mai 2010 qui refusait à cette dernière la délivrance d'un titre de séjour, lui faisait obligation de quitter le territoire français et fixait le pays de destination, d'autre part, lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séj

our à Mme A et de réexaminer sa situation dans un délai de 30 jours à co...

Vu la requête, enregistrée le 8 octobre 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DU NORD ; le préfet demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003577 du 22 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille, à la demande de Mme Yamina A, d'une part, a annulé l'arrêté du 18 mai 2010 qui refusait à cette dernière la délivrance d'un titre de séjour, lui faisait obligation de quitter le territoire français et fixait le pays de destination, d'autre part, lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme A et de réexaminer sa situation dans un délai de 30 jours à compter de la notification dudit jugement, enfin, l'a condamné à verser à Mme A la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de Mme A présentée en première instance ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, modifiée, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que, pour annuler, par le jugement attaqué en date du 22 septembre 2010, l'arrêté du 18 mai 2010 du PREFET DU NORD portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination à l'encontre de Mme A, ressortissante algérienne, le Tribunal administratif de Lille a jugé, compte tenu de la présence en France de sa mère et de trois soeurs de nationalité française ainsi que d'un frère titulaire d'une carte de résident, et eu égard à l'absence non contredite d'attaches familiales dans son pays, que ledit arrêté avait méconnu les stipulations de l'article 6-5) de l'accord franco-algérien ; que le PREFET DU NORD forme appel de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A se borne à invoquer la présence de sa mère, de ses trois soeurs et d'un frère en France mais n'établit pas la réalité des liens forts qu'elle prétend entretenir avec eux ; que, depuis de nombreuses années, Mme A est séparée de ces derniers, lesquels résident, au demeurant, à Paris ou en région parisienne ; que, par ailleurs, si Mme A soutient qu'elle n'a quasiment plus d'attaches familiales en Algérie, du fait du décès de son père en 1986 et de son premier époux en 1997, il est constant qu'elle a attendu cinq années après le divorce d'avec son second époux en 2003 avant de venir en France munie d'un visa d'une durée de trente jours ; que, si l'intéressée, née en 1971, âgée de 38 ans à la date de la décision attaquée, se prévaut d'avoir vécu en France pendant cinq années entre 1973 et 1978, cette durée est peu significative eu égard au temps passé en Algérie, où elle ne conteste pas avoir vécu ensuite de façon continue jusqu'à l'âge de 37 ans et où sont nés ses enfants, âgés de 9 et 16 ans ; que ses enfants sont arrivés en France en même temps qu'elle et ne sont scolarisés que depuis un an ; que le jugement de divorce par consentement mutuel du Tribunal de Tlemcem du 21 décembre 2003 précise que le père de ses deux fils dispose d'un droit de visite les jeudis et vendredis, ainsi que pendant les fêtes nationales religieuses de dix à seize heures ; que, dans ces conditions, rien ne fait obstacle à ce que Mme A reconstitue sa cellule familiale, composée de ses trois enfants, dans son pays d'origine ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, malgré la présence en France de la mère, de trois soeurs et d'un frère de Mme A et eu égard à son entrée récente en France, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, le PREFET DU NORD n'a pas, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal administratif de Lille, méconnu les stipulations précitées de l'article 6-5) de l'accord franco-algérien ;

Considérant qu'il appartient toutefois au juge d'appel, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme A tant devant le Tribunal administratif de Lille que devant la Cour ;

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 24 février 2010 publié le même jour au recueil n° 9 des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Nord a donné à M. Yves B, directeur de l'immigration et de l'intégration, délégation pour signer les décisions relevant de ses attributions et, notamment, les décisions portant refus de séjour, portant obligation de quitter le territoire et fixation du pays de renvoi ; que, par cette délégation, M. Yves B était compétent pour prendre la décision attaquée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : (...) Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ; que la décision de refus de séjour, qui vise notamment l'accord franco-algérien, modifié, du 27 décembre 1968, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles L. 511-1-I, L. 511-4 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui relate les conditions d'entrée en France de Mme A et de ses enfants, qui fait état de ses deux mariages, de son divorce, de la présence en France de sa mère et de ses frère et soeurs et qui indique qu'il n'est pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée et que les stipulations des articles 6-5) de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas méconnues, comporte l'ensemble des considérations de droit et de faits sur lesquelles elle se fonde ; que, dès lors, Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de séjour est intervenue en méconnaissance des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 : Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision de refus de séjour attaquée est revêtue de la signature de son auteur, dont le prénom, le nom et la qualité sont indiqués ; que, dans ces conditions, Mme A n'est pas fondée à soutenir que ladite décision de refus de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 précitée ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, régit de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés ; que, dès lors, Mme A ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de séjour ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment, eu égard à l'entrée récente en France de Mme A accompagnée de ses trois enfants et à la possibilité qu'a l'intéressée de reconstituer sa cellule familiale en Algérie où elle a vécu la majeure partie de son existence et où réside le père des enfants Youssef et Yassine, que la décision lui refusant le séjour et portant obligation de quitter le territoire n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui précède, nonobstant la présence en France de la mère, de trois soeurs et d'un frère de Mme A, qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire, le PREFET DU NORD n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de Mme A ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des motifs qui précèdent que Mme A n'est pas fondée à invoquer l'illégalité de la décision de refus de séjour à l'appui de ses conclusions à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, ni l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU NORD est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 18 mai 2010 refusant le séjour à Mme A, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination, lui a enjoint de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans un délai de 30 jours à compter de la notification dudit jugement et enfin, l'a condamné à verser à Mme A la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par ailleurs, la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Lille et les conclusions aux fins d'injonction assortie d'astreinte que l'intéressée présente en appel doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme A doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1003577 du Tribunal administratif de Lille, en date du 22 septembre 2010, est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à Mme Yamina A.

Copie sera transmise au PREFET DE LA REGION NORD/PAS-DE-CALAIS, PREFET DU NORD.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10DA01269
Date de la décision : 08/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Michel (AC) Durand
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : MSA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-03-08;10da01269 ?
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