La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/03/2011 | FRANCE | N°10DA00771

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 17 mars 2011, 10DA00771


Vu la requête, enregistrée le 28 juin 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000718 du 27 mai 2010 du Tribunal administratif de Rouen en tant qu'il annule la décision fixant le pays de renvoi, en date du 5 février 2010, prise à l'encontre de M. Victor Osayande A ;

2°) de rejeter la demande de M. A présentée devant le tribunal administratif ;

------------------------------------------------------------------------------------------------------

------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauv...

Vu la requête, enregistrée le 28 juin 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000718 du 27 mai 2010 du Tribunal administratif de Rouen en tant qu'il annule la décision fixant le pays de renvoi, en date du 5 février 2010, prise à l'encontre de M. Victor Osayande A ;

2°) de rejeter la demande de M. A présentée devant le tribunal administratif ;

------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bertrand Boutou, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME relève appel du jugement du 27 mai 2010 en tant que le Tribunal administratif de Rouen, à la demande M. A, a annulé sa décision, en date du 5 février 2010, fixant le Nigeria comme pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que ce dernier texte énonce que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ; que, pour démontrer l'existence des poursuites dont il allègue faire l'objet au Nigeria, du fait de sa relation avec une compatriote mariée de confession musulmane, M. A produit de nombreuses pièces, notamment des copies d'articles de presse ainsi que trois courriers de la Cour de la sharia ; que, toutefois, ces documents ne présentent pas de garanties d'authenticité suffisantes et ne permettent pas d'établir la réalité des risques de persécution dont fait état M. A ; que sa demande d'admission au statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 7 mai 2007, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 20 février 2009 ; que, dès lors, le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision fixant le Nigeria comme pays de renvoi de M. A, comme contraire aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation (...) ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du même code : L'étranger qui est obligé d e quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité (...) ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Considérant que la décision par laquelle le préfet fixe le pays de destination vers lequel sera reconduit l'étranger s'il ne satisfait pas à l'obligation de quitter le territoire français constitue une mesure de police qui doit, en principe, être motivée en fait comme en droit en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant, d'une part, que si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 susrappelés, lequel est du reste mentionné dans la décision attaquée ; que le législateur ayant décidé par l'article 41 de la loi du 20 novembre 2007 de dispenser l'administration de viser la disposition législative qui fonde l'obligation de quitter le territoire, cette dispense s'attache, dans la même mesure, à la décision fixant le pays de destination, fondée sur la même disposition législative ; qu'ainsi, le requérant n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée en droit, les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ayant pas, quant à elles, à être visées dès lors qu'elles ne s'attachent qu'aux modalités d'exécution de la mesure ;

Considérant, d'autre part, que la décision attaquée énonce que M. A est un ressortissant nigérian ; qu'elle mentionne également en ces termes qu'il ressort des décisions rendues par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile et de l'examen de l'ensemble des éléments contenus dans son dossier que sa situation ne contrevient pas aux dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'il n'est pas établi qu'il peut être soumis à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, la décision est suffisamment motivée en fait ;

Considérant que si M. A soutient que le préfet s'est borné à viser les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile et n'a pas exercé sa compétence, il ressort, au contraire, des termes précités de l'arrêté que l'autorité administrative a pris en compte les éléments du dossier de l'intéressé ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu l'étendue de sa compétence ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Rouen a annulé la décision fixant le pays de renvoi de M. A ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que l'article L. 761-1 du code de justice administrative dispose que : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; qu'aux termes de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 : Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre (...) ;

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Rouen, en date du 27 mai 2010, est annulé en tant qu'il annule la décision du PREFET DE LA SEINE-MARITIME du 5 février 2010 fixant le pays de renvoi.

Article 2 : Les conclusions de la demande de première instance présentées par M. A, dirigées contre la décision fixant le pays de destination, devant le Tribunal administratif de Rouen sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant à la condamnation de l'Etat à verser à son conseil une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à M. Victor Osayande A.

Copie sera adressée au PREFET DE LA SEINE-MARITIME.

''

''

''

''

N°10DA00771 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10DA00771
Date de la décision : 17/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme Appeche-Otani
Rapporteur ?: M. Bertrand Boutou
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : CHARRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-03-17;10da00771 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award