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07/06/2011 | FRANCE | N°11DA00053

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 07 juin 2011, 11DA00053


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 13 janvier 2011, présentée par le PREFET DU PAS-DE-CALAIS ; le PREFET DU

PAS-DE-CALAIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005417 du 1er décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille, suite à une demande de Mme Laïla A née B, d'une part, a annulé son arrêté, en date du 12 janvier 2010, par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme A, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle était susce

ptible d'être reconduite, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à Mme A un titre ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 13 janvier 2011, présentée par le PREFET DU PAS-DE-CALAIS ; le PREFET DU

PAS-DE-CALAIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005417 du 1er décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille, suite à une demande de Mme Laïla A née B, d'une part, a annulé son arrêté, en date du 12 janvier 2010, par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme A, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle était susceptible d'être reconduite, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à Mme A un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale , dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à Me Thiéffry au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

2°) de confirmer son arrêté, en date du 12 janvier 2010 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le gouvernement de la République Française et le gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Daniel Mortelecq, président de chambre, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Considérant que Mme A, ressortissante marocaine née le 16 juin 1963, est entrée, selon ses dires, le 17 juillet 2005 sur le territoire français via l'Espagne, sous couvert d'un visa de court séjour tourisme d'une durée de 30 jours délivré par les autorités consulaires grecques à Casablanca ; que, le 23 juillet 2009, Mme A a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire vie privée et familiale ; que, par un arrêté, en date du 12 janvier 2010, le PREFET DU PAS-DE-CALAIS lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle était susceptible d'être reconduite ; que le PREFET DU PAS-DE-CALAIS relève appel du jugement du 1er décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille, d'une part, a annulé son arrêté en date du 12 janvier 2010, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à Mme A un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale , dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, enfin, a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à Me Thiéffry, au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant que Mme A déclare être entrée en France, le 17 juillet 2005, avec ses trois fils nés au Maroc, respectivement en novembre 1996, septembre 1997 et décembre 2001, sous couvert d'un visa de court séjour tourisme afin, selon ses dires, de rejoindre son époux, également de nationalité marocaine, qui avait le projet de créer une entreprise en France ; qu'elle soutient avoir été abandonnée par son époux en novembre 2005, après avoir subi des violences conjugales et, depuis lors, avoir élevé seule ses trois enfants ; qu'elle soutient également être isolée dans son pays d'origine compte tenu du décès de son père, du départ de sa mère et de ses frères et soeurs pour l'Italie et de l'opposition d'une partie de sa famille à son mariage ; qu'elle n'a aucune certitude quant à la présence de son époux au Maroc ; que, si les éléments de ce récit ne sont corroborés par aucune pièce probante, il ressort néanmoins des pièces du dossier et il n'est pas sérieusement contesté, que Mme A, âgée de 46 ans, vit seule avec ses trois enfants en France depuis plus de quatre ans ; qu'elle est sans nouvelles de son mari et qu'elle l'a par ailleurs fait rechercher, sans succès, par un huissier de justice, assermenté auprès du Tribunal de première instance d'Oued Zem, en 2008 ; que Mme A et ses enfants sont parfaitement bien intégrés en France, et tout particulièrement dans la commune de Billy-Montigny où ils résident depuis leur arrivée ; que Mme A est appréciée pour ses qualités personnelles comme l'attestent notamment de nombreux témoignages d'amis, voisins, parents d'élèves, enseignants, directeurs d'établissements scolaires et élus, ainsi qu'une pétition ayant recueilli plus de mille deux cents signatures ; que de multiples documents font état de la disponibilité et du dévouement de Mme A dans ses relations de voisinage, dans la vie associative locale et auprès d'instances de soins, ainsi que de son implication effective dans la vie et les institutions scolaires, Mme A étant membre d'une association de parents d'élèves, représentante des parents d'élèves et membre élu au conseil d'administration du collège de Billy-Montigny ; qu'elle bénéficie du soutien familial et financier de plusieurs de ses cousins et tantes vivant en France ; qu'il est constant que les trois enfants de Mme A, âgés à la date de la décision attaquée de 13, 12 et 8 ans, sont intégrés à la vie locale ; qu'ils poursuivent avec assiduité leur scolarité en France depuis leur arrivée et pratiquent, tous, avec régularité et sérieux, diverses activités sportives ou culturelles dans les associations ou clubs locaux ; que, s'il est vrai que Mme A s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français pendant plusieurs années sans se manifester auprès des services préfectoraux, il ne ressort pas des pièces du dossier, ainsi que l'ont à juste titre relevé les premiers juges, qu'elle aurait cherché à vivre dans la clandestinité, que son comportement aurait été dicté par la volonté délibérée de méconnaître les dispositions légales relatives au séjour des étrangers en France ou de placer les autorités françaises devant un fait accompli ; que, par suite, nonobstant les conditions d'entrée de Mme A sur le territoire français, c'est à bon droit, eu égard aux circonstances particulières de l'espèce, que les premiers juges ont annulé l'arrêté du 12 janvier 2010 du PREFET DU PAS-DE-CALAIS comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme A et de ses trois enfants mineurs ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU PAS-DE-CALAIS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé, à la demande de Mme A, son arrêté en date du 12 janvier 2010 ;

Sur l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 : Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. / En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide (...) ;

Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Thiéffry, avocat de Mme A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner l'Etat à verser à Me Thiéffry la somme de 1 500 euros, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DU PAS-DE-CALAIS est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Thiéffry la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à Mme Laïla A née B.

Copie sera transmise au PREFET DU PAS-DE-CALAIS.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 11DA00053
Date de la décision : 07/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Daniel Mortelecq
Rapporteur public ?: M. Minne
Avocat(s) : THIEFFRY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-06-07;11da00053 ?
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