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08/11/2011 | FRANCE | N°11DA00290

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 08 novembre 2011, 11DA00290


Vu la requête, enregistrée le 22 février 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Maurice A, demeurant ..., par la SCP Van Maris, Duponchelle, Missiaen, avocats ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800014 du 16 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Valéry-sur-Somme à leur verser une indemnité de 48 000 euros en réparation du préjudice constitué par les difficultés d'accès à leur immeuble ainsi qu'une somm

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Vu la requête, enregistrée le 22 février 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Maurice A, demeurant ..., par la SCP Van Maris, Duponchelle, Missiaen, avocats ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800014 du 16 décembre 2010 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Valéry-sur-Somme à leur verser une indemnité de 48 000 euros en réparation du préjudice constitué par les difficultés d'accès à leur immeuble ainsi qu'une somme de 100 000 euros au titre de la dépréciation de la valeur vénale de cet immeuble et, à titre subsidiaire, de désigner un expert pour déterminer la perte de la valeur vénale de leur immeuble et de surseoir à statuer sur ce chef de leur demande ;

2°) de condamner la commune de Saint-Valéry-sur-Somme à leur verser la somme de 48 000 euros, soit 1 000 euros par mois, en réparation de leur préjudice du fait de la gêne dans l'accès de leur immeuble et la somme de 100 000 euros au titre de la dépréciation de la valeur vénale de cet immeuble ;

3°) à titre subsidiaire, de désigner un expert pour déterminer la perte de la valeur vénale de leur immeuble et de surseoir à statuer sur ce chef de leur demande ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la voirie routière ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur, les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public et, les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Van Maris pour M. et Mme A ;

Considérant que M. et Mme A, propriétaires d'une maison et d'un terrain situés de part et d'autre de la rue du Beffroi, en haut d'une falaise morte à Saint-Valéry-sur-Somme, demandent réparation du préjudice qu'ils subissent du fait, d'une part, de l'impossibilité d'accéder en véhicule à leur maison et, d'autre part, de la perte de valeur vénale de celle-ci, consécutif à l'interdiction de circuler dans ladite rue, édictée par l'arrêté municipal du 29 janvier 2001 ; que M. et Mme A relèvent appel du jugement, en date du 16 décembre 2010, du Tribunal administratif d'Amiens qui a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions aux fins de condamnation de la commune de Saint-Valéry-sur-Somme :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) 5º Le soin de prévenir, par des précautions convenables, (...) les accidents et les fléaux calamiteux (...) tels que (...) les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels, (...) de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 2212-4 du même code : En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels prévus au 5º de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances. ;

Considérant que, suite au descellement de l'accotement, constitué d'une bande de béton, de la rue du Beffroi, le maire de Saint-Valéry-sur-Somme a, plutôt que de conforter la chaussée, fait le choix, comme il en avait la possibilité, d'en interdire l'accès, par arrêté du 29 janvier 2001, afin d'éviter un accident et de prévenir un effondrement plus important de la falaise située en contrebas ; que des barrières ont également été posées afin de délimiter la zone présentant un danger ; qu'il résulte de l'instruction que ces mesures ne présentent pas de caractère disproportionné par rapport au danger généré par l'état des lieux ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le maire a commis une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police ;

Considérant, en second lieu, que l'aménagement de la rue du Beffroi, qui a suivi l'arrêté municipal susmentionné du 29 janvier 2001, interdit la circulation des véhicules automobiles dans cette rue ; qu'il a, dès lors, pour effet de limiter les conditions d'accès de M. et Mme A à leur habitation ; que, par suite, ces derniers ne peuvent accéder, avec ce type de véhicule, à leur propriété, alors qu'ils en avaient auparavant la possibilité ; qu'il résulte de l'instruction, que, si les requérants disposent d'un autre accès, celui-ci est uniquement destiné aux piétons ; que l'accès par la rue de Braqueval, laquelle comporte des escaliers, n'est pas davantage utilisable par un véhicule automobile ; que, par suite, M. et Mme A subissent, dans les circonstances de l'espèce, un préjudice qui présente un caractère anormal et spécial et dépasse les charges que le propriétaire d'un bien immobilier doit supporter ; que les désordres constatés ne sauraient être regardés, contrairement à ce que soutient la commune de Saint-Valéry-sur-Somme, comme constituant un cas de force majeure de nature à l'exonérer de sa responsabilité ;

Considérant que M. et Mme A invoquent, d'une part, un chef de préjudice constitué par une gêne dans l'accès à leur habitation ; que, toutefois, cette gène n'est qu'occasionnelle, s'agissant d'une résidence secondaire ; que, par suite, il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en le fixant à la somme de 1 000 euros ; que, d'autre part, ils invoquent un chef de préjudice constitué par une perte de valeur vénale de leur habitation ; qu'ils produisent une attestation notariale valorisant à 18 000 euros la présence d'un garage dans le secteur de la rue du Beffroi ; que, la seule circonstance que les intéressés ne justifient, ni ne soutiennent, avoir l'intention d'aliéner leur bien, ne s'oppose pas à ce qu'ils soient indemnisés d'une perte de valeur vénale de leur immeuble ; qu'il résulte de l'instruction que la suppression de l'accès à leur habitation en véhicule automobile présente un caractère durable et est de nature à en diminuer la valeur ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en le fixant à la somme de 10 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande et à demander la condamnation de la commune de Saint-Valéry-sur-Somme à les indemniser à hauteur de 11 000 euros ;

Sur les conclusions de la commune de Saint-Valéry-sur-Somme tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la commune de Saint-Valéry-sur-Somme doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La commune de Saint-Valéry-sur-Somme est condamnée à verser à M. et Mme A une somme de 11 000 euros.

Article 2 : Le jugement n° 0800014 du 16 décembre 2010 du Tribunal administratif d'Amiens est annulé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Saint-Valéry-sur-Somme tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Maurice A et à la commune de Saint-Valéry-sur-Somme.

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N°11DA00290


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 11DA00290
Date de la décision : 08/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-01-05-01 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Préjudice. Caractère spécial et anormal du préjudice. Préjudice présentant ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Michel (AC) Durand
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SCP VAN MARIS - DUPONCHELLE - MISSIAEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-11-08;11da00290 ?
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