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31/01/2012 | FRANCE | N°10DA00804

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 31 janvier 2012, 10DA00804


Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Dominique A, demeurant ..., par la SELARL Juridicia, société d'avocats ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703248 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2002 ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge demandée ou, à titre subsidiaire, la réduction

de l'imposition en litige ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500...

Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Dominique A, demeurant ..., par la SELARL Juridicia, société d'avocats ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703248 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2002 ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge demandée ou, à titre subsidiaire, la réduction de l'imposition en litige ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public ;

Sur les conclusions tendant à la décharge de l'imposition supplémentaire contestée :

Au regard de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 du code général des impôts : L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. ; qu'aux termes de l'article 34 du même code : Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale (...) ; qu'aux termes de l'article 38 dudit code : 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A a été victime, le 18 novembre 1998, d'un accident de la circulation ; que les dommages corporels qu'il a subis l'ont conduit à devoir abandonner son activité d'artisan-boulanger à compter du 10 février 1999 ; que, par jugement du 22 février 2002, le Tribunal de grande instance de Rouen a condamné la société Les Mutuelles Régionales d'Assurances à lui verser, en sus de divers dommages et intérêts en réparation de préjudices extra-patrimoniaux et d'une incapacité permanente partielle, une somme de 57 580 euros au titre de l'incapacité temporaire totale et une somme de 290 000 euros au titre du préjudice professionnel résultant de l'accident en cause ; qu'en vertu de ce jugement, qui contenait un dispositif d'exécution provisoire à raison de la moitié de l'indemnité d'assurance totale allouée, M. A a perçu le 10 juin 2002 une somme de 115 653 euros que l'administration fiscale, à l'issue d'un examen de situation fiscale personnelle, a soumis, à concurrence de 97 148 euros, à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;

Considérant qu'il résulte du jugement du tribunal de grande instance mentionné ci-dessus que l'indemnisation allouée au titre de l'incapacité temporaire totale, qui a été calculée au vu des résultats comptables des douze mois précédant l'accident et a pris en compte la constance du chiffre d'affaires de l'entreprise de boulangerie depuis les exercices encore précédents, a pour unique objet de compenser la perte de revenus subie par M. A, de la date de l'accident jusqu'à la consolidation de son état de santé ; qu'il résulte du même jugement que la somme allouée au titre du préjudice professionnel, qui a d'ailleurs également été calculée suivant une formule comprenant une perte de revenus mensuels affectés d'un taux d'incapacité et a fait l'objet d'une évaluation distincte de l'incapacité permanente partielle, a pour unique objet de compenser la perte de revenus professionnels consécutive à l'accident subi par M. A à compter de la consolidation de son état de santé ; qu'en dépit de leur caractère forfaitaire et global, les sommes en litige présentent donc la nature d'indemnités n'ayant pas d'autre objet que de réparer un préjudice résultant d'une perte de revenus professionnels ; que la circonstance que le contrat d'assurance fondant les droits de M. A a été souscrit à titre personnel en vue de garantir la survenue de risques non professionnels, et non pas dans le cadre de l'entreprise de boulangerie qu'il exploitait alors, est sans incidence sur le caractère imposable, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des montants versés par son assureur dès lors que la garantie donnée par ce dernier avait pour objet de compenser la perte de revenus réalisés par le contribuable dans le cadre de son activité habituelle ; que, pour le même motif, la circonstance que le risque s'est réalisé à l'occasion d'un déplacement personnel, et non professionnel, ne retire pas aux indemnités en litige leur caractère de sommes imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; qu'enfin, la circonstance que les primes d'assurance acquittées par le requérant n'ont pas été portées en déduction des résultats de son entreprise de boulangerie, et ne pouvaient l'être en raison du caractère personnel et non professionnel du contrat d'assurance souscrit, n'a pas davantage d'incidence sur le caractère imposable des produits en litige au sens de la loi fiscale ;

Au regard de la doctrine administrative :

Considérant que M. A se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle à M. Fosset, sénateur, publiée au Journal officiel du 3 février 1983 sous le n° 9313 et reprise dans l'instruction n° 4 C-4-83 publiée le 5 juillet 1983 au bulletin officiel de la direction générale des impôts ; que cette réponse, applicable aux entreprises individuelles dont les recettes sont imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, énonce notamment que, s'agissant des contrats d'assurances souscrits volontairement en vue de se protéger en cas d'arrêt de travail pour cause de maladie ou d'accident non spécifiquement professionnels, par des exploitants individuels déjà couverts par un régime obligatoire, et leur assurant, en sus de celui-ci, des prestations supplémentaires, les primes correspondantes ne sont pas déductibles du résultat imposable de l'entreprise dès lors qu'il s'agit de charges d'ordre personnel destinées à garantir un revenu indépendant de l'activité non salariée, quelles que soient les modalités de calcul ou de versement des prestations ; que cette réponse ministérielle énonce, en outre, que toutefois, il a été décidé que, en contrepartie de la non-déduction des cotisations ou primes, les indemnités reçues en cas de maladie ou d'accident en exécution d'un contrat d'assurance volontaire ne seront plus imposables ;

Considérant, en l'espèce, qu'il est constant que M. A a souscrit volontairement un contrat avec la société Les Mutuelles Régionales d'Assurances lui offrant la garantie de percevoir une indemnité lui assurant des prestations supplémentaires à celles versées par le régime des artisans et commerçants auquel il était affilié ; qu'il n'est pas contesté que les primes versées à son assureur, dès lors qu'elles étaient relatives à une assurance de protection individuelle de conducteur de véhicule automobile, étaient des charges d'ordre personnel non déductibles ; que, par suite, M. A, qui entre dans les prévisions de la doctrine qu'il invoque, est fondé à soutenir que les indemnités versées en exécution de ce contrat d'assurance ne sont pas imposables ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2002 et, par suite, à demander la décharge de cette imposition supplémentaire ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0703248 du 11 mai 2010 du Tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : M. A est déchargé de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2002.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de M. A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Dominique A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.

Copie sera adressée au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.

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N°10DA00804


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Opposabilité des interprétations administratives (art - L - 80 A du livre des procédures fiscales).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Patrick Minne
Rapporteur public ?: M. Larue
Avocat(s) : SELARL JURIDICIA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Date de la décision : 31/01/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10DA00804
Numéro NOR : CETATEXT000025284379 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-01-31;10da00804 ?
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