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29/03/2012 | FRANCE | N°11DA01633

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 29 mars 2012, 11DA01633


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 21 octobre 2011 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 28 octobre 2011, présentée pour M. Djalal A, demeurant ..., par Me G. Malenge, avocat ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103470 du 21 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 mai 2011 du préfet du Pas-de-Calais rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter

le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourra...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 21 octobre 2011 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 28 octobre 2011, présentée pour M. Djalal A, demeurant ..., par Me G. Malenge, avocat ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103470 du 21 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 mai 2011 du préfet du Pas-de-Calais rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à Me G. Malenge dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Edouard Nowak, président de chambre ;

Considérant que M. A, ressortissant algérien, relève appel du jugement en date du 21 septembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais en date du 16 mai 2011 rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, qui a indiqué être célibataire, a demandé aux autorités consulaires françaises à Oran la délivrance d'un visa d'une durée de trente jours afin de rendre visite à une amie en France ; qu'il s'est également prévalu de cette qualité de célibataire lors du dépôt, le 4 février 2011, de sa demande de certificat de résidence portant la mention " visiteur " auprès des services préfectoraux ; que, par suite, en mentionnant que l'intéressé, qui avait produit, postérieurement à cette demande de titre de séjour, une attestation de vie maritale avec une ressortissante française, au demeurant non datée, n'avait à aucun moment fait part de son souhait de résider durablement en France ou de faire une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", le préfet du Pas-de-Calais, dont il ne ressort pas de l'arrêté qu'il ne se serait pas livré à un examen de la situation de M. A, n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A aurait saisi le préfet du Pas-de-Calais d'une demande de titre de séjour au titre de la vie privée et familiale, sur le fondement de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à invoquer le bénéfice de ces stipulations au seul motif qu'il aurait produit une attestation de vie maritale avec une ressortissante française postérieurement à sa demande de titre de séjour ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A fait valoir qu'il a épousé le 7 juin 2011 une ressortissante française avec laquelle il vivait maritalement depuis le 27 février 2011 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé avait déclaré, ainsi qu'il vient d'être dit, être célibataire lors du dépôt de sa demande de titre de séjour ; que son arrivée en France est récente ; qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans ; que son mariage est postérieur à la décision attaquée ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, la décision du préfet du Pas-de-Calais refusant de délivrer à l'intéressé un certificat de résidence algérien portant la mention " visiteur " n'a ni porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, ni n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance du titre de séjour doit être écarté ;

En ce qui concerne le défaut de motivation :

Considérant, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée : " Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ; qu'aux termes de la dernière phrase du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction à la date de l'arrêté en litige : " L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation " ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / (...) / - refusent une autorisation (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

Considérant, d'une part, que les dispositions précitées de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 sont précises et inconditionnelles ; que, par suite, le délai de transposition de ladite directive ayant expiré le 24 décembre 2010, elles sont d'effet direct ; que les dispositions précitées de la dernière phrase du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont incompatibles avec celles précitées du 1 de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 et, qu'en conséquence, ces dispositions législatives doivent demeurer inappliquées ; que, toutefois, trouvent, dès lors, à s'appliquer les dispositions précitées des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979, qui imposent la motivation des décisions refusant la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, ou retirant un tel titre, mais également de celles faisant obligation de quitter le territoire français, lesquelles constituent des mesures de police ; que les dispositions de la loi du 11 juillet 1979, en ce qu'elles s'appliquent à une telle obligation, sont propres à assurer la transposition du paragraphe 1 de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008, et ne sont pas incompatibles avec les objectifs de ce paragraphe, ce qui n'est au demeurant pas contesté ; que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement ; que, dès lors que comme en l'espèce, ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de cette obligation n'implique pas, par conséquent de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, dispositions légales au regard desquelles doit être apprécié le caractère suffisant ou non de cette motivation ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté ;

Considérant, d'autre part, que, contrairement à ce que soutient M. A, aucune disposition de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 n'impose à l'autorité administrative de motiver spécifiquement le délai de départ volontaire imparti à l'étranger lorsque la durée de ce délai est comprise, comme en l'espèce, entre les limites, fixées au 1 de cet article, de sept à trente jours ;

En ce qui concerne le caractère insuffisant du délai imparti :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. / 3. Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire. / 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les États membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours " ; qu'aux termes du troisième alinéa du I de l'article L. 511-1 du code susvisé : " L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration " ;

Considérant que ces dernières dispositions législatives laissent, de façon générale, un délai d'un mois pour le départ volontaire de l'étranger qui fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'un tel délai d'un mois s'entend comme une période minimale de trente jours telle que prévue par l'article 7 de la directive à titre de limite supérieure du délai devant être laissé pour un départ volontaire ; que les dispositions de l'article L. 511-1 ne font pas obstacle à ce que l'autorité administrative prolonge, le cas échéant, le délai de départ volontaire d'une durée appropriée pour faire bénéficier les étrangers, dont la situation particulière le nécessiterait, de la prolongation prévue par le paragraphe 2 de l'article 7 de la directive ; que, dans ces conditions, les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas incompatibles avec les objectifs de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 ;

En ce qui concerne l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant, que pour les motifs exposés ci-dessus concernant la décision refusant la délivrance du titre de séjour sollicité, M. A n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Pas-de-Calais a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ne se serait pas livré à un examen sérieux de la situation de l'intéressé au regard desdites stipulations ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des motifs qui précèdent que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions de l'article L. 621-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard des stipulations de la directive n° 2008/115 susvisée est inopérant dès lors qu'aucune des décisions attaquées ne procède de l'application de ces dispositions ;

Considérant, en troisième lieu, que pour les motifs exposés ci-dessus M. A n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Pas-de-Calais a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Pas-de-Calais ne se serait pas livré à un examen sérieux de la situation de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Djalal A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

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N°11DA01633


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11DA01633
Date de la décision : 29/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Textes applicables - Conventions internationales.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: M. Edouard Nowak
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS VOISIN - MALENGE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-03-29;11da01633 ?
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