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05/04/2012 | FRANCE | N°11DA00221

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 05 avril 2012, 11DA00221


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 10 février 2011 et confirmée par la production de l'original le 11 février 2011, présentée pour Mme Marie-Paule A, demeurant ..., par la société d'avocats Fidal, avocat ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802687 du 2 décembre 2010 en tant que le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 février 2008 du préfet du Nord en tant qu'il déclare cessible pour cause d'utilité publique, au profit de la com

mune de Douchy-les-Mines, la parcelle cadastrée section C n° 282 appartenant...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 10 février 2011 et confirmée par la production de l'original le 11 février 2011, présentée pour Mme Marie-Paule A, demeurant ..., par la société d'avocats Fidal, avocat ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802687 du 2 décembre 2010 en tant que le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 février 2008 du préfet du Nord en tant qu'il déclare cessible pour cause d'utilité publique, au profit de la commune de Douchy-les-Mines, la parcelle cadastrée section C n° 282 appartenant à Mme A nécessaire au projet d'aménagement de la " ZAC du Bois de Douchy " ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dominique Naves, président-assesseur,

- les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public,

- et les observations de Me P.-G. Balaÿ, avocat de Mme A, et de Me Mouveau, avocat de la commune de Douchy-les-Mines ;

Considérant que, par délibération du 15 juin 2006, le conseil municipal de la commune de Douchy-les-Mines a approuvé la création d'une zone d'aménagement concerté, dénommée " ZAC du Bois de Douchy ", destinée à recevoir un ensemble immobilier de trois cent cinquante-cinq logements, dont deux cent huit logements locatifs sociaux, cinquante-sept logements en accession à la propriété et vingt logements pour personnes âgées regroupés sous forme de béguinage, sur un ensemble de dix-huit parcelles d'une superficie totale de quatorze hectares, soixante-quatre ares et trente-trois centiares et situées entre le bois de Douchy et la route départementale n° 30 ; que, la commune a sollicité, par une délibération du 20 décembre 2006, l'ouverture simultanée de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique et de l'enquête parcellaire en vue de l'acquisition de trois parcelles n'ayant pu être acquises par voie amiable cadastrées section C nos 282, 283 et 287, appartenant respectivement à Mme A, aux consorts B et à M. C ; que le sous-préfet de Valenciennes agissant par délégation du préfet du Nord a, par arrêté du 24 mai 2007, prescrit l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique ; que cette même autorité a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement de la " ZAC du Bois de Douchy " et cessibles, pour cause d'utilité publique, les trois parcelles mentionnées ci-dessus respectivement par un arrêté du 4 décembre 2007 et un arrêté du 18 février 2008 ; que M. C, M. B et Mme A ont demandé au tribunal l'annulation de cette dernière décision ; que, par jugement du 2 décembre 2010, le tribunal a donné acte du désistement de MM C et B de leur demande et rejeté la demande de Mme A dirigée contre la décision du 18 février 2008 en tant qu'elle déclare cessible sa parcelle cadastrée C n° 282 nécessaire à l'opération ; que, dans cette mesure, Mme A relève appel de ce jugement ;

Considérant que Mme A excipe, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté de cessibilité du 18 février 2008, de l'illégalité de l'arrêté du 4 décembre 2007 déclarant d'utilité publique le projet d'aménagement de la " ZAC du Bois de Douchy " ;

Sur la procédure d'enquête publique :

En ce qui concerne la désignation du commissaire enquêteur par le président du tribunal administratif :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Le préfet désigne par arrêté un commissaire enquêteur ou une commission d'enquête dont il nomme le président. Lorsque l'enquête est préalable à une déclaration d'utilité publique, le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête sont désignés dans les conditions fixées à l'article R. 11-14-3 " ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article R. 11-14-3 du même code : " Le préfet saisit, en vue de la désignation d'un commissaire enquêteur ou d'une commission d'enquête, le président du tribunal administratif dans le ressort duquel doit être réalisée l'opération ou la plus grande partie de l'opération soumise à enquête et lui adresse à cette fin une demande précisant l'objet de l'enquête ainsi que la période d'enquête retenue. / Le président du tribunal administratif ou le membre du tribunal délégué à cette fin désigne dans un délai de quinze jours un commissaire enquêteur ou les membres, en nombre impair, d'une commission d'enquête parmi lesquels il choisit un président " ;

Considérant qu'il est constant que l'enquête publique était préalable à une déclaration d'utilité publique ; que, par suite, en vertu des dispositions combinées des articles R. 11-4 et R. 11-14-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, le président du tribunal administratif était chargé de procéder à la désignation du commissaire enquêteur ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette désignation aurait été réalisée par une personne incompétente doit être écarté ;

En ce qui concerne les critiques adressées à l'enquête publique :

Considérant, d'une part, qu'il résulte tant des dispositions de l'article R. 11-4 que de celles de l'article R. 11-14-7 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique que l'avis public doit être publié notamment dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le département concerné ; que, selon le rapport d'enquête d'utilité publique, il a été procédé à la publication de deux avis faisant connaître au public l'ouverture de l'enquête qui s'est déroulée du 22 juin au 8 août 2007, les 5 et 23 juin 2007, dans plusieurs éditions importantes du quotidien régional " La Voix du Nord " - à savoir les éditions de Valenciennes/Denain, Roubaix et Armentières et les éditions de Douai, Lille et Roubaix -, ainsi que, les 1er et 22 juin 2007, dans des journaux diffusés dans le valenciennois ; que la mairie a également mis en place une information du public ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à l'affluence constatée par le commissaire enquêteur et compte tenu des efforts d'information déployés à travers la presse et par la commune elle-même, et en dépit du nombre peu élevé d'observations recueillies, que la seule circonstance que les avis n'auraient pas été publiés dans la totalité des éditions départementales du journal " La Voix du Nord ", ait eu pour effet de faire obstacle, en l'espèce, à ce que l'ensemble des personnes intéressées puissent faire valoir leurs observations en temps utile ; que, dès lors, Mme A n'est pas fondée à soutenir que les opérations d'enquête publique auraient été sur ce point entachées d'irrégularité ;

Considérant, d'autre part, que le dossier soumis à enquête publique contenait la notice explicative et l'appréciation sommaire des dépenses prévues notamment par les 1° et 5° de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Valenciennes ait envisagé d'autres partis d'implantation de son projet, ni qu'elle disposait d'autres terrains pour la réalisation de l'opération ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'estimation sommaire des dépenses aurait été insuffisante ; que, dès lors, Mme A n'est pas fondée à soutenir que le dossier soumis à enquête publique n'aurait pas été complet ;

Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le commissaire enquêteur, qui n'était pas tenu de répondre à chacune des observations notamment orales qui lui avaient été adressées, n'en aurait pas tenu compte ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du rapport du commissaire enquêteur doit être écarté ;

En ce qui concerne le choix de la procédure d'enquête publique :

Considérant que Mme A soutient que c'est à tort que la procédure d'enquête spécifique a été choisie en application des articles R. 11-14-1 et suivants du code de l'expropriation au lieu et place de l'enquête de droit commun, car le seuil minimal de 1 900 000 euros pour les travaux d'investissement routiers prévu au point n° 8 de l'annexe I de l'article R. 123-1 du code de l'environnement ne se trouve pas atteint ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit, le choix du commissaire enquêteur par le président du tribunal administratif est indépendant de la mise en oeuvre de ces dispositions ; que les autres critiques adressées à l'enquête publique sont indifférentes au regard de ce choix ; que, pour le surplus, la requérante n'assortit pas son moyen des précisions qui permettraient de constater que la procédure spécifique choisie, même à tort, a été de nature à affecter le déroulement de l'enquête publique par rapport à une enquête publique de droit commun ; que, par suite, ce moyen doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de l'absence d'utilité publique de l'opération :

Considérant qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée ou à des intérêts généraux, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant qu'il ressort de la notice explicative du dossier soumis à enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique que le projet de création de la zone d'aménagement concerté, dénommée " ZAC du Bois de Douchy " a pour objectif de générer " un nouvel essor démographique de la ville dont la population est en baisse constante depuis vingt ans " due notamment à l'insuffisance du rythme des constructions, en dotant la commune de Douchy-les-Mines d'un ensemble immobilier de trois cent cinquante-cinq logements principalement à caractère locatif social destiné à satisfaire des demandes de logement émanant de personnes à faible revenu ; qu'au 1er janvier 2008 le nombre de demandes non satisfaites sur le territoire de la communauté d'agglomération de la porte du Hainaut s'établissait à quatre mille cinq cent quarante-huit dont quatre cent trois sur la commune de Douchy-les-Mines ; qu'ainsi, l'opération envisagée revêt un caractère d'utilité publique ; que les atteintes qu'elle porte à la propriété privée de la requérante ne sont pas, par ailleurs, excessives, eu égard à l'utilité publique qu'elle présente ; que, par suite, le moyen tiré du défaut d'utilité publique de l'opération envisagée doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 2 décembre 2010, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Douchy-les-Mines, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme A de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A le versement d'une somme de 1 500 euros à la commune de Douchy-les-Mines au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Mme A versera à la commune de Douchy-les-Mines une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-Paule A, à la commune de Douchy-les-Mines et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie sera adressée pour information au préfet du Nord.

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N°11DA00221


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11DA00221
Date de la décision : 05/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Expropriation pour cause d'utilité publique - Notions générales - Notion d'utilité publique - Existence.

Expropriation pour cause d'utilité publique - Règles générales de la procédure normale - Enquêtes - Enquête préalable - Procédure d'enquête.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Dominique Naves
Rapporteur public ?: M. Larue
Avocat(s) : SELAFA FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-04-05;11da00221 ?
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