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16/05/2012 | FRANCE | N°11DA00020

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 5, 16 mai 2012, 11DA00020


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 6 janvier 2011, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE ROUEN ELBEUF DIEPPE SEINE-MARITIME, dite CPAM de ROUEN, dont le siège est 50 avenue de Bretagne à Rouen (76039 cedex 1), représentée par son directeur en exercice, par la SCP Julia, Jegu, Bourdon, avocats ; la CPAM de ROUEN demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0601692 du 2 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen, après avoir condamné le centre hospitalier universitaire de Rouen à vers

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 6 janvier 2011, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE ROUEN ELBEUF DIEPPE SEINE-MARITIME, dite CPAM de ROUEN, dont le siège est 50 avenue de Bretagne à Rouen (76039 cedex 1), représentée par son directeur en exercice, par la SCP Julia, Jegu, Bourdon, avocats ; la CPAM de ROUEN demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 0601692 du 2 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rouen, après avoir condamné le centre hospitalier universitaire de Rouen à verser à Mme A la somme de 3 500 euros en réparation et celle de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'à verser à l'Etat la somme de 2 016,46 euros avec intérêts au taux légal et mis les frais d'expertise à sa charge, a rejeté le surplus des conclusions de la demande de Mme A ainsi que les conclusions de la CPAM de ROUEN tendant, à titre principal, à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise et, à titre subsidiaire, à ce que le centre hospitalier universitaire de Rouen lui verse une somme de 57 743,06 euros au titre de ses débours, une somme de 966 euros au titre de l'indemnité forfaitaire et une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'ordonner une expertise ;

3°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Rouen à lui verser, au titre de ses débours, la somme de 57 743,06 euros ou, subsidiairement, celle de 3 234,80 euros, ainsi qu'une somme de 966 euros au titre de l'indemnité forfaitaire ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public,

- les observations de Me de Bézenac, avocat, pour Mme B ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que, par une ordonnance du 7 octobre 2004, le juge des référés du tribunal administratif de Rouen a prescrit une expertise ; que le rapport d'expertise a été enregistré au greffe de ce tribunal le 28 février 2005 ; que, par un jugement avant-dire droit du 13 novembre 2008, le tribunal a prescrit une expertise médicale complémentaire ; que le rapport d'expertise a été enregistré au greffe du tribunal le 16 novembre 2009 ;

Considérant, d'une part, que, si la CPAM de ROUEN et Mme B font grief à ce second expert de certaines de ses appréciations, leurs arguments à ce titre n'ont d'incidence que sur l'appréciation du bien-fondé du jugement mais demeurent sans influence sur sa régularité ;

Considérant, d'autre part que, postérieurement à l'enregistrement de ce rapport d'expertise, un dire du 8 décembre 2009 a été adressé à l'expert par le médecin conseil mandaté par Mme B, laquelle a produit ce dire au soutien de ses observations enregistrées le 18 décembre 2009 ; que l'expert a répondu à ce dire par des observations enregistrées au greffe du tribunal administratif de Rouen le 28 janvier 2010 ; que cet enregistrement, postérieur à celui du rapport d'expertise, est sans influence sur la régularité des opérations d'expertise dont ce rapport est issu ; qu'en outre, les observations ainsi présentées par cet expert ont été communiquées à l'ensemble des parties, la CPAM de ROUEN ayant, en particulier, présenté de nouvelles écritures le 3 mars 2010, Mme B en ayant fait de même le 30 avril 2010 ; que faisant usage des pouvoirs qu'il tient dans la conduite de la procédure inquisitoire, le tribunal a pu décider, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et sans qu'il fût nécessaire de rouvrir les opérations d'expertise, de verser au dossier ces observations présentées par l'expert et ce, dès lors que, comme cela a été le cas, elles étaient ensuite soumises au débat contradictoire entre les parties ; que, pour les mêmes raisons, il était en droit de verser au dossier une lettre de l'expert en date du 11 mars 2010, dès lors que ce document a été communiqué aux parties et ainsi soumis au débat contradictoire ; qu'il en résulte que le jugement n'est pas entaché d'irrégularité ;

Sur l'étendue de la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen :

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère " ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que du 15 au 17 mai 2001, Mme B a été hospitalisée au centre hospitalier universitaire de Rouen où elle a subi une intervention chirurgicale destinée à traiter une hernie de la ligne blanche sus-ombilicale ; qu'une récidive de cette hernie ayant été constatée au mois de novembre 2001, la patiente a subi le 7 janvier 2002 une nouvelle intervention chirurgicale dans le même hôpital ; qu'à la suite de cette intervention et à compter du 15 janvier 2002 a été constaté un écoulement cicatriciel, dont la persistance a conduit à la réalisation, le 5 février 2002, d'un prélèvement dont l'analyse a mis en évidence, le 7 février suivant, une infection du site opératoire de la paroi abdominale résultant de la présence d'un staphylocoque doré sensible à tous les antibiotiques ; qu'ainsi que l'ont à bon droit estimé les premiers juges, Mme B a ainsi été victime d'une infection nosocomiale ; qu'en l'absence de preuve d'une cause étrangère, le centre hospitalier universitaire de Rouen est responsable des conséquences dommageables résultant de cette infection à laquelle elles sont imputables ; qu'il n'est, toutefois, responsable que de ces conséquences dommageables ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme B ayant consulté le chirurgien hospitalier le 15 janvier 2002 en raison de l'écoulement cicatriciel constaté, ce médecin a pu alors se borner à prescrire un pansement de protection de la plaie, dès lors qu'aucun prélèvement ne s'imposait au jour de cette consultation en l'absence de caractère purulent de cet écoulement ni de signe clinique d'une infection ; que ce caractère purulent n'a été constaté que le 5 février 2002, à l'occasion d'une consultation de l'intéressée auprès de son médecin traitant, lequel a, au vu de la mise en évidence d'une infection, prescrit un traitement antiseptique ainsi que l'administration d'un antibiotique anti-staphylococcique ; que Mme B a revu le chirurgien hospitalier le 2 mai 2002 ; qu'à cette occasion, ce médecin a constaté la persistance d'un petit écoulement au niveau de la cicatrice provoquée par l'intervention du 7 janvier 2002, laquelle persistance s'expliquait tant par l'expulsion progressive, à partir du 23 mars 2002, des fils de suture que par l'infection constatée le 7 février 2002 et entretemps traitée ; que, toutefois, ce chirurgien a également constaté que le pansement cicatriciel initialement prescrit le 15 janvier précédent était sec et a prescrit, jusqu'à cicatrisation complète, une modification du traitement antiseptique prescrit par le médecin traitant le 7 février 2002 ; qu'il résulte également de l'instruction que l'expulsion des fils de suture s'est achevée au mois de juillet 2002, la plaie étant alors cicatrisée ; que la patiente n'a pas consulté le centre hospitalier universitaire de Rouen après le 2 mai 2002 ; que, compte tenu de ces éléments, le centre hospitalier universitaire de Rouen n'a pas commis de faute médicale de nature à engager sa responsabilité, notamment en ne prescrivant pas, dès le 15 janvier 2002, un prélèvement à visée bactériologique ;

Considérant, en troisième lieu, qu'à la fin, d'après elle, du mois de juillet 2002, Mme B a constaté la réapparition d'une hernie sus-ombilicale dont l'augmentation de volume l'a conduite, d'ailleurs seulement le 2 septembre 2002, à consulter son médecin traitant, qui a constaté que sa patiente était victime d'une éventration sus-ombilicale et l'a dirigée vers une clinique de Rouen, où elle a fait l'objet d'une intervention chirurgicale le 28 octobre 2002 ; que les rapports d'expertise relèvent la possibilité, documentée par la littérature médicale, de récidives de telles hernies après chirurgie ; que si le chirurgien du centre hospitalier universitaire de Rouen a constaté, le 2 mai 2002, la persistance d'un petit écoulement cicatriciel, cet écoulement ne présentait pas, alors, un caractère purulent ou infectieux ; que la résorption ou l'expulsion des fils de suture était achevée au plus tard le 31 juillet 2002 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le chirurgien d'une clinique rouennaise qui a pratiqué l'intervention du 28 octobre 2002 aurait constaté, que ce soit avant, pendant ou après cette intervention, une infection liée à cette dernière ou aux interventions antérieurement pratiquées au centre hospitalier universitaire de Rouen ; qu'il suit de là et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise complémentaire, que la CPAM de ROUEN et Mme B ne sont pas fondées à soutenir que la récidive de la hernie sus-ombilicale avec éventration constatée par le médecin traitant le 2 septembre 2002 serait imputable à l'infection nosocomiale révélée le 7 février 2002 et, par suite, en serait au nombre des conséquences dommageables ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que les nouvelles récidives de hernie sus-ombilicale dont a été ultérieurement affectée Mme B, à la fin de l'année 2004 ainsi qu'en 2006, 2007 et 2008 auraient eu pour cause l'infection nosocomiale constatée le 7 février 2002 ; que l'existence d'une telle causalité ne résulte pas de la mise en évidence chez Mme B, en juillet et septembre 2006 ainsi qu'en juillet 2008, d'un staphylocoque doré, dès lors, d'une part, qu'entre les mois de juillet 2002 et juillet 2008, l'intéressée a subi plusieurs interventions chirurgicales auprès d'une clinique à Rouen ainsi que dans un hôpital à Bayonne et, d'autre part, qu'il ressort des rapports d'expertise que la survenue d'infections, notamment à staphylocoque, constitue une complication connue des opérations de chirurgie digestive de la nature de celles qu'a subies Mme B ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'au-delà du 31 juillet 2002, les dommages subis par Mme B auraient eu pour cause l'infection nosocomiale de la paroi abdominale imputable au centre hospitalier universitaire de Rouen et constatée le 7 février précédent ; que, dès lors, la période de responsabilité de cet établissement public doit être comprise entre le 15 janvier et le 31 juillet 2002 ;

Sur les droits de la CPAM de ROUEN :

Considérant que les relevés de débours des 7 septembre 2009 et 25 mars 2010 produits par la CPAM de ROUEN au soutien de ses conclusions ne font état, s'agissant de la période antérieure au mois d'août 2002, que de l'hospitalisation de Mme B au centre hospitalier universitaire de Rouen du 6 au 8 janvier 2002, laquelle ne constitue pas une conséquence dommageable de l'infection nosocomiale constatée le 7 février 2002 ; que si ces documents font état de frais médicaux et pharmaceutiques entre les mois de décembre 2001 et septembre 2008, il n'est pas justifié des seuls frais de cette nature exposés sur la période du 15 janvier 2002 au 31 juillet 2002, seule au titre de laquelle la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Rouen est engagée ; qu'en outre, le relevé de débours du 25 mars 2010 rattache la prise en charge d'actes infirmiers de soins aux années 2006 à 2008 ; que, dans ces conditions, la CPAM de ROUEN ne justifie pas de ses débours imputables à cette infection nosocomiale ; que, par voie de conséquence, elle ne saurait prétendre à la mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Rouen de l'indemnité forfaitaire prévue aux huitième et neuvième alinéas de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

Sur les droits de Mme B :

Considérant, d'une part, que, si Mme B soutient que sont demeurés à sa charge des frais pharmaceutiques d'un montant de 90,34 euros, elle n'en justifie pas ;

Considérant, d'autre part, que, si Mme B soutient qu'à la suite de l'arrêt de travail dont elle fait l'objet du 6 janvier au 3 février 2002, elle a perdu le bénéfice d'une indemnité spéciale de sujétion en raison de ses fonctions de professeur des écoles dans une zone d'éducation prioritaire, le bénéfice d'un tel complément de rémunération est lié à l'exercice effectif des fonctions ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à en prétendre au remboursement ;

Considérant, enfin, que Mme B n'établit pas qu'en fixant à 3 500 euros l'indemnisation due au titre des troubles dans les conditions d'existence, aux souffrances endurées et au préjudice esthétique, les premiers juges se seraient livrés à une insuffisante évaluation de ces chefs de préjudice personnels ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la CPAM de ROUEN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement du 2 décembre 2010 le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions de première instance ; que Mme B n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 7 du même jugement, ce tribunal a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; que les conclusions de la CPAM de ROUEN et de Mme B présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE ROUEN ELBEUF DIEPPE SEINE-MARITIME est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de Mme B sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE ROUEN ELBEUF DIEPPE SEINE-MARITIME, à Mme Virginie B, au centre hospitalier universitaire de Rouen et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

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