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14/06/2012 | FRANCE | N°11DA00042

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 14 juin 2012, 11DA00042


Vu, I, sous le n° 11DA00042, le recours, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 11 janvier 2011, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT, qui demande à la cour d'annuler le jugement n° 0801260 du 12 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Lille a, d'une part, annulé la décision en date du 9 novembre 2007 par lequel il a autorisé la société TEP à licencier M. A et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administ

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Vu, I, sous le n° 11DA00042, le recours, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 11 janvier 2011, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT, qui demande à la cour d'annuler le jugement n° 0801260 du 12 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Lille a, d'une part, annulé la décision en date du 9 novembre 2007 par lequel il a autorisé la société TEP à licencier M. A et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, II, sous le n° 11DA00063, la requête enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 14 janvier 2011 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 17 janvier 2011, présentée pour la société par actions simplifiée TEP, dont le siège est 2, rue du Nouveau Bercy, immeuble le Levant à Charenton-le-Pont cedex (94227), représentée par son président, par Me Larousse, avocat ; la SOCIETE TEP demande à la cour d'annuler le jugement n° 0801260 du 12 novembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 9 novembre 2007 par laquelle le ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables l'a autorisée à licencier M. A ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public ;

Considérant que le recours du MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT et la requête de la SOCIETE TEP sont dirigés contre un même jugement et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par un seul arrêt ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ; qu'aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail : " En cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. / Si un doute subsiste, il profite au salarié " ;

Considérant que pour accorder à la SOCIETE TEP l'autorisation de licencier M. A, qui, délégué du personnel, exerce au sein de cette entreprise la fonction de chef d'équipe, le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT, après avoir considéré que ne sont pas établis les agissements de nature sexuelle imputés à l'intéressé à l'égard de Mme B, dont il est le supérieur hiérarchique, a toutefois estimé que le 11 avril 2007, sur le lieu et pendant le temps de travail, il a abusé de sa position hiérarchique à l'égard de cette salariée et que cet abus d'autorité s'est traduit par un acte de violence ayant conduit à un arrêt de travail ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le 11 avril 2007, Mme B a porté plainte à l'encontre de M. A des chefs de violences volontaires et harcèlement et, à cette occasion, a déclaré à l'agent de police judiciaire qui l'a auditionnée que, le matin du même jour, l'intéressé l'a " attrapée par le poignet ", qu'elle a ensuite crié et qu'il a pris la fuite ; que l'agent de police ayant constaté que Mme B présentait des marques de griffes sur le visage en dessous d'un oeil et à la question de savoir si M. A l'avait frappée, la plaignante a répondu ne pas se souvenir qu'il lui avait donné un coup quelconque au visage ou même griffé, mais se rappeler qu'il avait simplement levé la main en direction de son visage ; que le certificat médical établi le 16 avril 2007, s'il constate une ecchymose sans gravité sur la main droite, sans se prononcer sur son origine, fait état de l'absence de stigmate cutané contusionnel au visage et ajoute que le reste de l'examen clinique ne permet aucune constatation utile ; que, malgré sa déclaration du 11 avril 2007, Mme B, dans une attestation datée du 26 avril 2007 - ainsi que rédigée dans le bureau du directeur d'une agence de la SOCIETE TEP, affirme que M. A lui a porté un coup au visage, outre qu'il l'a insultée et l'a attrapée par le bras ; qu'ainsi et s'agissant de l'acte de violence imputé à M. A, les déclarations de Mme B sont contradictoires ; qu'au demeurant, il n'est pas contesté qu'une sanction disciplinaire avait été infligée à cette salariée le 3 novembre 2006 à la demande de son supérieur hiérarchique, M. A ; que le témoignage, daté du " 13 avril 2006 ", d'une autre salariée, également placée sous l'autorité de ce dernier et selon lequel, le " 11 avril 2006 ", elle aurait vu l'intéressé " violenter " Mme B, ne présente pas un caractère probant dès lors, d'une part, qu'il ne ressort pas du document produit qu'il aurait été effectivement rédigé par cette autre salariée et, d'autre part, qu'il n'est pas contesté qu'une sanction disciplinaire lui avait été infligée le 2 avril 2007 à la demande de M. A ; que la lettre d'un enseignant de l'université de Lille I du 13 avril 2007 n'est pas propre à établir la matérialité de l'acte de violence imputé à M. A par la décision du 9 novembre 2007 ; que, comme le relève d'ailleurs elle-même cette décision, la demande d'autorisation de licenciement du 11 mai 2007 se borne sans autre précision à faire état d'un " harcèlement à l'égard d'une de ses collègues " ; qu'enfin, si le ministre soutient que les faits ont été confirmés lors de l'enquête contradictoire menée par l'inspectrice du travail des transports, il ne produit, toutefois, aucun document en ce sens ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments, il subsiste un doute sur la matérialité de l'acte de violence imputé à M. A ; que, conformément à la loi, ce doute doit profiter au salarié ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les griefs reprochés à M. A ne sauraient être regardés comme établis et que, dès lors, la décision du 9 novembre 2007 est entachée d'inexactitude matérielle des faits ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de ce que, contrairement à ce qu'ont surabondamment estimé les premiers juges, l'inspectrice du travail des transports était compétente, le MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT et la SOCIETE TEP ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 12 novembre 2010, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision ministérielle du 9 novembre 2007 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que conformément à l'article 8 de la loi susvisée du 10 juillet 1991, M. A a conservé de plein droit en appel le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale auquel il avait été admis en première instance ; que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de mettre à la charge, à son profit, d'une partie perdante que le paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat ; que M. A n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale dont il bénéficie ; qu'en outre, son avocat n'a pas demandé que lui soit versée par l'Etat une somme correspondant aux frais exposés non compris dans les dépens qu'elle aurait demandés à son client si ce dernier n'avait bénéficié de cette aide juridictionnelle ; que, dans ces conditions, les conclusions de M. A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT et la requête de la SOCIETE TEP sont rejetés.

Article 2 : Les conclusions de M. A présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L'ENERGIE, à la société par actions simplifiée TEP et à M. Kamal A.

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N°11DA00042,11DA00063


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés.

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation - Licenciement pour faute - Absence de faute d'une gravité suffisante.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : PAPERMAN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Date de la décision : 14/06/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11DA00042
Numéro NOR : CETATEXT000026025567 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-06-14;11da00042 ?
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