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14/06/2012 | FRANCE | N°11DA00165

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 14 juin 2012, 11DA00165


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 4 février 2011 et régularisée le 16 mars 2011, présentée pour Mme Colette A, Mlle Lucie A, Mlle Julie A, Mlle Emilie A et M. Benjamin A, demeurant ensemble ..., par Me Crépin, avocat ; les consorts A demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901766 du 16 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire d'Amiens soit condamné à verser une somme de 345 000 euros à Mme Colette A et une somme de 15

000 euros à chacun de ses enfants en réparation des préjudices qu'ils...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 4 février 2011 et régularisée le 16 mars 2011, présentée pour Mme Colette A, Mlle Lucie A, Mlle Julie A, Mlle Emilie A et M. Benjamin A, demeurant ensemble ..., par Me Crépin, avocat ; les consorts A demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901766 du 16 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire d'Amiens soit condamné à verser une somme de 345 000 euros à Mme Colette A et une somme de 15 000 euros à chacun de ses enfants en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait du décès de M. Luc C survenu le 1er décembre 2007 ;

2°) de faire droit à leur demande de première instance et de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens à verser, d'une part, une somme de 345 000 euros à Mme A, soit 25 000 euros au titre de son préjudice moral et 320 000 euros au titre de son préjudice financier, et, d'autre part, une somme de 15 000 euros à chacun de ses enfants au titre de leur préjudice moral ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire d'Amiens la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens aux entiers dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Maryse Pestka, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public,

- les observations de Me Hertault, avocat, substituant Me Crépin, pour les consorts A et le régime social des indépendants de Picardie,

- les observations de Me Aubourg, avocat, substituant Me Montigny, pour le centre hospitalier universitaire d'Amiens ;

Considérant que M. Luc C, alors âgé de 49 ans, s'est présenté au service des urgences du centre hospitalier universitaire d'Amiens le jeudi 29 novembre 2007 dans la matinée en se plaignant de la persistance d'une douleur abdominale ayant débuté deux jours auparavant après qu'il eut ressenti une douleur brutale, lombaire et abdominale, en déchargeant son camion ; que le service des urgences a posé le diagnostic d'une déchirure musculaire, lui a prescrit des anti-inflammatoires et des antalgiques à prendre pendant sept jours, et a autorisé sa sortie un peu plus d'une heure après son admission ; que M. C est décédé le samedi 1er décembre 2007 à 18 heures ; que l'autopsie du corps réalisée le 4 décembre 2007 a conclu à un décès dû à une dissection aortique ; que l'épouse et les quatre enfants de M. C relèvent appel du jugement du 16 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire d'Amiens soit condamné à verser une somme de 345 000 euros à Mme Colette A et une somme de 15 000 euros à chacun de ses enfants en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait du décès de M. C ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du Dr D réalisé le 26 janvier 2009, que la prise en charge de M. C, telle qu'elle est retranscrite dans le compte rendu du service des urgences du centre hospitalier universitaire d'Amiens en date du 29 novembre 2007, a été insuffisante au regard des symptômes présentés par l'intéressé et de ses antécédents médicaux ; que l'expert indique notamment que " La notion d'une douleur lombaire et abdominale diffuse chez un patient de 49 ans, hypertendu, nécessitait : / - soit un examen plus approfondi et un avis spécialisé, ce que déclare avoir fait le Dr E, chirurgien vasculaire, mais qui n'est pas noté dans le dossier médical, / - soit un examen plus approfondi et des examens complémentaires de base, radiographiques, échographiques, voire scannographiques à la recherche d'une éventuelle pathologie rétro-péritonéale, notamment vasculaire " ; que si le centre hospitalier soutient qu'un examen complémentaire approfondi de M. C a bien été réalisé par le Dr E, bien que cela n'ait pas été retranscrit dans le dossier médical de l'intéressé, la réalité de ces allégations n'est pas établie par les documents produits à leur soutien, et notamment pas par les dossiers médicaux de trois patients arrivés au service des urgences en même temps que M. C, qui mentionnent quant à eux expressément l'intervention du chirurgien vasculaire ; que l'insuffisance de la prise en charge de M. C est constitutive d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service ;

Considérant toutefois qu'il ressort par ailleurs du rapport d'expertise du Dr D que la date de survenue de la dissection aortique dont M. C est décédé ne peut être précisée ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette dissection aortique avait débuté alors que l'intéressé était pris en charge par le centre hospitalier ; que, dès lors, le lien de causalité entre la faute commise par le centre hospitalier et le décès de M. C ne peut être regardé comme établi ; que, par suite, les conclusions des requérants tendant à la mise en jeu de la responsabilité du centre hospitalier d'Amiens ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les dépens :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise (...) sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties " ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y avait lieu de mettre les frais de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 500 euros, à la charge du centre hospitalier universitaire d'Amiens ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts A ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier universitaire d'Amiens soit condamné à verser une somme de 345 000 euros à Mme Colette A et une somme de 15 000 euros à chacun de ses enfants en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait du décès de M. Luc C ; que le régime social des indépendants de Picardie n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier à lui payer la somme de 9 679,25 euros, au titre de ses débours, et l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; que les consorts A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal à mis les frais de l'expertise pour moitié à leur charge ; que le centre hospitalier universitaire d'Amiens n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par cet article 3, le tribunal à mis des frais d'expertise à sa charge ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens (...) à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge des consorts A, qui n'ont pas la qualité de partie tenue aux dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire d'Amiens le versement aux consorts A de la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, de mettre à la charge du centre hospitalier le versement de la somme demandée au même titre par le régime social des indépendants de Picardie ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 3 du jugement n° 0901766 du tribunal administratif d'Amiens en date du 16 décembre 2010 est annulé.

Article 2 : Les frais de l'expertise de première instance sont mis à la charge du centre hospitalier universitaire d'Amiens.

Article 3 : Le centre hospitalier universitaire d'Amiens versera une somme de 2 500 euros aux consorts A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête des consorts A est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par le régime social des indépendants de Picardie sont rejetées.

Article 6 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire d'Amiens au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Colette A née F, Mlle Lucie A, Mlle Julie A, Mlle Emilie A et M. Benjamin A, à la caisse du régime social des indépendants de Picardie et au centre hospitalier universitaire d'Amiens.

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