La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2012 | FRANCE | N°11DA00442

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 19 juin 2012, 11DA00442


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 17 mars 2011, régularisée par la production de l'original le 18 mars 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Annie A, demeurant ..., par Me Degandt, avocate ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900168 du 12 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2008, modifiée le 24 avril 2009, par laquelle le directeur du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont a prononcé à son encontre une sanc

tion d'exclusion temporaire d'un an, assortie de huit mois de sursis, à ...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 17 mars 2011, régularisée par la production de l'original le 18 mars 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Annie A, demeurant ..., par Me Degandt, avocate ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900168 du 12 janvier 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2008, modifiée le 24 avril 2009, par laquelle le directeur du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont a prononcé à son encontre une sanction d'exclusion temporaire d'un an, assortie de huit mois de sursis, à compter du 1er janvier 2009 ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de condamner le centre hospitalier d'Hénin-Beaumont à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 86-33 du 8 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- et les observations de Me Degandt, avocate, pour Mme A et de Me Brazier, avocat, pour le centre hospitalier d'Hénin-Beaumont ;

Considérant que Mme A, adjoint des cadres hospitaliers au centre hospitalier d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), alors affectée à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes " Les Cinq Saisons ", a fait l'objet d'une sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'un an, assortie de huit mois de sursis, par décision du 19 décembre 2008, modifiée le 24 avril 2009, du directeur dudit centre hospitalier ; que, par jugement du 12 janvier 2011, le tribunal administratif de Lille a censuré un des trois motifs ayant conduit l'autorité disciplinaire à infliger cette sanction, mais a rejeté le recours en annulation formé par Mme A après avoir estimé que le directeur du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur les deux autres motifs de sanction ; que Mme A fait appel de ce jugement ; qu'en défense, le centre hospitalier fait valoir que c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que le troisième motif retenu pour justifier la sanction n'était pas matériellement établi ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

Considérant que la sanction en litige est motivée par l'opposition de la requérante à se limiter aux tâches que lui a assignées sa hiérarchie, par son entrave au fonctionnement de la régie comptable de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes " Les Cinq Saisons " et par des propos irrespectueux et calomnieux proférés à l'égard du directeur du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des courriers électroniques des 28 et 29 août 2008 émanant de Mme A, que celle-ci a refusé de se rendre aux entretiens prévus par Mme C, son supérieur hiérarchique direct, dans le but de déterminer ses missions et de procéder à un recadrage de ses attributions au moyen de l'élaboration de ses fiches de postes ; que la requérante, qui a exprimé son refus de signer ces fiches de postes et de s'en tenir aux missions y figurant, n'est pas fondée à justifier ce comportement d'insubordination par une réaction à des brimades qu'elle aurait subies depuis plusieurs mois ; qu'elle ne peut utilement se prévaloir, pour refuser de signer ses fiches de poste, de la crainte d'en valider le contenu dès lors qu'elle s'est elle-même exclue de la procédure qui a conduit à définir ce contenu, en refusant de se rendre aux entretiens de son supérieur, et qu'elle pouvait user de voies de droit appropriées si les missions décrites par ces fiches de poste portaient atteinte à ses droits statutaires ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a reconnu la matérialité des faits de désobéissance et le caractère fautif de ces agissements ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A, qui était régisseur titulaire de la régie d'avances et de recettes de la maison de retraite " Les Cinq Saisons ", a été placée en arrêt de travail à compter du 21 octobre 2008 ; que, dès le lendemain, la requérante, contactée à son domicile, s'est vu demander de remettre la clé et la combinaison du coffre de cette régie comptable ; qu'elle s'est rapprochée le même jour du comptable public assignataire du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont afin d'obtenir des informations sur la démarche à suivre pour remettre à son successeur les éléments relatifs au fonctionnement de la régie, dans les conditions de sécurité et de régularité prévues par les règles comptables ; que cette demande de conseils, formulée le 22 octobre 2008, est confirmée par une attestation du 12 novembre 2008 de la trésorière principale du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont qui précise que la remise de service devait suivre, compte tenu de l'ignorance de la durée d'arrêt de travail de Mme A, la procédure que l'instruction codificatrice applicable prévoit pour la clôture définitive de la gestion du régisseur en place ; que, dès le lendemain, 23 octobre 2008 au matin, Mme A, bien qu'en arrêt maladie, s'est rendue dans son bureau pour remettre les clefs et les codes du coffre ainsi que reconnaître les fonds et valeurs déposés, et ce, en présence du comptable public, de l'ordonnateur et du régisseur suppléant appelé à prendre sa succession ; que, s'il est vrai qu'une transmission plus rapide eût été souhaitable dans l'intérêt de la continuité du service public assuré aux résidents de l'établissement, le centre hospitalier ne justifie pas que ces derniers auraient pâti de l'inaccessibilité de la régie comptable au cours de la brève période comprise entre le départ de l'agent sanctionné et la régularisation de l'installation de son successeur ; qu'il s'en suit que le refus opposé par Mme A était guidé par la volonté de transmettre ces éléments uniquement au régisseur suppléant dans des conditions adéquates en terme de sécurité et de confidentialité ; qu'elle est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que les faits qui lui sont reprochés ont été qualifiés d'entrave au bon fonctionnement de la régie comptable de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes et qu'ils présentaient le caractère d'une faute disciplinaire ;

Considérant, en troisième lieu, que les courriers du 27 août 2008 et du 7 septembre 2008 rédigés par Mme A ne contiennent pas de propos calomnieux ou irrespectueux à l'égard du directeur du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont ; que ce dernier n'est, par suite, pas fondé à soutenir que le tribunal administratif de Lille a, à tort, accueilli le moyen tiré de ce que le dernier motif fondant la sanction en litige était entaché d'inexactitude matérielle des faits ;

Considérant, en dernier lieu, que le seul motif fondant la sanction en litige est celui tiré du refus de Mme A de se soumettre à la procédure de définition de ses attributions et de se conformer aux fiches de poste qui lui ont été adressées ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le directeur du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont aurait pris la même sanction disciplinaire s'il ne s'était fondé que sur ce motif ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Annie A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 décembre 2008, modifiée le 24 avril 2009 prononçant à son encontre la sanction d'exclusion temporaire de fonction d'une durée d'un an, assortie de huit mois de sursis ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

Considérant qu'en vertu des dispositions précitées, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par le centre hospitalier d'Hénin-Beaumont doivent, dès lors, être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le centre hospitalier d'Hénin-Beaumont à verser à Mme A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0900168 du 12 janvier 2011 du tribunal administratif de Lille et la décision du 19 décembre 2008, modifiée le 24 avril 2009, du directeur du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont sont annulés.

Article 2 : Le centre hospitalier d'Hénin-Beaumont est condamné à verser une somme de 1 500 euros à Mme A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus de la requête de Mme A et les conclusions du centre hospitalier d'Hénin-Beaumont sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Annie A et au centre hospitalier d'Hénin-Beaumont.

Copie sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

''

''

''

''

2

N°11DA00442


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11DA00442
Date de la décision : 19/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Motifs. Faits n'étant pas de nature à justifier une sanction.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Patrick Minne
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : DEGANDT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-06-19;11da00442 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award