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27/06/2012 | FRANCE | N°11DA01139

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 27 juin 2012, 11DA01139


Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie et régularisée par la production de l'original le 20 juillet 2011, présentée pour M. Pierre A, demeurant ..., par la SCP Frison et associés, avocat ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000880 du 13 mai 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2010 du maire d'Amiens portant opposition à sa déclaration préalable déposée le 30 décembre 2009 en vue de la recons

truction à l'identique d'un mur mitoyen ;

2°) d'annuler cette décision ;

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Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie et régularisée par la production de l'original le 20 juillet 2011, présentée pour M. Pierre A, demeurant ..., par la SCP Frison et associés, avocat ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000880 du 13 mai 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2010 du maire d'Amiens portant opposition à sa déclaration préalable déposée le 30 décembre 2009 en vue de la reconstruction à l'identique d'un mur mitoyen ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre à la commune d'Amiens de réexaminer sa demande en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Amiens une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hubert Delesalle, premier conseiller,

- les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public,

- et les observations de Me P.-O. Guilmain, avocat de la commune d'Amiens ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SCI Amiens La Croix du Cerf a entrepris des travaux sur la parcelle voisine de celle appartenant à M. A qui ont impliqué la destruction d'un bâtiment adossé à un mur mitoyen ; qu'à la suite de cette démolition, le mur s'est trouvé fragilisé ; que les deux parties ont alors signé le 26 avril 2002 un protocole d'accord qui prévoyait notamment la démolition partielle du mur puis sa reconstruction, à la charge de la société ; que, par une ordonnance du 27 décembre 2002, le président du tribunal de grand instance d'Amiens a donné force exécutoire au protocole ; que la SCI Amiens La Croix du Cerf ayant toutefois tardé à remplir ses obligations, M. A l'a assignée devant le tribunal de grande instance d'Amiens, lequel, par un jugement du 14 septembre 2005, a condamné la SCI Amiens La Croix du Cerf à réaliser ce mur, sous astreinte ; qu'à la suite de ce jugement devenu définitif, M. A a finalement déposé le 30 décembre 2009 un dossier de déclaration préalable de travaux tendant à la reconstruction à l'identique d'un mur mitoyen ; que, par un arrêté du 29 janvier 2010, le maire de la commune d'Amiens a pris un arrêté d'opposition à sa déclaration préalable au motif, d'une part, que l'intéressé ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme et, d'autre part, que les dispositions de l'article UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme approuvé le 22 juin 2006 faisaient obstacle à la réalisation d'un mur d'une hauteur de plus de cinq mètres dès lors qu'elles limitaient à deux mètres la hauteur des clôtures ; que M. A relève appel du jugement du 13 mai 2011 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le mur en cause, qui constituait le mur pignon de l'ancien garage accolé à la propriété de M. A démoli lors de la réalisation des travaux entrepris par la SCI Amiens La Croix du Cerf, ne supporte aucune construction ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment pas du rapport d'expertise établi le 3 décembre 2003 par M. B à la demande du requérant, que l'arasement de ce mur a été à l'origine, même partiellement, des différents désordres et malfaçons occasionnés à son habitation que l'expert impute principalement aux travaux de terrassement en excavation du sous-sol de la résidence ayant pu conduire à un affouillement des fondations de celle-ci ; que, dans ces conditions, ce mur, eu égard à sa nature et à sa destination, ne saurait être regardé comme constituant un bâtiment au sens des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté en litige n'étant pas fondé sur les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, quand bien même il vise ce dernier, le moyen tiré de leur méconnaissance est inopérant ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général " ; que si ces stipulations ne font pas obstacle à l'édiction, par l'autorité compétente, d'une réglementation de l'usage des biens, dans un but d'intérêt général, ayant pour effet d'affecter les conditions d'exercice du droit de propriété, il appartient au juge, pour apprécier la conformité aux stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'une décision individuelle prise sur la base d'une telle réglementation, d'une part, de tenir compte de l'ensemble de ses effets juridiques, d'autre part, et en fonction des circonstances concrètes de l'espèce, d'apprécier s'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les limitations constatées à l'exercice du droit de propriété et les exigences d'intérêt général qui sont à l'origine de cette décision ;

Considérant que l'arrêté du 29 janvier 2010 en litige a été pris en application des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Amiens en vue d'assurer une certaine harmonie dans un secteur de transition ; que s'il fait obstacle à la reconstruction par M. A, sur une hauteur de trois mètres environ, du mur mitoyen entre sa propriété et celle de la SCI Amiens La Croix du Cerf, il n'est pas établi que la conservation de son habitation en serait affectée ; que, dès lors, l'arrêté en litige n'apparaît pas, dans les circonstances de l'espèce, comme portant à l'exercice du droit de propriété de M. A une atteinte disproportionnée au but d'intérêt général qu'il poursuit ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à invoquer une violation des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle " ;

Considérant que si l'exécution d'un jugement, de quelque juridiction que ce soit, doit être considérée comme faisant partie intégrante du " procès " au sens de cet article 6, ce droit s'attache à la seule autorité de chose jugée résultant de ce jugement et ne saurait avoir pour objet ou pour effet, par lui-même, de permettre de déroger aux lois et règlements applicables ; que le jugement du 14 septembre 2005 du tribunal de grande instance d'Amiens devenu définitif s'est borné à trancher un différend d'ordre privé ; que ce jugement n'était revêtu d'aucune autorité de chose jugée à l'égard du maire de la commune d'Amiens dans l'exercice de ses pouvoirs de police de l'urbanisme dès lors, d'une part, que la commune n'y était pas partie et, d'autre part, que, s'agissant des constatations de fait qu'il comporte et qui sont le soutien nécessaire de son dispositif, il n'est pas intervenu en matière pénale ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise sollicitée, que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Amiens, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A le versement à la commune d'Amiens d'une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par elle ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à la commune d'Amiens une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pierre A et à la commune d'Amiens.

Copie sera adressée pour information au préfet de la Somme.

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