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31/07/2012 | FRANCE | N°11DA00906

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 31 juillet 2012, 11DA00906


Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Grégory A, demeurant ..., par Me Degandt, avocate ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905019 du 13 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 juin 2009 par laquelle le directeur général du centre hospitalier régional universitaire de Lille a prononcé son exclusion de fonctions pour une durée de quatre semestres, sans rémunération ;

2°) d'annuler la d

écision attaquée ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional u...

Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Grégory A, demeurant ..., par Me Degandt, avocate ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905019 du 13 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 juin 2009 par laquelle le directeur général du centre hospitalier régional universitaire de Lille a prononcé son exclusion de fonctions pour une durée de quatre semestres, sans rémunération ;

2°) d'annuler la décision attaquée ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional universitaire de Lille la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière, modifiée ;

Vu le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003 relatif aux commissions administratives paritaires locales et départementales de la fonction publique hospitalière, modifié ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Gaspon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- et les observations de Me Degandt, avocate, pour M. A et de Me Bavay, avocat, pour le centre hospitalier régional universitaire de Lille ;

Considérant que M. A, interne en médecine, a fait l'objet d'une sanction d'exclusion de fonctions d'une durée de quatre semestres prononcée, le 12 juin 2009, par le directeur général du centre hospitalier régional universitaire de Lille, en application des articles R. 6153-9 et suivants du code de la santé publique ; que l'intéressé relève appel du jugement du 13 avril 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, si M. A soutient que le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen de droit tiré du défaut d'une procédure disciplinaire équitable et équilibrée, il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges ont complètement répondu au moyen initialement présenté et tiré de la méconnaissance des droits de la défense, en se prononçant sur le caractère suffisamment précis et circonstancié, nonobstant la suppression des noms de leurs auteurs, des documents figurant dans l'exemplaire du dossier individuel consulté par l'intéressé ; que, si le requérant avait entendu soutenir, par un moyen autonome fondé sur la méconnaissance des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que la procédure disciplinaire n'avait pas été équitable et équilibrée en raison du caractère anonyme de certains des documents qui constituaient le dossier remis à sa consultation, le tribunal administratif n'était pas tenu de répondre à ce moyen, inopérant en l'espèce ; que M. A n'est donc pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer ;

Sur le fond :

En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :

Considérant, en premier lieu, que, si M. A soutient qu'au cours de la procédure disciplinaire les droits de la défense ont été méconnus car il n'a pu prendre connaissance que d'un dossier comportant des documents et attestations rendus anonymes et ne comportant aucun élément relatif à sa manière de servir, il ressort des pièces du dossier individuel de l'intéressé que les documents rendus anonymes comportaient les précisions suffisantes permettant à M. A de préparer utilement sa défense ; que, par ailleurs, si le dossier individuel soumis au conseil de discipline doit comporter, en application de l'article 18 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, " toutes les pièces intéressant la situation administrative de l'intéressé " afin de permettre à ce dernier de faire valoir sa manière de servir, le dossier individuel de M. A, interne en médecine stagiaire dont la carrière antérieure était nécessairement courte, comportait un rapport rédigé le 24 février 2009 par le chef de service hospitalier auprès duquel l'intéressé a effectué son dernier stage, entre le mois de novembre 2008 et le mois de février 2009, et portant une appréciation équilibrée et non défavorable sur la manière de servir de l'intéressé ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas eu connaissance de son dossier individuel intégral ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle " ; qu'aux termes de l'article R. 6153-2 du code de la santé publique : " L'interne en médecine ou en pharmacie est un praticien en formation spécialisée " ; qu'il résulte des dispositions combinées des articles 81 de la loi du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière et R. 6153-29 du code de la santé publique, que la sanction d'exclusion temporaire pour une durée ne pouvant excéder cinq ans peut être infligée à un interne en médecine ; que cette sanction est susceptible de porter atteinte à l'exercice du droit, de caractère civil, d'exercer les fonctions d'interne en médecine, dès lors que lesdites attributions d'interne ne comportent pas de participation à l'exercice de la puissance publique et aux fonctions visant à sauvegarder les intérêts généraux de l'Etat ou des autres personnes publiques ; que, toutefois, en application des articles R. 6153-30, R. 6153-31 et R. 6153-39 du code de la santé publique, le conseil de discipline ne peut transmettre à l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qu'une proposition de sanction ; que, par suite, dès lors que le conseil de discipline émet un simple avis, l'agent faisant l'objet de la procédure disciplinaire ne peut utilement soutenir que les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :

Considérant, en premier lieu, que la règle du non cumul des peines fait obstacle à ce qu'un même fait isolé ou un même comportement continu constitue le fondement de deux peines successives ; que la décision en cause est fondée sur des faits nouvellement portés à la connaissance de l'administration, résultant, d'une part, du comportement de l'intéressé envers une étudiante aide-soignante, entre la fin du mois de janvier et la fin du mois de février 2009, et, d'autre part, du comportement de M. A envers une patiente hospitalisée à partir du 17 août 2008, révélé dans un courrier que cette dernière a adressé au centre hospitalier de Lille le 30 mars 2009 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ces faits aient constitué le fondement du blâme infligé à l'intéressé le 13 novembre 2008 ; que, par suite, le principe de non cumul des peines à raison d'un même fait n'a pas été méconnu par l'autorité disciplinaire ;

Considérant, en second lieu, qu'il est constant que M. A a eu, dans l'exercice de ses fonctions d'interne en médecine, des comportements inappropriés et déplacés envers une étudiante aide-soignante qui effectuait un stage et une patiente hospitalisée en urgence ; que, compte tenu du comportement antérieur de M. A, qui avait fait l'objet pour des faits similaires d'un blâme en novembre 2008, et de sa qualité d'interne en médecine, la sanction d'exclusion temporaire de deux ans, qui ne constitue pas la sanction la plus lourde prévue par l'article R. 6153-29 du code de la santé publique, n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 13 avril 2011, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. A doivent, dès lors, être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. A à payer au centre hospitalier régional universitaire de Lille une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera au centre hospitalier régional universitaire de Lille la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions du centre hospitalier régional universitaire de Lille est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Grégory A et au centre hospitalier régional universitaire de Lille.

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N°11DA00906

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N° "Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11DA00906
Date de la décision : 31/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Motifs - Faits de nature à justifier une sanction.

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Procédure - Conseil de discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Olivier Gaspon
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : DEGANDT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-07-31;11da00906 ?
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