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13/08/2012 | FRANCE | N°11DA01393

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 13 août 2012, 11DA01393


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 19 août 2011, présentée pour la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, représentée par son maire en exercice, par Me M.-C. Dutat, avocat ; la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0903268-0905784 du 23 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé, à la demande de la SA Vermeulen Matériaux, les arrêtés des 26 mars et 7 août 2009 par lesquels son maire a refusé de délivrer à cette société un permis de construire pour la reconstruction d'une

habitation située au n° 38 du chemin des rives ;

2°) de rejeter les dem...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 19 août 2011, présentée pour la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, représentée par son maire en exercice, par Me M.-C. Dutat, avocat ; la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0903268-0905784 du 23 juin 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé, à la demande de la SA Vermeulen Matériaux, les arrêtés des 26 mars et 7 août 2009 par lesquels son maire a refusé de délivrer à cette société un permis de construire pour la reconstruction d'une habitation située au n° 38 du chemin des rives ;

2°) de rejeter les demandes de première instance de la SA Vermeulen Matériaux ;

3°) de mettre à la charge de la SA Vermeulen Matériaux la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Agnès Eliot, premier conseiller,

- les conclusions de M. Xavier Larue, rapporteur public,

- et les observations de Me Q. Leclerc-Lemaître, substituant Me M.-C. Dutat, avocat de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, et Me M. Ricaut-Dussarget, avocat de la société Vermeulen Matériaux ;

Considérant que la société Vermeulen Matériaux a déposé auprès de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, le 27 janvier 2009, une demande de permis de construire pour la reconstruction d'une maison à usage d'habitation située au n° 38 du chemin des rives, à proximité d'un site industriel dont elle est propriétaire ; que, par un premier arrêté en date du 26 mars 2009, le maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE a rejeté cette demande ; que, par un second arrêté en date du 7 août 2009, la même autorité, tout en prononçant le retrait de l'arrêté du 26 mars 2009, a de nouveau refusé de délivrer à la société pétitionnaire le permis de construire sollicité ; que la COMMUNE DE SAILLY- LABOURSE relève appel du jugement en date du 23 juin 2011 du tribunal administratif de Lille qui a annulé, à la demande de la société Vermeulen Matériaux, ces deux arrêtés ;

Sur la légalité de l'arrêté du 26 mars 2009 :

Considérant que l'arrêté litigieux en date du 26 mars 2009 par lequel le maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE a rejeté la demande de permis de construire de la société Vermeulen Matériaux est fondé exclusivement sur les articles L. 111-4 et R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, lorsque l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation ;

Considérant que le refus de permis de construire contesté repose, notamment, sur l'insuffisance du réseau de distribution d'énergie électrique et sur l'impossibilité de l'autorité compétente d'indiquer dans quel délai et par quel concessionnaire les travaux de distribution d'électricité nécessaires pourront être exécutés pour assurer la desserte du projet ; qu'à supposer même que l'insuffisance du réseau dont il s'agit puisse être tenue pour établie, il est constant que le maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE n'a pas, avant de prendre cette décision, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation ; que, dès lors, le motif de la décision attaquée, qui repose sur les dispositions de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, est entaché d'illégalité ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme alors applicable : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique " ;

Considérant que la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE a motivé l'arrêté attaqué par la circonstance que le projet de construction en litige se situe dans un secteur de la commune non couvert par un réseau de défense incendie et porte ainsi atteinte à la sécurité publique ; qu'il ressort toutefois du procès-verbal de constat d'huissier produit par la société Vermeulen Matériaux, non contesté par l'autorité administrative sur ce point, que la parcelle en cause est desservie par un hydrant situé à une distance de 286 mètres de celle-ci ; que, contrairement à ce que soutient la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, la circulaire interministérielle n° 465 du 10 décembre 1951 sur la sécurité incendie, complétée par la circulaire du 9 août 1967 du ministère de l'agriculture, à la supposer opposable, n'impose pas une distance maximale de 200 mètres entre les habitations et les bornes incendie ; qu'il ressort, par ailleurs, d'un courrier adressé à la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, le 23 juillet 2008, par le centre d'incendie et de secours de Noeux-les-Mines, que l'équipement de défense contre l'incendie existant à proximité de la parcelle litigieuse est conforme à la réglementation ; que, dans ces conditions, le maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, qui se borne à alléguer, dans la présente instance, sans précision suffisante, qu'en l'absence d'une réserve d'eau et compte tenu de la nécessité de disposer d'une pression et d'un débit suffisants, la distance de 286 mètres séparant l'immeuble projeté et l'hydrant le plus proche de celui-ci ne permet pas d'assurer une défense incendie satisfaisante, n'a pu, pour ce motif, sans commettre d'erreur d'appréciation, refuser de délivrer, à la société pétitionnaire, le permis de construire une maison d'habitation individuelle sollicité par la société Vermeulen Matériaux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté attaqué ;

Sur la légalité de l'arrêté du 7 août 2009 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme issu de l'article 37 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier " ; qu'en vertu de ces dispositions il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un permis de construire en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation ; que, dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ; que, dans le cas où il estime, en revanche, qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens ; qu'il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges ;

Considérant que le maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, pour prendre son arrêté en date du 7 août 2009, s'est fondé sur la circonstance que le projet litigieux consistait en une construction nouvelle, laquelle, en l'espèce, en vertu des dispositions des articles L. 111-4 et R. 111-2 du code de l'urbanisme, d'une part, et des articles N1 et N6 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, d'autre part, ne pouvait être autorisée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié " ;

Considérant que le projet présenté par la société Vermeulen Matériaux porte sur la démolition des murs et toitures d'une maison de 97 m² anciennement dévalisée et pillée et la reconstruction de celle-ci sur les fondations existantes ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier, et notamment de la demande de permis de construire litigieuse, que les travaux envisagés par la société pétitionnaire seront réalisés avec des matériaux différents de ceux utilisés lors de la construction du bâtiment initial et prévoient surtout, par rapport à celui-ci, l'ajout d'une terrasse prenant appui sur une dalle de béton, réalisée à cet effet, d'une surface d'environ 70 m² en prolongement de la façade arrière de la maison d'habitation et d'un de ses côtés ; que, par suite, compte tenu des dimensions et de la nature des modifications apportées au bâtiment d'origine, ledit projet ne saurait être regardé comme la reconstruction d'un bâtiment à l'identique au sens des dispositions de l'article L. 111-3 précité ; qu'il suit de là que le maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE n'a pas fait une appréciation erronée de ces dispositions en qualifiant le projet de la société Vermeulen Matériaux, de construction nouvelle ; que, par suite, la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE est fondée à soutenir que c'est à tort que, pour annuler son permis de construire du 7 août 2009, le tribunal administratif a retenu que le projet ne portait pas sur une construction nouvelle mais sur une simple reconstruction;

Considérant qu'aux termes de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE : " Dans les espaces inondables sont interdits : 1) toute construction nouvelle et toute création de sous-sol pour les constructions existantes " ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit, que le projet de construction litigieux consiste en une construction nouvelle, laquelle, en vertu des dispositions de l'article N1 du plan local d'urbanisme précité est interdite dans les zones inondables ; que, par suite, dès lors qu'il est constant que la construction en cause est située dans la zone Nsi correspondant à un secteur inondable du territoire de la commune, le maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE était tenu, pour ce seul motif, de refuser le permis de construire sollicité par la société pétitionnaire ; que les moyens soulevés par cette dernière à l'encontre de l'arrêté attaqué portant refus de permis de construire sont, dans ces conditions, inopérants ; que, par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a, pour annuler le permis de construire du 7 août 2009, également retenu les moyens tirés de la violation tant de l'article L. 111-4 que de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les parties tant devant la cour que devant le tribunal administratif de Lille ;

Considérant que, le maire de la commune étant, ainsi qu'il a été dit, en compétence liée, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte est inopérant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement, que la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté contesté du 7 août 2009 ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de la SA Vermeulen Matériaux le versement à la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE la somme que demande la SA Vermeulen Matériaux au titre des frais de même nature ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille en date du 23 juin 2011, en tant qu'il a annulé l'arrêté du maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE en date du 7 août 2009, est annulé.

Article 2 : La demande de la SA Vermeulen Matériaux tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE en date du 7 août 2009 est rejetée.

Article 3 : La SA Vermeulen Matériaux versera à la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SAILLY-LABOURSE, à la SA Vermeulen Matériaux et au ministre de l'égalité des territoires et du logement.

Copie sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais et, en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Béthune.

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N°11DA01393


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: Mme Agnès Eliot
Rapporteur public ?: M. Larue
Avocat(s) : SCP DUTAT-LEFEVRE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Date de la décision : 13/08/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11DA01393
Numéro NOR : CETATEXT000026311404 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-08-13;11da01393 ?
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