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05/03/2015 | FRANCE | N°13DA01049

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 05 mars 2015, 13DA01049


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juillet 2013 et 24 juillet 2013, présentés pour la SNC (société en nom collectif) Emile Benoît et Cie, dont le siège est 111 place des Déportés à Flesselles (80260), par Me Jean-Claude Broutin ;

La SNC Emile Benoît et Cie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102226 du 30 avril 2013 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'après avoir limité à l'article 1er le montant de la condamnation due par l'Etat à la somme de 6 401,30 euros, il a, par l'article 2, rejeté le surpl

us de ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la so...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juillet 2013 et 24 juillet 2013, présentés pour la SNC (société en nom collectif) Emile Benoît et Cie, dont le siège est 111 place des Déportés à Flesselles (80260), par Me Jean-Claude Broutin ;

La SNC Emile Benoît et Cie demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102226 du 30 avril 2013 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'après avoir limité à l'article 1er le montant de la condamnation due par l'Etat à la somme de 6 401,30 euros, il a, par l'article 2, rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 812 291,76 euros en réparation des préjudices subis ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Perrine Hamon, rapporteur public,

- et les observations de Me Jean-Claude Broutin, avocat de la SNC Emile Benoît et Cie ;

1. Considérant que la SNC Emile Benoît et Cie, propriétaire d'un ensemble immobilier cadastré AB 111, 112 et 116 à 118, situé à Amiens, l'a donné en location à la société Germain Benoît Benoît et Cie qui y a exploité, jusqu'à son dépôt de bilan en 2004, une activité de teinturerie relevant du régime des installations classées pour la protection de l'environnement ; que, par un arrêté du 13 juin 2007, le préfet de la Somme a prescrit au liquidateur judiciaire, chargé d'effectuer la dépollution du site, diverses mesures d'urgence et de mise en sécurité, dont la bonne exécution a été constatée le 30 septembre 2010 ; qu'informé par la société propriétaire de son projet de reconversion du site en un ensemble immobilier résidentiel, le préfet a imposé à l'exploitant, par un arrêté du 18 octobre 2007, d'établir un schéma conceptuel, un plan de gestion du site, et lui a prescrit d'assurer la surveillance des eaux souterraines ; que les études réclamées ayant été produites, le préfet de la Somme a toutefois sollicité le 2 avril 2008 des précisions complémentaires qui lui ont été fournies en janvier et octobre 2009, puis en janvier 2011 ; que, saisi par la SNC Emile Benoît et Cie, le tribunal administratif d'Amiens n'a que très partiellement fait droit à la demande indemnitaire de la société en condamnant l'Etat à lui verser la somme de 6 401,30 euros en raison de la faute consistant à avoir tardé à constater la dépollution du site ; que la société, qui relève partiellement appel de ce jugement, demande à la cour de prononcer sa réformation et sollicite le versement de la somme de 812 291,76 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis ; que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à titre principal de rejeter la requête d'appel comme irrecevable et, à titre subsidiaire, présente un appel incident par lequel il conteste le principe même de la responsabilité de l'Etat ;

2. Considérant qu'en cause d'appel, la société soutient détenir les justificatifs des dépenses dont le tribunal administratif a refusé l'indemnisation au motif notamment qu'elle n'établissait pas l'étendue de son préjudice ; que, dans ces conditions, la requête de la SNC Emile Benoît et Cie présente, au moins à cet égard, une motivation suffisante qui fait obstacle à ce qu'il soit fait droit à la fin de non-recevoir tirée d'un défaut de motivation opposée à titre principal par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; que, dès lors, il appartient à la cour de se prononcer sur l'appel incident soulevé à titre subsidiaire par le ministre et qui tend à l'annulation de l'article 1er du jugement par lequel le tribunal administratif a prononcé la condamnation de l'Etat ;

3. Considérant que, devant le tribunal administratif d'Amiens, la SNC Emile Benoît et Cie a recherché, sur le fondement de la responsabilité pour faute ou sans faute de l'Etat, la réparation des préjudices correspondant à la réparation de la perte de loyers, au paiement de taxes foncières et de primes acquittées au titre de polices d'assurances et aux frais de gardiennage et de surveillance supportés principalement entre 2011 et fin 2012, ainsi qu'au coût des travaux de mise en sécurité du site ; que le tribunal y a fait droit à hauteur de 600,99 euros au titre des frais de gardiennage et de 5 800,31 euros au titre des frais de mise en sécurité du site ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les frais de mise en sécurité du site n'ont été rendus nécessaires que par l'état de dégradation avancé des bâtiments et les risques qu'ils font courir à la sécurité, indépendamment de toute pollution ; qu'ils sont, dès lors, sans lien avec la responsabilité de l'Etat qui est recherchée au titre de la remise en état du site liée à sa pollution ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a rejeté cette demande d'indemnisation ;

5. Considérant que s'il est constant que la procédure de remise en état du site s'est prolongée sur plusieurs années, cette situation trouve principalement sa cause dans l'attitude de l'exploitant ; qu'à supposer que les agissements de l'administration aient pu contribuer en partie à un retard, la société n'apporte pas d'éléments permettant de constater qu'elle aurait dû repousser, du fait des agissements ou de l'inertie de l'administration, le lancement d'un projet effectif de programme immobilier dans l'attente des derniers résultats portant sur les conditions de la remise en état du site ; que, dès lors, les primes acquittées au titre des polices d'assurances, et les frais de gardiennage et de surveillance du site, qui sont des charges qui incombent en principe au propriétaire ou à l'exploitant et ne présentent, en outre, aucun caractère d'anormalité, sont sans lien avec une éventuelle responsabilité de l'Etat ; que, par suite, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu que la société pouvait être indemnisée, même partiellement des frais de gardiennage ; qu'en outre, la société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande faite au titre du remboursement des frais d'assurance ;

6. Considérant que les pertes de loyers ont directement pour origine la cessation de l'exploitation et non l'activité de l'Etat ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a rejeté cette demande d'indemnisation ;

7. Considérant que les frais afférents aux taxes foncières incombent au propriétaire en cette qualité ; que, par suite, la SNC Emile Benoît et Cie, qui a la qualité du propriétaire du site et a décidé de ne pas revendre son bien, ne peut se prévaloir de l'existence d'un préjudice de ce chef ; que, par suite, la société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande sur ce point ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a condamné l'Etat à verser à la société requérante la somme de 6 401,30 euros ; qu'en revanche, la SNC Emile Benoît et Cie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 de son jugement, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires ; que, par voie de conséquence, les conclusions d'appel présentées par la SNC Emile Benoît et Cie sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du 30 avril 2013 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : La requête de la SNC Emile Benoît et Cie est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Emile Benoît et Cie et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Somme.

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N°13DA01049


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-01-03 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Préjudice. Caractère direct du préjudice.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: Mme Hamon
Avocat(s) : BROUTIN

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Date de la décision : 05/03/2015
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13DA01049
Numéro NOR : CETATEXT000030322561 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-03-05;13da01049 ?
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