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05/03/2015 | FRANCE | N°14DA00720

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 05 mars 2015, 14DA00720


Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2014, présentée pour M. C...D..., demeurant..., par Me David Ayele ; M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400656 du 4 mars 2014 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen par lequel a été rejetée sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2014 du préfet de l'Oise l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant la Roumanie comme pays à destination duquel pourrait être exécutée d'office cette mesure d'éloignement ;
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3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer un ...

Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2014, présentée pour M. C...D..., demeurant..., par Me David Ayele ; M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400656 du 4 mars 2014 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen par lequel a été rejetée sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2014 du préfet de l'Oise l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant la Roumanie comme pays à destination duquel pourrait être exécutée d'office cette mesure d'éloignement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à tout le moins, de réexaminer sa situation ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Daniel Mortelecq, président,

- les observations de Me David Ayele, avocat de M. D...;

1. Considérant que M.D..., ressortissant congolais né le 20 mars 1972 à Brazzaville, serait entré en France le 16 mai 2009, selon ses propres déclarations ; qu'après s'être vu refuser la qualité de réfugié par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 novembre 2009, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 25 novembre 2010, il a obtenu la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", en raison de son état de santé, valable du 6 janvier 2011 au 5 juillet 2011 ; qu'il est parti en Roumanie en 2012, pays dans lequel il est légalement admissible, et est revenu en France en 2013, toujours selon ses propres déclarations ; que, le 28 février 2014, il a été interpellé dans un train alors qu'il était dépourvu de titre de séjour ; que le préfet de l'Oise l'a, par un arrêté du même jour, obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a fixé la Roumanie comme pays à destination duquel pourrait être exécutée d'office cette mesure d'éloignement ; que M. D...relève appel du jugement du 4 mars 2014 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen par lequel a été rejetée sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des termes de la décision attaquée que le préfet de l'Oise se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation personnelle de M. D...;

4. Considérant, en troisième lieu, que, lorsque le préfet de l'Oise a pris à l'encontre de M. D...l'obligation de quitter le territoire français contestée, ce dernier était placé en retenue puis en rétention, en application des dispositions de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'au cours de cette période, M.D..., qui a déclaré comprendre le français, a été entendu sur les conditions de son séjour sur le territoire français ainsi que sur sa situation personnelle et familiale ; qu'ainsi, M. D...n'a pas été privé de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de cette décision ; que, par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par le droit de l'Union et l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, n'a pas été méconnue ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 511-1 de ce code : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté dans les mêmes conditions que celles qui sont prévues aux trois premiers alinéas de l'article R. 313-22 " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) Le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...). L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre de la santé au vu d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, dès lors qu'elle dispose d'éléments d'information suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie qu'elle prévoit des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire, l'autorité préfectorale doit, lorsqu'elle envisage de prendre une telle mesure à son égard, et alors même que l'intéressé n'a pas sollicité le bénéfice d'une prise en charge médicale en France, recueillir préalablement l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

6. Considérant qu'il est constant que M. D...n'a fait part à aucun moment, après son interpellation et jusqu'à l'édiction de la décision contestée l'obligeant à quitter le territoire français, de problèmes de santé ; qu'au demeurant, il est également constant qu'il a même refusé la consultation d'un médecin durant sa retenue et sa rétention ; que le certificat médical rédigé par le Dr A...B...le 4 août 2012, dont il se prévaut, ne permet pas de conclure que le préfet de l'Oise en ait été informé à la date de la décision contestée, ni que le syndrome post-traumatique dont il est fait état ait perduré jusqu'à cette date ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Oise, qui ne peut pas être regardé comme ayant disposé d'élément précis pouvant lui faire penser que l'état de santé de M. D...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, n'a ni commis d'irrégularité de procédure en ne demandant pas au médecin de l'agence régionale de santé de se prononcer sur l'état de santé de l'intéressé, ni méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que, si M. D...soutient qu'une partie importante de sa famille réside en France, dont certains membres ont la nationalité française, il n'établit pas la réalité et l'intensité des liens familiaux qu'il nouerait avec ces parents, ni que sa présence effective et permanente leur serait indispensable ; qu'en revanche, il n'est pas sérieusement contesté qu'il n'est pas dépourvu d'attaches hors de France, notamment avec son épouse et ses deux enfants ; que, dans ces conditions, sans que M. D...puisse utilement se prévaloir d'une activité professionnelle épisodique en France, la décision contestée du préfet de l'Oise n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue duquel elle a été prise ; que, par suite, cette décision n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. D...;

Sur le pays de renvoi :

9. Considérant que M. D...ne conteste pas être admissible en Roumanie, pays à destination duquel le préfet de l'Oise a ordonné que pourrait être exécutée d'office la mesure d'éloignement prise à son encontre ; qu'il se borne à soutenir que cette décision fixant le pays de destination serait contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle ; que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés aux points 7. et 8. du présent arrêt, ces moyens ainsi invoqués par M. D...doivent être écartés ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de l'Oise.

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N°14DA00720


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne - Droit au respect de la vie privée et familiale.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Daniel Mortelecq
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : AYELE

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quater)
Date de la décision : 05/03/2015
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 14DA00720
Numéro NOR : CETATEXT000030322631 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-03-05;14da00720 ?
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