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05/03/2015 | FRANCE | N°14DA01030

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 05 mars 2015, 14DA01030


Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2014, présentée pour Mme A...D...épouseE..., demeurant..., par Me C...B...; Mme E... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400678 du 27 mai 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 février 2014 du préfet de l'Oise lui refusant une autorisation provisoire de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Tchad comme pays à destination duquel pourrait être exécutée d'office cette mesure d'éloignement

et, ensemble, la décision du 28 février 2014 rejetant le recours gracieux f...

Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2014, présentée pour Mme A...D...épouseE..., demeurant..., par Me C...B...; Mme E... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400678 du 27 mai 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 février 2014 du préfet de l'Oise lui refusant une autorisation provisoire de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Tchad comme pays à destination duquel pourrait être exécutée d'office cette mesure d'éloignement et, ensemble, la décision du 28 février 2014 rejetant le recours gracieux formé contre ce refus ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Daniel Mortelecq, président ;

1. Considérant que MmeE..., ressortissante tchadienne née le 21 mars 1986, relève appel du jugement du 27 mai 2014 du tribunal administratif d'Amiens par lequel a été rejetée sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 février 2014 du préfet de l'Oise lui refusant une autorisation provisoire de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Tchad comme pays à destination duquel pourrait être exécutée d'office cette mesure d'éloignement et, ensemble, la décision du 28 février 2014 rejetant le recours gracieux formé contre ce refus ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande en application de celles-ci, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'enfant mineur intéressé et, en particulier, d'apprécier la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'enfant mineur intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

3. Considérant que Mme E...est la mère d'une fille, prénommée Shayma née le 20 août 2012, laquelle est atteinte d'une maladie génétique grave, la drépanocytose homozygote ; que la requérante est spécialement venue en France le 24 octobre 2012 faire soigner sa fille, laissant son mari et ses trois autres enfants au Tchad ; que Mme E...a obtenu une autorisation provisoire de séjour le 5 avril 2013, renouvelée le 21 octobre 2013 et valable jusqu'au 20 janvier 2014 ; que le préfet de l'Oise a, par l'arrêté contesté, refusé à l'intéressée le renouvellement de son autorisation de séjour et lui a ordonné de quitter le territoire français à destination du Tchad dans un délai de trente jours ; que, dans le cadre de l'instruction de cette demande de renouvellement d'autorisation provisoire de séjour, le médecin de l'agence régionale de santé de Picardie a émis un avis, le 10 décembre 2013, selon lequel l'état de santé de la fille de Mme E...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner, pour elle, des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existait au Tchad un traitement approprié pour cette prise en charge médicale ; que, toutefois, cette dernière appréciation du médecin de l'agence régionale de santé de Picardie est manifestement contredite par plusieurs pièces du dossier, notamment celles produites pour la première fois en appel et relatives à la situation sanitaire du Tchad à la date de l'arrêté attaqué ; qu'ainsi, dans un certificat du 5 juin 2014, le professeur Mariane de Montalembert, professeur associé du service de pédiatrie générale de l'hôpital Necker à Paris, indique explicitement que la maladie en cause s'accompagne d'un risque majeur de diverses complications et qu'il n'existe pas de traitement approprié au Tchad ; que, dans un certificat du 5 juin 2014, le docteur Philippe Trevise, médecin du service de pédiatrie et de néonatologie du centre hospitalier intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges, souligne l'absence de possibilité thérapeutique au Tchad ; que, dans un certificat du 9 juin 2014, le docteur Khadidja Attimer, directeur de la pédiatrie de l'hôpital de la mère et de l'enfant à Ndjamena (Tchad), précise que le plateau technique du Tchad est insuffisant pour assurer un suivi rigoureux de la maladie en cause ; que, dans ces conditions, c'est à tort et en méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 311-12 et L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet de l'Oise a refusé à Mme E...le renouvellement de l'autorisation provisoire de séjour qu'elle sollicitait ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme E...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que, par suite, le jugement, l'arrêté et la décision attaqués doivent être annulés ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de l'Oise délivre à MmeE..., sous réserve d'un changement dans sa situation de droit ou de fait, une autorisation provisoire de séjour ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Oise d'y procéder dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400678 du tribunal administratif d'Amiens du 27 mai 2014, l'arrêté du 7 février 2014 du préfet de l'Oise et la décision du 28 février 2014 de ce dernier sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Oise de délivrer à MmeE..., sous réserve d'un changement dans sa situation de droit ou de fait, une autorisation provisoire de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...épouseE..., au ministre de l'intérieur et au préfet de l'Oise.

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N°14DA01030


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 14DA01030
Date de la décision : 05/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Daniel Mortelecq
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : SCP FRISON ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-03-05;14da01030 ?
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