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19/03/2015 | FRANCE | N°14DA00614

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 19 mars 2015, 14DA00614


Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2014, présentée par le préfet de l'Oise qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400845 du 21 mars 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a, à la demande de M. B...A..., annulé son arrêté du 18 mars 2014 obligeant l'intéressé à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination et, par voie de conséquence, son arrêté du même jour ordonnant le placement de l'intéressé en rétention administrative ainsi qu'au prononcé d'une injonction ; <

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2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif ...

Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2014, présentée par le préfet de l'Oise qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400845 du 21 mars 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a, à la demande de M. B...A..., annulé son arrêté du 18 mars 2014 obligeant l'intéressé à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination et, par voie de conséquence, son arrêté du même jour ordonnant le placement de l'intéressé en rétention administrative ainsi qu'au prononcé d'une injonction ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif ;

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur ;

Sur le bien-fondé du moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Rouen :

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ;

2. Considérant que l'arrêté par lequel le préfet de l'Oise a pris la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français, en relevant que l'intéressé ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, et en visant le 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, comporte l'exposé des faits et des considérations de droit sur lequel il s'est fondé ; que cet arrêté est ainsi suffisamment motivé au regard des exigences posées par ce même article ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur le motif tiré de l'insuffisance de motivation pour annuler sa décision du 18 mars 2014 faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français et, par voie de conséquence, les décisions du même jour refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination et l'arrêté du même jour ordonnant le placement de l'intéressé en rétention administrative ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Oise n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé ;

6. Considérant que M.A..., ressortissant nigérian, né le 7 avril 1978, déclare, sans l'établir, être entré en France quatre ans avant la date de la décision attaquée ; qu'il est constant qu'il n'a pas d'enfant à charge ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A...aurait tissé en France des liens amicaux ; que, selon ses propres déclarations, il n'est pas dépourvu de toutes attaches familiales hors de France ; que la relation de concubinage dont il se prévaut avec une ressortissante espagnole depuis le mois d'avril 2012 n'est pas établie de manière suffisamment probante par la seule attestation, peu circonstanciée, de cette dernière ; que les démarches qu'ils allèguent avoir accomplies en vue de leur mariage ne sont pas davantage établies par les pièces du dossier ; qu'ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour de M. A...en France, le préfet de l'Oise n'a pas, en l'obligeant à quitter le territoire français, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes raisons, la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A...;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité ;

Sur l'absence de délai de départ volontaire :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire n'est pas dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision obligeant M. A...à quitter le territoire français ;

9. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) " ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que M. A..., n'a pas déféré à la précédente obligation de quitter le territoire français dont il avait fait l'objet, dans le délai de trente jours qui lui était fixé ; qu'il entrait, dès lors, dans le champ du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'intéressé n'a pas été en mesure de produire des documents d'identité ou de voyage en cours de validité ; qu'il entrait ainsi également dans le champ du f) des mêmes dispositions ; que, dès lors, en fondant la décision contestée sur les dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Oise n'a pas entaché sa décision d'une erreur de droit ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire est entachée d'illégalité ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'acte attaqué manque en fait et doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que la décision fixant le pays de destination n'est pas dépourvue de base légale à raison de l'illégalité de la décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire français ;

14. Considérant que si M. A...fait valoir qu'il a fui son pays pour échapper aux persécutions qu'il aurait subies du fait de sa conversion au christianisme, il ressort de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 18 avril 2011 que les déclarations de l'intéressé sur ce point " n'ont comporté aucun élément circonstancié et crédible " ; qu'il n'apporte aucun élément probant de nature à établir que sa vie serait personnellement menacée au Nigeria ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision désignant le Nigeria comme pays de renvoi, des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

15. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A...serait dans l'impossibilité de poursuivre une vie privée et familiale dans son pays d'origine ; que, par, suite, la décision fixant le Nigeria comme pays de destination ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est entachée d'illégalité ;

Sur l'arrêté ordonnant le placement en rétention administrative :

17. Considérant que l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de l'acte attaqué manque en fait et doit être écarté ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 7 que la décision ordonnant le placement de l'intéressé en rétention administrative n'est pas dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

19. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois. " ;

20. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui ne dispose pas d'un domicile stable, est démuni de tout document d'identité ou de voyage en cours de validité ; qu'il ne présente donc pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir tout risque de fuite pour l'application de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le préfet de l'Oise pouvait, sans commettre d'erreur d'appréciation, ordonner le placement en rétention administrative de M.A... ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision ordonnant le placement en rétention administrative est entachée d'illégalité ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 18 mars 2014 portant obligation de quitter le territoire français sans délai et l'arrêté du même jour ordonnant le placement de l'intéressé en rétention administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 21 mars 2014 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...A....

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00614
Date de la décision : 19/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Nizet
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: Mme Hamon

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-03-19;14da00614 ?
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