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12/11/2015 | FRANCE | N°14DA00373

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 12 novembre 2015, 14DA00373


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Energieteam, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 23 juin 2011 par lesquels le préfet de la Somme a refusé de lui délivrer un permis de construire six éoliennes et un poste de livraison électrique sur les communes de Bernay et de Forest-Montiers (Somme).

Par un jugement n° 1102425 du 10 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

:

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 février 2014 et 30 septembre 2015, la so...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Energieteam, société à responsabilité limitée, a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 23 juin 2011 par lesquels le préfet de la Somme a refusé de lui délivrer un permis de construire six éoliennes et un poste de livraison électrique sur les communes de Bernay et de Forest-Montiers (Somme).

Par un jugement n° 1102425 du 10 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 février 2014 et 30 septembre 2015, la société Energieteam, représentée par Me D...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés préfectoraux du 23 juin 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Somme de lui délivrer un permis de construire pour chacun des aérogénérateurs et le poste de livraison électrique dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence, en s'estimant lié par les avis et rapports établis par Météo France ;

- il a commis une erreur de droit en se fondant sur un périmètre de prévention et une distance d'éloignement qui ne sont fixés par aucune disposition législative ou réglementaire ;

- l'implantation du parc éolien envisagé n'était pas de nature à compromettre la sécurité et le bon fonctionnement du radar météo d'Abbeville.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2015, le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hadi Habchi, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me B...C..., représentant la société Energieteam.

1. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment pas des termes des arrêtés du 23 juin 2011, que le préfet de la Somme se serait estimé lié par l'avis de Météo France du 27 janvier 2011 ou par les rapports émanant de l'Agence nationale des fréquences (ANFR), ni qu'il n'aurait pas procédé à un examen particulier des demandes qui lui étaient soumises, après avoir recueilli l'ensemble des avis requis ;

2. Considérant que la zone de coordination, comprise entre 5 et 20 kilomètres autour du lieu d'implantation d'un radar fonctionnant en mode doppler, préconisé par l'Agence nationale des fréquences, ne constitue pas par elle-même une servitude qui serait en outre érigée, comme il est soutenu, sans texte, mais un dispositif technique destiné à permettre d'évaluer, dans un secteur de vulnérabilité, les perturbations susceptibles d'affecter le fonctionnement d'un radar au regard de ses missions et de l'implantation des aérogénérateurs ; qu'il s'ensuit que l'intervention des refus de permis de construire litigieux n'a été subordonnée ni par la définition préalable d'un tel périmètre, ni par d'autres dispositions législatives ou réglementaires que celles prévues à l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; que, par suite, la société Energieteam n'est pas fondée à soutenir que le préfet a entaché ses décisions de refus d'une erreur de droit ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations " ;

4. Considérant qu'il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent ;

5. Considérant qu'il ressort des termes du rapport du 19 septembre 2005 et du guide du 3 juillet 2007 établis par la commission consultative de la compatibilité électromagnétique de l'ANFR, que les pièces fixes ou mobiles massives des éoliennes provoquent passivement une dégradation des performances des radars lorsqu'elles sont dans leur rayon de visibilité radioélectrique, par la création d'échos parasites ou " faux échos " susceptibles de détériorer, notamment, les données doppler recueillies par les radars, et de les rendre inexploitables ; que, d'ailleurs, la société Energieteam ne conteste pas que les éoliennes, de par le mouvement de rotation des pales, provoquent des phénomènes de distorsion de réception et de mesures des vents ; que l'ANFR préconise, en vue d'éviter une perturbation majeure du fonctionnement des radars, de subordonner leur installation au respect d'une distance dite " de coordination " de 5 à 20 kilomètres et de veiller à ce que la zone d'impact doppler des éoliennes n'excède pas 10 kilomètres et, dans le cas d'implantation de plusieurs parcs éoliens, à ce que leurs zones d'impact respectives, autour d'un même radar, soient espacées de plus de 10 kilomètres ;

6. Considérant que la société Energieteam projette de construire sur le territoire des communes de Bernay et de Forest-Montiers un parc comportant six éoliennes, composées chacune de trois pales de 71 m placées sur un fût de 100 m de haut ; qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que la plus proche d'entre elles se situe à 15,1 km du radar météorologique d'Abbeville, soit au-delà de la zone d'exclusion de 5 km de ce radar en bande C et, d'autre part, que l'ensemble du parc est à l'intérieur de sa zone de coordination de 20 km ; qu'en outre, le projet litigieux est situé en visibilité directe de ce radar ; qu'il ressort des pièces versées au dossier, notamment de l'avis de Météo France du 27 janvier 2011, que les éoliennes en cause sont implantées à une distance inférieure à 10 km des parcs éoliens de Gueschart et de Vron déjà autorisés, cette circonstance étant de nature à provoquer des échos parasites non filtrables et une perte de 60 % de données, susceptibles de dégrader fortement les performances du radar d'Abbeville ; que la société Energieteam, qui se borne à soutenir que le respect de telles distances constitue de simples recommandations, n'apporte aucun élément probant de nature à remettre en cause la validité des éléments scientifiques sur lesquels elles sont fondées ; que la méthode de calcul de la " surface équivalent radar " qu'elle critique, sans autre précision utile, est couramment utilisée par les organismes spécialisés pour apprécier les phénomènes de brouillage de radars ; qu'ainsi, compte tenu de leur implantation et de leurs caractéristiques, les éoliennes en question sont susceptibles de perturber gravement le fonctionnement du système de détection et de protection radar ; que la société requérante ne justifie pas, en tout état de cause, que les machines devant être installées bénéficieraient de certaines avancées technologiques portant sur une " surface équivalent radar " réduite, qui seraient de nature à limiter leur impact sur le fonctionnement du radar d'Abbeville et que ces nouveaux modèles auraient, en outre, nécessité la mise en place d'une concertation avec le pétitionnaire préalablement aux décisions de refus qui lui ont été opposées ;

7. Considérant qu'il n'est pas davantage contesté que les données exploitées par le radar d'Abbeville sont destinées non seulement à assurer les observations et prévisions météorologiques dans un vaste secteur comprenant la baie de Somme, et plusieurs zones des départements voisins, exposées à de fortes intempéries, mais s'inscrivent aussi, en collaboration avec d'autres radars, dans le système Arome mis en place par Météo France destiné à favoriser la surveillance de plusieurs agglomérations urbaines et la prévision des risques de crues ; qu'ainsi, compte tenu de l'importance de la perte d'information mentionnée au point précédent, les six éoliennes envisagées sont de nature à porter atteinte à la sécurité publique au sens des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; que, par suite, c'est sans erreur d'appréciation que le préfet de la Somme a refusé de délivrer les permis de construire en litige à la société Energieteam ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Energieteam n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au prononcé d'une injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Energieteam est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Energieteam et au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

Copie en sera transmise pour information au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 29 octobre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- M. Christian Bernier, président-assesseur,

- M. Hadi Habchi, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 novembre 2015.

Le rapporteur,

Signé : H. HABCHILe président de chambre,

Signé : O. YEZNIKIAN

Le greffier,

Signé : S. DUPUIS

La République mande et ordonne au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Sylviane Dupuis

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N°14DA00373


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00373
Date de la décision : 12/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Demande de titre de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Hadi Habchi
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : CGR LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-11-12;14da00373 ?
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