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07/02/2017 | FRANCE | N°15DA00534

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 07 février 2017, 15DA00534


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...F...a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge de son obligation solidaire de paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle son ancien époux et elle ont été assujettis au titre de l'année 2005, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1201270 du 3 février 2015, le tribunal administratif de Lille a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés les

3 avril et 31 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...F...a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge de son obligation solidaire de paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle son ancien époux et elle ont été assujettis au titre de l'année 2005, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1201270 du 3 février 2015, le tribunal administratif de Lille a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire, enregistrés les 3 avril et 31 juillet 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lille du 3 février 2015 ;

2°) de rejeter la demande en décharge de son obligation solidaire de paiement présentée par MmeF....

Il soutient que :

- la condition tenant à l'existence d'une disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale de Mme F...et, à la date de la demande, sa situation financière et patrimoniale, nette de charges, n'était pas satisfaite ;

- la décharge éventuelle doit être limitée à une somme de 72 719 euros en application des dispositions du a) du 2 de l'article 1691 bis du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juin 2015, MmeF..., représentée par Me E...C..., demande à la cour de rejeter le recours du ministre et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il existait une disproportion marquée entre le montant de sa dette fiscale et, à la date de sa demande, sa situation financière et patrimoniale nette de charges ;

- la décharge devra être totale car elle n'était pas imposable au titre de l'année 2005 et les impositions supplémentaires sont la résultante de l'activité occulte de son ex-époux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.

1. Considérant que Mme F...s'est vu réclamer le paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités afférentes à laquelle son ancien époux et elle-même ont été assujettis au titre de l'année 2005 ; que le 9 mai 2011, elle a demandé à l'administration fiscale à être déchargée de l'obligation solidaire de paiement de cette imposition ; que sa demande ayant été rejetée au motif qu'il n'existait pas de disproportion marquée entre le montant de sa dette fiscale et sa situation financière et patrimoniale nette de charges, Mme F... a saisi le tribunal administratif de Lille d'une demande tendant à ce qu'il prononce la décharge de son obligation solidaire de paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle son ancien époux et elle ont été assujettis au titre de l'année 2005, ainsi que des pénalités correspondantes ; que, par jugement n° 1201270 du 3 février 2015, le tribunal administratif de Lille a fait droit à sa demande en prononçant la décharge totale de son obligation solidaire ; que, par le présent recours, le ministre des finances et des comptes publics relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1691 bis du code général des impôts : " II. - 1. Les personnes divorcées ou séparées peuvent demander à être déchargées des obligations de paiement prévues au I (...) lorsque, à la date de la demande : / a) Le jugement de divorce ou de séparation de corps a été prononcé (...). / 2. La décharge de l'obligation de paiement est accordée en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. Elle est alors prononcée selon les modalités suivantes : a) Pour l'impôt sur le revenu, la décharge est égale à la différence entre le montant de la cotisation d'impôt sur le revenu établie pour la période d'imposition commune et la fraction de cette cotisation correspondant aux revenus personnels du demandeur et à la moitié des revenus communs du demandeur et de son conjoint ou de son partenaire de pacte civil de solidarité (...). / d) Pour les intérêts de retard et les pénalités mentionnées aux articles 1727, 1728, 1729, 1732 et 1758 A consécutifs à la rectification d'un bénéfice ou revenu propre au conjoint ou au partenaire de pacte civil de solidarité du demandeur, la décharge de l'obligation de paiement est prononcée en totalité. (...) / 3. Le bénéfice de la décharge de l'obligation de paiement est subordonné au respect des obligations déclaratives du demandeur prévues par les articles 170 et 855 W à compter de la date de la fin de la période d'imposition commune. / La décharge de l'obligation de paiement ne peut pas être accordée lorsque le demandeur et son conjoint ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité se sont frauduleusement soustraits, ou ont tenté de se soustraire frauduleusement, au paiement des impositions mentionnées aux 1° et 2° du I ainsi qu'à l'article 1723 ter-00 B, soit en organisant leur insolvabilité, soit en faisant obstacle, par d'autres manoeuvres, au paiement de l'impôt " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'un contrôle mené par l'administration fiscale en 2010 a révélé une activité occulte d'agent immobilier indépendant exercée au cours de l'année 2005, année précédant le prononcé du divorce de MmeF..., par son ex-époux ; qu'il est constant que Mme F...remplit les conditions énoncées au 1 et 3 du II de l'article 1691 bis précité du code général des impôts pour bénéficier de la décharge de l'obligation solidaire de paiement de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle son ancien époux et elle-même ont été assujettis au titre de l'année 2005 ; que s'agissant de la condition énoncée au 2 du II de l'article 1691 bis précité, l'administration fiscale, pour caractériser l'absence de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale de Mme F...et sa situation financière et patrimoniale nette de charges, se borne à faire valoir que la situation financière et patrimoniale de l'intéressée lui permettrait de s'acquitter de sa dette fiscale dans un délai inférieur à cinq ans, durée inférieure à celle retenue par les dispositions du code de la consommation pour l'échelonnement des dettes en matière de surendettement des particuliers ; qu'il résulte toutefois de l'instruction qu'à la date du 9 mai 2011, date de sa demande en décharge de son obligation solidaire, la dette fiscale de Mme F...s'élevait à la somme de 77 246 euros ; qu'à supposer même que le patrimoine mobilier de Mme F...qui s'élevait à 44 457,86 euros à cette même date, puisse être regardé comme une réserve patrimoniale mobilisable pouvant être affectée au paiement de sa dette fiscale et non comme l'unique source future de ses revenus, le montant de sa dette fiscale s'établissait à 32 788,14 euros, alors que son revenu annuel net de charges que lui procure son emploi d'auxiliaire de vie-employée de maison, s'établissait au plus à la somme de 8 891,04 euros ; que, dans ces conditions, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il existait une disproportion marquée entre le montant de sa dette fiscale et sa situation financière et patrimoniale nette de charges nonobstant le fait que Mme F... aurait pu s'acquitter de sa dette fiscale dans un délai inférieur à cinq ans ;

4. Considérant toutefois que les dispositions précitées du a) du 2 de l'article 1691 bis du code général des impôts prévoient que, pour l'impôt sur le revenu, la décharge est, en ce qui concerne les droits en principal, égale à la différence entre le montant de la cotisation d'impôt sur le revenu établie pour la période d'imposition commune et la fraction de cette cotisation correspondant aux revenus personnels du demandeur et à la moitié des revenus communs du demandeur et de son conjoint ; que le d) du 2 du même article prévoit que, pour les pénalités et intérêts de retard consécutifs à la rectification d'un bénéfice ou d'un revenu propre au conjoint, la décharge de l'obligation est prononcée en totalité ; qu'ainsi, en application de ces dispositions, si Mme F...doit bénéficier de la décharge totale de l'obligation solidaire en ce qui concerne les pénalités et intérêts de retard, il résulte de l'instruction qu'au titre des droits en principal, elle demeure redevable, compte tenu des paiements déjà effectués, d'une somme de 4 707 euros ; qu'à cet égard, en vertu des dispositions précitées, la double circonstance que le montant des revenus de Mme F...au titre de l'année 2005 l'aurait rendue non imposable si elle avait été célibataire et que les rehaussements à l'origine de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu dont le paiement lui est réclamé a pour origine le comportement exclusif de son ex-époux est sans influence sur la détermination du montant de la décharge dont elle peut bénéficier en ce qui concerne les droits en principal ; que, dès lors, c'est à tort que les premiers juges ont accordé à Mme F...la décharge totale de son obligation solidaire de paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle son ex-époux et elle-même ont été assujettis au titre de l'année 2005 ; que, par suite, il y a lieu de ramener à 72 426 euros le montant de la décharge de l'obligation solidaire prononcée et de remettre à la charge de Mme F...un montant en droits de 4 707 euros ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a prononcé une décharge de l'obligation solidaire de Mme F...de paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle et son ex-époux ont été assujettis au titre de l'année 2005 supérieure au montant en droits de 72 426 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

7. Considérant qu'il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme F...tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées à ce titre doivent dès lors être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1201270 du 3 février 2015 du tribunal administratif de Lille est réformé en tant qu'il prononce une décharge de l'obligation solidaire de Mme F...de paiement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle et son ex-époux ont été assujettis au titre de l'année 2005 supérieure au montant en droits de 72 426 euros.

Article 2 : Le montant de 4 707 euros dégrevé à tort par le tribunal administratif au titre de l'obligation solidaire de paiement des droits de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle Mme F...et son ex-époux ont été assujettis au titre de l'année 2005 est remis à la charge de MmeF....

Article 3 : Le surplus du recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par Mme F...devant la cour sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à Mme D...F....

Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 24 janvier 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme B...A..., première conseillère,

- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 février 2017.

Le rapporteur,

Signé : R. FERALLe président de chambre,

Signé : M. G...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

5

N° 15DA00534


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00534
Date de la décision : 07/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-05-02-01 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement. Paiement de l'impôt. Solidarité entre époux.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SELAS JURINORD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-02-07;15da00534 ?
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