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07/02/2017 | FRANCE | N°15DA01059

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 07 février 2017, 15DA01059


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune de Crépy-en-Valois à leur verser une somme de 63 250 euros ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance en réparation des dommages causés au mur d'enceinte de leur propriété suite aux travaux ordonnés d'office par la commune de Crépy-en-Valois et exécutés sur réquisition par la SARL Cabrema TP.

Par un jugement n° 1300926 du 28 avril 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté l

eur demande en déclarant la juridiction de l'ordre administratif incompétente pour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la commune de Crépy-en-Valois à leur verser une somme de 63 250 euros ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance en réparation des dommages causés au mur d'enceinte de leur propriété suite aux travaux ordonnés d'office par la commune de Crépy-en-Valois et exécutés sur réquisition par la SARL Cabrema TP.

Par un jugement n° 1300926 du 28 avril 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande en déclarant la juridiction de l'ordre administratif incompétente pour connaître de leurs conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 juin 2015 et le 18 mars 2016, M. et Mme C..., représentés par Me G...H..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 avril 2015 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de condamner la commune de Crépy-en-Valois à leur verser une somme de 63 250 euros, actualisée sur l'indice du coût de la construction et majorée des intérêts au taux légal à compter de la date du dépôt du rapport d'expertise, avec capitalisation des intérêts échus ;

3°) de condamner la commune de Crépy-en-Valois à leur verser une somme de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance ;

4°) de condamner la commune de Crépy-en-Valois à leur verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la voie de fait n'est pas constituée ;

- les travaux ordonnés d'office et leur condition de réalisation sont à l'origine des dommages subis affectant leur mur d'enceinte, ces fautes sont de nature à engager la responsabilité de la commune de Crépy-en-Valois ;

- l'expertise s'est déroulée régulièrement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2015, la commune de Crépy-en-Valois, représentée par MeF..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement en ce qu'il a déclaré la juridiction administrative incompétente pour connaître du litige, à titre subsidiaire, à ce qu'une expertise complémentaire soit ordonnée, à titre infiniment subsidiaire, à la réduction des sommes demandées, à ce que la SARL Cabrema TP soit condamnée à la garantir des condamnations prononcées à son encontre, et à la condamnation de M. et Mme C...à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'expert n'a pas respecté le caractère contradictoire de la procédure et son devoir de neutralité pendant les opérations d'expertise, dès lors les conclusions de l'expert sont contestables ;

- la voie de fait n'est pas constituée ;

- le maire a agi dans le cadre de ses pouvoirs de police au titre de la procédure de péril, les mesures qu'il a prises l'ont été dans le but d'assurer la sécurité des usagers de la voie publique ;

- M. et Mme C...n'ont pas été dépossédés de leur propriété ;

- la SARL Cabrema TP est intervenue uniquement pour la sécurisation des lieux ;

- l'expert a relevé que le mur de M. et Mme C...ne disposait pas de barbacanes permettant d'évacuer air et eaux, contrairement au mur du voisin resté intact, la cause du sinistre résidant dans la rupture du collecteur d'assainissement en amont ayant entraîné une fragilisation du mur en raison de sa configuration anormale ;

- à la suite de l'effondrement initial, l'intégralité du mur aurait dû être reprise ;

- le montant des travaux fixé par l'expert est injustifié, dès lors qu'il n'a pas retenu le devis de la société STB pour un montant de 6 927,66 euros ;

- les sommes qui seraient à accorder doivent être réparties à parts égales entre M. et Mme C...et M. et MmeJ... ;

- le préjudice de jouissance n'est pas établi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2016, la SARL Cabrema, représentée par la SCP Lebegue - Pauwels - Derbise, conclut, à titre principal, au rejet de l'appel en garantie de la commune de Crépy-en-Valois, au rejet de la requête de M. et MmeC..., à la condamnation de la commune à lui verser une somme de 1 669 euros au titre de son intervention demeurée impayée, à titre subsidiaire, à la réduction des sommes demandées et à ce que sa garantie soit limitée à hauteur de 50 % du montant des condamnations, enfin, à la condamnation des succombants à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il y a lieu de s'en rapporter à la justice sur la question de la compétence de la juridiction administrative ;

- elle est intervenue dans le cadre d'une réquisition de la commune de Crépy-en-Valois, en vertu des pouvoirs de police dont dispose le maire ;

- la demande de garantie doit être rejetée ou, à titre subsidiaire, être limitée compte tenu de l'obligation de surveillance de la part de la commune à son encontre ;

- le préjudice de jouissance n'est pas établi tant dans son principe que dans son montant.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur,

- les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public,

- et les observations de Me I...F..., représentant la commune de Crépy-en-Valois.

1. Considérant que M. et Mme C..., propriétaires d'une habitation située 2, rue de la Vallée à Crépy-en-Valois, cadastrée section G n°355, relèvent appel du jugement du 28 avril 2015 du tribunal administratif d'Amiens qui a rejeté leur demande déclarant la juridiction de l'ordre administratif incompétente pour connaître de leurs conclusions tendant à la condamnation de la commune de Crépy-en-Valois à réparer le préjudice qu'ils ont subi du fait de l'arrachage du chaperon situé en surplomb du mur privatif, en partie déjà éboulé par un glissement de terrain, et ayant ainsi entraîné un éboulement supplémentaire du mur de soutènement situé en fond de leur parcelle ;

2. Considérant qu'il n'y a voie de fait de la part de l'administration, justifiant, par exception au principe de séparation des autorités administrative et judiciaire, la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire pour en ordonner la cessation ou la réparation, que dans la mesure où l'administration, soit a procédé à l'exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d'une décision, même régulière, portant atteinte à la liberté individuelle ou aboutissant à l'extinction d'un droit de propriété, soit a pris une décision qui a les mêmes effets d'atteinte à la liberté individuelle ou d'extinction d'un droit de propriété et qui est manifestement insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, qu'à la suite de l'effondrement du mur de soutènement de la propriété de M. et Mme C... le 28 mars 2009, le maire de Crépy-en-Valois après avoir ordonné par arrêté la pose de barrières de sécurité et défini un périmètre de sécurité sur le site, sans constater l'état de péril puis sollicité la SARL Cabrema TP afin d'évacuer les gravats de l'éboulement et purger le mur effondré, a fait procéder, le jour même, contre l'avis des propriétaires, à l'arrachage du chaperon situé en surplomb du mur privatif provoquant ainsi un éboulement supplémentaire du mur de M. et Mme C...et d'une partie du mur mitoyen de M. et MmeJ... ; que M. et Mme C...ont fait appel à la société STB pour réaliser des travaux d'étaiement et de reconstruction, laquelle n'a pu intervenir, compte tenu de l'intervention de la commune et de la SARL Cabrema TP ; qu'il résulte ainsi de l'instruction, que le maire de Crépy-en-Valois a fait exécuter des travaux qui ont emporté démolition d'une portion de mur haut de 5,5 mètres sur une longueur en haut de 8,5 mètres et en bas de 3 mètres et l'arrachage d'une rambarde de 9,5 mètres située sur un chaperon en béton, propriété des épouxC..., en l'absence de toute situation d'urgence ; que cette exécution forcée, réalisée par l'intermédiaire de la SARL Cabrema TP, n'a toutefois pas entraîné l'extinction du droit de propriété de M. et Mme C...sur cette portion de mur, du fait de son effondrement ; qu'ainsi l'action ordonnée par le maire de Crépy-en-Valois ne présente pas le caractère d'une voie de fait ; que, par suite, M. et Mme C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

4. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif d'Amiens pour qu'il statue à nouveau sur la demande de M. et Mme C...;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1300926 du 28 avril 2015 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : M. et Mme C...sont renvoyés devant le tribunal administratif d'Amiens pour qu'il soit statué sur leur demande.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...C..., à la commune de Crépy-en-Valois, à la SARL Cabrema TP et au tribunal administratif d'Amiens.

Copie sera adressée à M. et Mme B...J....

Délibéré après l'audience publique du 24 janvier 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme E...D..., première conseillère,

- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 février 2017.

Le premier conseiller le plus ancien,

Signé : M. D...Le président-assesseur,

Signé : M. K...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°15DA01059


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