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15/06/2017 | FRANCE | N°15DA01057

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 15 juin 2017, 15DA01057


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D...et ArmelleI..., M. et Mme F...et LilianeG..., Mme M...Q...et M. P...H...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 mars 2012 par lequel le maire de Saulty (Pas-de-Calais) a accordé à M. K...le permis de construire un garage pour véhicules légers sur un terrain situé 624 grande rue.

Par un jugement n° 1203407 du 21 avril 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par un

e requête, enregistrée le 25 juin 2015, et un mémoire enregistré le 24 octobre 2016, M. et M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D...et ArmelleI..., M. et Mme F...et LilianeG..., Mme M...Q...et M. P...H...ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 mars 2012 par lequel le maire de Saulty (Pas-de-Calais) a accordé à M. K...le permis de construire un garage pour véhicules légers sur un terrain situé 624 grande rue.

Par un jugement n° 1203407 du 21 avril 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 juin 2015, et un mémoire enregistré le 24 octobre 2016, M. et Mme D...et ArmelleI..., M. et Mme F...et LilianeG..., Mme M...Q...et M. P...H..., représentés par Me R...C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du maire de Saulty du 22 mars 2012 ;

3°) de mettre solidairement à la charge de la commune de Saulty et de M. K...les sommes de 2 000 euros et 1 500 euros, au titre respectivement de la présente procédure et de celle de première instance, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me N...B..., représentant M. et Mme I...et autres, de Me J...O..., représentant la commune de Saulty, et de Me L...E..., représentant M. A...K....

1. Considérant que M. K...a déposé le 29 octobre 2008 une demande de permis de construire un garage professionnel d'une surface de 534 m², sur les parcelles cadastrées E 652 et E 654, au 624 grande rue à Saulty (Pas-de-Calais) ; que ce permis de construire lui a été refusé par un arrêté du 12 mars 2009 du maire, agissant au nom de l'Etat ; que M. K...a déposé, le 28 février 2012, une nouvelle de demande de permis de construire un garage pour véhicules légers d'une surface de 529 m², à usage privé, sur les mêmes parcelles ; que le maire de Saulty, agissant au nom de la commune, lui a accordé le permis de construire sollicité par un arrêté du 22 mars 2012 ; que ce garage est désormais achevé ; que M. et Mme I...et autres relèvent appel du jugement du 21 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du maire de Saulty accordant à M. K...le permis de construire ce garage ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ne ressort pas de leurs écritures en première instance que M. et Mme I... et autres se soient prévalus, devant le tribunal administratif, du moyen tiré de l'insuffisance de la notice de présentation du projet architectural quant au traitement de la végétation existante ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier faute d'y avoir statué doit être écarté ;

Sur les conclusions d'annulation :

En ce qui concerne les insuffisances du dossier de demande de permis de construire :

3. Considérant que la circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable ;

S'agissant de l'insuffisance de la notice explicative :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au permis de construire en litige : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / (...) / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / (...) " ;

5. Considérant que la notice de présentation du projet précise que les façades sud-ouest, nord-est, et nord-ouest du projet doivent être implantées en limite de propriété ; que cette information est complétée par les vues cotées sur les plans de façades et de coupe, qui permettent d'apprécier l'implantation, l'organisation, la composition, et le volume, d'ailleurs fort simples s'agissant d'un unique bâtiment rectangulaire, de la construction en litige ; que, toutefois, et en dépit des dimensions importantes du bâtiment qui présente une largeur de 18 mètres, une longueur de 27 mètres et une hauteur d'environ 7 mètres, la notice ne fait pas état des partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement correspondant à une zone principalement dédiée à l'habitation ; que l'unique document graphique présentant le projet dans son environnement, dénommé PC 6, ne donne qu'un point de vue éloigné et sommaire du projet, côté rue des Ciriers ; que cette insuffisance de la notice n'est pas compensée par les autres pièces du dossier ; que, dans ces conditions, le service instructeur n'a pas été mis à même d'apprécier le parti retenu pour assurer l'insertion du projet dans son environnement, notamment par rapport aux constructions avoisinantes, en fonction de ses caractéristiques, notamment de son gabarit ; que, par suite, M. et Mme I...et autres sont fondés à soutenir que les dispositions du b) du 2°) de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;

S'agissant de l'insuffisance du document graphique :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : / (...) / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / (...) " ;

7. Considérant que, comme il a été dit au point 5, l'unique document graphique, dénommé PC 6, destiné à apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ne donne qu'un point de vue éloigné et sommaire du projet vue du côté de la rue des Ciriers ; qu'il ne traite pas l'insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages du côté de la rue de l'enfer dans laquelle il s'inscrit pourtant ; que ces insuffisances ne sont pas compensées par d'autres pièces du dossier de permis de construire alors que le bâtiment, de caractère industriel, doit être implanté dans un quartier principalement dédié à l'habitation ; que, dans ces conditions, le service instructeur n'a pas été mis à même d'apprécier l'insertion du projet de garage par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, non plus que son impact visuel ; que, par suite, M. et Mme I...et autres sont également fondés à soutenir que les dispositions du c) de l'article R. 431-10 du même code ont été méconnues ;

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article U11 du plan local d'urbanisme :

9. Considérant qu'aux termes de l'article U11 du plan local d'urbanisme : " Ainsi qu'il est prévu à l'article R.111-21 du code de l'urbanisme, la situation des constructions, leur architecture, leur aspect extérieur doivent être adaptés au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ;

10. Considérant que ces dispositions ont le même objet que celles de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et prévoient des exigences qui ne sont pas moindres ; que, dès lors, la légalité de la décision attaquée doit être appréciée par rapport à ces dispositions du plan local d'urbanisme, le juge exerçant alors un contrôle normal sur le respect de ces dispositions ;

11. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère des lieux avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales ; que, pour rechercher l'existence d'une atteinte au caractère des lieux de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité des lieux sur lesquels la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur ceux-ci ;

12. Considérant, d'une part, que la construction en litige s'insère dans un quartier principalement à vocation d'habitation d'une commune rurale, qui n'est pas dépourvu de tout intérêt en dépit d'une certaine hétérogénéité de constructions ; que plusieurs bâtiments de briques rouges aux toitures de terre cuite rouge ou de couleur ivoire avec une toiture ardoise y sont implantés ainsi qu'une maison traditionnelle à colombage et toit à plusieurs pentes, située à proximité immédiate du garage en litige ; que les garages et hangars existants dans le secteur n'apparaissent pas avoir des dimensions aussi importantes ou être recouverts de bardage ;

13. Considérant, d'autre part, qu'ainsi qu'il a été dit au point 5, le bâtiment est destiné à abriter un garage aux proportions importantes ; qu'étant implanté en angle de deux rues anciennes au sein d'un quartier d'habitat plutôt traditionnel, il sera particulièrement visible pour toute personne empruntant ces voies ouvertes à la circulation publique ; que s'il est prévu qu'il soit recouvert dans sa partie supérieure de tôles laquées de couleur ivoire et possède une toiture de couleur bleu ardoise, en revanche, dans sa partie basse la plus visible, les murs sont constitués de plaques de béton et les portails d'entrée constituent les seules ouvertures de la construction ; qu'eu égard à son gabarit et à son aspect général, cette construction de type industriel n'est pas, prise dans son ensemble, en harmonie les constructions situées à proximité et n'est pas adaptée au caractère des lieux avoisinants ;

14. Considérant qu'il en résulte que M. et Mme I...et autres sont fondés à soutenir que le maire a commis une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article U11 du plan local d'urbanisme de la commune en accordant le permis de construire sollicité ;

15. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens soulevés par M. et Mme I...et autres n'est, en l'état du dossier, susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté en litige ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme I...et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M.K..., qui a la qualité de partie perdante, la somme de 1 500 euros à verser solidairement à M. et MmeI..., M. et MmeG..., Mme Q...et M.H..., sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. K...et la commune de Saulty à l'encontre des requérants sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 21 avril 2015 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du maire de Saulty du 22 mars 2012 est annulé.

Article 3 : M. K...versera 1 500 euros solidairement à M. et Mme D...et ArmelleI..., M. et Mme F...et LilianeG..., Mme M...Q...et M. P...H...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. K...et la commune de Saulty sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D...et ArmelleI..., à M. et Mme F...et LilianeG..., à Mme M...Q..., à M. P...H..., à M. A... K...et à la commune de Saulty.

Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais et au procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Arras.

N°15DA01057 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: Mme Amélie Fort-Besnard
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : BODART

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Date de la décision : 15/06/2017
Date de l'import : 22/08/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15DA01057
Numéro NOR : CETATEXT000034993626 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-06-15;15da01057 ?
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