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14/09/2017 | FRANCE | N°16DA01154

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 14 septembre 2017, 16DA01154


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...H...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 octobre 2015 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a indiqué qu'à l'expiration de ce délai, il pourrait être éloigné à destination du pays dont il a la nationalité ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ou à destination d'u

n autre pays dans lequel il est légalement admissible.

Par un jugement nos 1509622,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...H...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 octobre 2015 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a indiqué qu'à l'expiration de ce délai, il pourrait être éloigné à destination du pays dont il a la nationalité ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible.

Par un jugement nos 1509622,1509817 du 21 avril 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juin 2016, M. C...H..., représenté par Me A...G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet du Nord, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 904 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, contre renoncement de la part de ce dernier au bénéfice de l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur la décision de refus de séjour :

1. Considérant que l'arrêté a été signé pour le préfet du Nord, pour le secrétaire général et le secrétaire général adjoint et le directeur de l'immigration et de l'intégration empêché, par l'adjointe au directeur, Mme D...F... ; que, par un arrêté du 23 juillet 2015, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Nord a donné délégation à M. J...E..., directeur de l'immigration et de l'intégration, à l'effet de signer les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour, les décisions portant obligation de quitter le territoire français avec ou sans délai de départ volontaire et les décisions fixant le pays de destination ; qu'il a, par le même arrêté, donné délégation à Mme D...F..., adjointe au directeur de l'immigration et de l'intégration à la préfecture du Nord, à l'effet de signer les mêmes décisions en cas d'absence ou d'empêchement de M. E... ; que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision de refus de séjour doit donc être écarté ;

2. Considérant que la décision de refus de séjour comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde ; que si M. H...reproche à la décision en cause de ne pas avoir fait état de la scolarisation de ses enfants, de son investissement ainsi que de celui de son épouse dans leur éducation ainsi que de l'existence d'un projet professionnel pour son épouse, le préfet du Nord n'était pas tenu de faire état de l'ensemble des éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de l'intéressé ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour manque en fait et doit être écarté ;

3. Considérant qu'il ne ressort pas de la lecture de l'arrêté en cause, qui est, ainsi qu'il vient d'être dit, suffisamment motivé, ou des autres pièces du dossier que le préfet du Nord n'a pas procédé à un examen complet de la situation personnelle de M. H...avant de prendre une décision de refus de séjour à son encontre ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.H..., de nationalité azerbaïdjanaise, est entré en France, selon ses déclarations, le 2 septembre 2008 accompagné de son épouse, Mme B...I..., de nationalité azerbaïdjanaise également ; qu'il a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 janvier 2009, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 15 décembre 2009 ; qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français après avoir fait l'objet de la part du préfet du Nord d'un refus de titre de séjour accompagné d'une obligation de quitter le territoire français le 5 février 2010 ;

6. Considérant qu'au vu des pièces du dossier, M. H...et son épouse, également destinataire d'un refus de titre avec obligation de quitter le territoire français, et leurs quatre enfants, nés respectivement en 2009, 2011, 2012 et 2015, ne disposent pas d'autre famille en France ; que M.H..., né en 1968, est entré en France en 2008 alors âgé de quarante ans et a ainsi vécu pour l'essentiel hors de France ; que même si ses parents sont décédés, comme cela ressort de sa demande de titre de séjour du 8 octobre 2014, l'intéressé a nécessairement développé des liens personnels et affectifs en Azerbaïdjan ; que, par suite, compte tenu de ses conditions de séjour et en dépit de sa durée, le préfet n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise ; que, par suite, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précité et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ;

7. Considérant que, à la date de l'arrêté attaqué, les quatre enfants du couple étaient en bas âge et que trois étaient scolarisés en école maternelle ou en primaire ; que rien ne fait obstacle à ce qu'ils poursuivent leur scolarité hors de France, notamment en Azerbaïdjan, pays dans lequel la cellule familiale pourra se reconstituer ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale de New York relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / (...) " ;

9. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 et alors que M. H... et sa famille, sans ressources propres, vivent dans des conditions précaires depuis leur entrée sur le territoire français et que le projet professionnel de son épouse apparaît très hypothétique, le préfet du Nord, en prenant la décision de refus de séjour, n'a pas méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant que le moyen tiré de l'erreur manifeste qu'aurait commise le préfet dans l'appréciation des conséquences de la décision de refus de séjour sur sa situation personnelle doit être écarté par les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 6 et 9 ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 10 que la décision de refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 11 que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de séjour doit être écarté ;

13. Considérant que le moyen tiré de l'incompétence du signataire doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 1 ;

14. Considérant que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté pour le même motif que celui énoncé au point 2 ;

15. Considérant que le moyen tiré de l'absence d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté pour le même motif que celui énoncé au point 3 ;

16. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 ;

17. Considérant que le moyen tiré de l'erreur manifeste commise par le préfet du Nord dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle doit être écarté pour le même motif que celui énoncé au point 10 ;

18. Considérant que M. H...ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français qui ne fixe, par elle-même, aucun pays de destination ;

19. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 18 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

20. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 11 et 19 que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

21. Considérant que le moyen tiré de l'incompétence du signataire doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 1 ;

22. Considérant que l'arrêté contesté vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rappelle que la demande d'asile de M. H...a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile et indique que l'intéressé n'allègue ni n'établit que sa vie ou sa liberté seraient menacées dans son pays d'origine ou qu'il y serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de cette convention ; que la décision fixant le pays de destination est, par suite, suffisamment motivée ;

23. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles de l'article 3 de la convention internationale de New York relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste commise par le préfet dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle doivent être écartés pour les motifs énoncés respectivement aux points 6, 7 et 10 ;

24. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que, par ailleurs, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ;

25. Considérant que M.H..., dont la demande d'asile a au demeurant été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, n'apporte pas d'éléments probants de nature à établir la réalité des risques personnels encourus en cas de retour dans son pays du fait de menaces de la part d'intégristes religieux musulmans ;

26. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 20 à 25 que la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'illégalité ;

27. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet en défense, que M. H...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être également rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. H...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...H..., au ministre de l'intérieur et à Me A...G....

Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord.

N°16DA01154 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Xavier Fabre
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : THIEFFRY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 14/09/2017
Date de l'import : 26/09/2017

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 16DA01154
Numéro NOR : CETATEXT000035597222 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-09-14;16da01154 ?
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