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25/05/1989 | FRANCE | N°89LY00034

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 25 mai 1989, 89LY00034


Vu la décision en date du 1er décembre 1988, enregistrée au greffe de la cour le 19 décembre 1988, par laquelle le président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour le Centre hospitalier de MOULINS représenté par son directeur, par la S.C.P. P. FORTUNET, G. MATTEI-DAWANCE avocat aux conseils ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du conseil d'Etat le 27 mars 1986 et le mémoire complémentaire enregistré

le 25 juin 1986 par lesquels le centre hospitalier de MOULINS demande...

Vu la décision en date du 1er décembre 1988, enregistrée au greffe de la cour le 19 décembre 1988, par laquelle le président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour le Centre hospitalier de MOULINS représenté par son directeur, par la S.C.P. P. FORTUNET, G. MATTEI-DAWANCE avocat aux conseils ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du conseil d'Etat le 27 mars 1986 et le mémoire complémentaire enregistré le 25 juin 1986 par lesquels le centre hospitalier de MOULINS demande la reformation du jugement du 16 janvier 1986 du tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND qui n'a fait que partiellement droit à ses conclusions dirigées contre les constructeurs des bâtiments du Centre et sollicite en conséquence la condamnation solidaire de MM. Z... et Y... architectes, des sociétés RABETTE, LABAYE-TEISSEIRE, CHAUMENY S.N.B.A., S.M.A.B.T.P. et du Bureau d'études techniques S.E.B.A. à lui verser avec intérêts de droit à compter du 17 février 1981, et les intérêts des intérêts, la somme de 723 525 francs en réparation des désordres affectant les bâtiments du Centre hospitalier ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n°77-1488 du 30 décembre 1977 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 20 avril 1989 :
- le rapport de M. LANQUETIN, conseiller,
- les observations de Me GEORGES, avocat du Bureau technique d'études S.E.B.A., et de Me ODENT, avocat des sociétés S.M.A.C. ACIEROID, S.M.A.B.T.P., CHAUMENY S.N.B.A, LABEYE-TEISSEIRE et RABETTE,
- et les conclusions de M. ROUVIERE commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement en date du 16 janvier 1986, le tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND a condamné solidairement, au titre de l'action en garantie décennale dont le maître d'ouvrage dispose sur la base des principes posés par les articles 1792 et 2270 du code civil, la société S.M.A.C ACIEROID et le bureau d'études techniques S.E.B.A. à payer au Centre hospitalier de MOULINS la somme de 218 448,45 francs en raison des conséquences dommageables des défauts d'étanchéité de deux bâtiments ; que le tribunal administratif a mis par ailleurs hors de cause les architectes MM. Z... et Y... ainsi que les entreprises RABETTE, LABAYE-TEISSEIRE, CHAUMENY S.N.B.A. et S.M.A.B.T.P. ; que le Centre hospitalier demande que ces derniers fassent l'objet de la même condamnation solidaire que la société S.M.A.C ACIEROID et le bureau d'études techniques S.E.B.A., et que les indemnités qui lui soient allouées soient portées à la somme de 723 525 francs ; que les défendeurs sollicitent leur mise hors de cause ; que de plus les architectes, la société S.M.A.C. ACIEROID et le Bureau d'études techniques S.E.B.A. demandent subsidiairement par la voie de l'appel incident une diminution du montant de la réparation fixé par les premiers juges ; que la société S.M.A.C. ACIEROID forme également un appel provoqué dirigé à l'encontre du bureau d'études techniques S.E.B.A. tendant à être garantie intégralement par ce dernier de toute condamnation qui serait mise à sa charge ;
Sur les conclusions du centre hospitalier dirigées contre les entreprises RABATTE, LABAYE-TEISSEIRE, CHAUMENY S.N.B.A. et S.M.A.B.T.P :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que des faits imputables aux entreprises susvisées aient concouru aux défauts d'étanchéité des toitures terrasses ; qu'ainsi les entreprises dont s'agit doivent être maintenues hors de cause ;
Sur les conclusions du centre hospitalier dirigées contre les architectes, la société S.M.A.C. ACIEROID et le Bureau d'études techniques S.E.B.A. et sur les appels incidents de ces derniers :
Sur la responsabilité :
Considérant que les désordres litigieux qui se traduisaient par des infiltrations et des condensations dans les locaux des bâtiments concernés rendaient les ouvrages impropres à leur destination ; qu'ainsi ils entraient dans le champ d'application de la garantie décennale ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que les désordres dont s'agit sont dus à l'emploi comme isolant thermique dans le complexe d'étanchéité de panneaux "Roofmate" dont les mouvements de dilatation ont provoqué des déchirures de l'étanchéité au droit des joints ;

Considérant que l'utilisation du matériau "Roofmate" a été prévue au devis descriptif établi par les architectes ; qu'ainsi, et même si ces derniers ont adopté cette solution compte tenu des exigences financières du maître d'ouvrage qui les ont conduits à modifier le devis descriptif originaire prévoyant un autre procédé de panneaux connu pour sa fiabilité mais plus onéreux, les désordres en cause sont de nature à engager la responsabilité des architectes envers le maître d'ouvrage ; que si les maîtres d'oeuvre invoquent la circonstance que le Bureau d'études techniques S.E.B.A. avait été investi par le maître d'ouvrage d'une mission d'ingénierie notamment pour la prévention des risques en matière d'étanchéité et qu'aux termes de sa convention ce Bureau d'études accomplissait sa mission en toute indépendance, l'intervention dudit Bureau d'études n'a pu avoir pour effet de décharger les architectes de leur responsabilité envers le Centre hospitalier ;
Considérant qu'il ressort de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que la société S.M.A.C ACIEROID attributaire du lot d'étanchéité et spécialiste des travaux de revêtement étanche n'a formulé aucune réserve sur l'emploi des panneaux "Roofmate" en dépit de la conception nouvelle de ce procédé ; qu'au demeurant l'intéressée doit, dans les circonstances de l'espèce, être considérée comme ayant concouru au choix du matériau dès lors que c'est en pleine concertation avec elle que les architectes avaient décidé de retenir les panneaux "Roofmate" en remplacement de ceux prévus dans le devis descriptif originaire ; qu'en conséquence la responsabilité de la société S.M.A.C ACIEROID est également engagée envers le maître d'ouvrage ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise qu'en donnant dans le cadre de sa mission d'assistance technique en matière d'étanchéité son accord à la modification du devis descriptif sans avoir au préalable fait procéder à des essais sur les panneaux "Roofmate" dont le procédé n'était pas rodé, le Bureau d'études techniques S.E.B.A. a lui aussi joué un rôle causal dans la réalisation du sinistre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les faits imputables aux architectes, à la société S.M.A.C. ACIEROID et au Bureau d'études techniques S.E.B.A. ont tous concouru à la réalisation des desordres litigieux ; qu'il y a donc lieu de déclarer ces intéressés solidairement responsables desdits désordres envers le maître d'ouvrage ;
Considérant toutefois que l'accord donné par le centre hospitalier pour l'utilisation des panneaux "Roofmate", a constitué une faute de nature à atténuer la responsabilité de MM. Z... et Y..., la société S.M.A.C. ACIEROID et le Bureau d'études techniques S.E.B.A. ; que dans les circonstances de l'espèce, le C.H.R. requérant n'est pas fondé à soutenir que le Tribunal administratif a fait une inexacte appréciation des circonstances de l'affaire en laissant à sa charge la moitié des conséquences dommageables des désordres ;
Sur la réparation :

Considérant que pour présenter une solution de réfection l'expert s'est borné à faire état d'une proposition de la société S.M.A.C. ACIEROID consistant en une simple reprise de l'étanchéité existante sans pose d'une nouvelle isolation thermique ; que cependant il résulte de l'instruction et notamment d'un avis donné par la société d'études SOCOTEC qu'il était nécessaire pour mettre les bâtiments du Centre hospitalier dans une situation d'habitabilité normale de procéder à la mise en place d'un nouveau complexe d'étanchéité ; qu'ainsi les défendeurs ne sont pas fondés à soutenir que le montant des travaux de réfection devait être fixé au coût de la solution proposée par l'expert nettement moins onéreux que le prix des travaux que le Centre hospitalier a fait effectuer sur la base de ceux préconisés par la société d'études SOCOTEC ; qu'il n'est pas démontré par les défendeurs que les travaux exécutés aient procuré aux bâtiments concernés une autre plus-value que celle résultant de la disparition des malfaçons ;
Considérant qu'en fixant à la somme de 655 347,30 francs le coût des travaux de réfection, le tribunal administratif a omis de prendre en compte deux factures de montants respectifs de 19 569 francs et 18 609,96 francs exposés par le maître d'ouvrage en relation directe avec l'exécution des travaux précités ; qu'il y a donc lieu de fixer à 693 526 francs les travaux de remise en état des ouvrages ;
Considérant que les désordres litigieux sont apparus en 1977 alors que les réceptions définitives des bâtiments endommagés ont été prononcées en 1972 et 1975 ; que compte tenu de ce délai dans la survenance des désordres un abattement d'un tiers pour vétusté des immeubles doit être appliqué sur la somme de 693 526 francs précitée ;
Considérant que le requérant ne justifie pas du montant du préjudice de 30 000 francs qu'il allègue avoir subi pour le trouble apporté à la gestion du centre hospitalier par les défauts d'étanchéité des toitures terrasses ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MM. Z... et Y..., architectes, la société S.M.A.C. ACIEROID et le Bureau d'études techniques S.E.B.A. en liquidation de biens pris en la personne de son syndic, M. X..., doivent être condamnés solidairement à payer au Centre hospitalier de MOULINS la somme de 231 175,42 francs, montant supérieur à celui accordé par les premiers juges ; qu'ainsi les recours incidents des défendeurs relatifs au montant de l'indemnité due au maître d'ouvrage doivent être rejetés ;
Sur les intérêts :
Considérant que le Centre hospitalier de MOULINS avait demandé au tribunal administratif de faire courir les intérêts au taux légal sur les sommes lui étant allouées à compter du mémoire faisant la demande de paiement de ces intérêts ; que le mémoire a été enregistré le 10 mai 1984 au secrétariat greffe de la juridiction ; qu'ainsi c'est à cette date et non à celle du 15 août 1984 retenue par les premiers juges ni contrairement à ce que soutient en appel le Centre hospitalier à celle du 17 février 1981, date de la requête introductive en première instance, que doit être fixé le point de départ des intérêts ;

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée par le maître d'ouvrage les 27 mars 1986, 14 mai 1987 et 25 mai 1988 ; qu'à chacune de ces dates il était dû plus d'une année d'intérêts ; que dès lors conformément aux dispositions de l'article 1153 du Code civil il y a lieu de faire droit aux demandes du requérant ;
Considérant que le Bureau d'études techniques S.E.B.A. étant en liquidation de biens, les intérêts sur les sommes dues par ce dernier au maître d'ouvrage sont accordées sous réserve de l'application des dispositions de la loi du 13 juillet 1967 ;
Sur l'appel provoqué de la société S.M.A.C ACIEROID à l'encontre du bureau d'études techniques S.E.B.A. :
Considérant que, compte tenu de l'origine des désordres ci-dessus rappelée, la société S.M.A.C. ACIEROID n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif a fait une inexacte appréciation des circonstances de l'affaire en décidant que le Bureau d'études techniques S.E.B.A. ne la garantirait que dans la proportion de 40 % du montant des dommages ; qu'ainsi il y a lieu de rejeter l'appel provoqué de la société S.M.A.C. ACIEROID tendant à être entièrement garantie par le Bureau d'études techniques S.E.B.A. ;
ARTICLE 1er : MM. Z... et Y..., architectes, la société S.M.A.C ACIEROID et le Bureau d'études techniques S.E.B.A., pris en la personne de son syndic, M. X..., sont déclarés solidairement responsables envers le Centre hospitalier de MOULINS des conséquences dommageables des désordres affectant les bâtiments de cet établissement public.
ARTICLE 2 : Le montant de la somme allouée au centre hospitalier de MOULINS est portée à 231 175,42 francs.
ARTICLE 3 : La somme déterminée à l'article 2 portera intérêt, sous réserve des dispositions de la loi du 13 juillet 1967 en ce qui concerne le Bureau d'études techniques S.E.B.A. à compter du 10 mai 1984. Les intérêts échus les 27 mars 1986, 14 mai 1987 et 25 mai 1988 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
ARTICLE 4 : Le jugement du tribunal administratif de CLERMONT-FERRAND est réformé en ce qu'il a de contraire aux dispositions des articles précédents.
ARTICLE 5 : Le surplus des conclusions du Centre hospitalier de MOULINS est rejeté.
ARTICLE 6 : Les recours incidents de la société S.M.A.C. ACIEROID, du Bureau d'études techniques S.E.B.A. et de MM. Z... et Y... sont rejetés.
ARTICLE 7 : L'appel provoqué de la société S.M.A.C. ACIEROID est rejeté.


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