Vu la décision en date du 1er décembre 1988 enregistrée au greffe de la cour le 19 décembre 1988 par laquelle le président de la 4ème sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour la commune de MANDELIEU LA NAPOULE, le 14 avril 1986, par Me X..., avocat aux conseils ;
Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 avril 1986 présentée, pour la commune de MANDELIEU LA NAPOULE, représentée par son maire, par Me X..., avocat aux conseils et tendant à l'annulation du jugement en date du 12 février 1986 par lequel le tribunal administratif de NICE a rejeté sa requête tendant à la condamnation de la société SHEMA, et à ce que la société SHEMA soit déclarée responsable des conséquences dommageables de l'effondrement d'un quai et condamnée à lui payer les sommes de 928 226,30 Francs en remboursement du coût des travaux de reconstruction, 100 456,30 Francs pour frais d'hébergement des bateaux, 300 000 Francs au titre de la perte locative, avec intérêts de droit à compter du 8 juin 1984 et capitalisation des intérêts ;
- à titre subsidiaire à ce que les sociétés S.M.G.C. et S.G.E.T.P.I. soient déclarées responsables des dommages litigieux et condamnées à en supporter la réparation,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 77-1488 du 30 décembre 1977 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 9 mai 1989 :
- le rapport de M. ZUNINO, conseiller,
- les observations de Me de la VARDE, avocat de la Société Générale d'Entreprises pour les Travaux Publics et Industriels,
- les conclusions de M. JOUGUELET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que si la commune de MANDELIEU soutient que le jugement attaqué est irrégulier en la forme et est intervenu sur une procédure irrégulière, elle n'a pas assorti ce moyen de précisions permettant d'en apprécier la portée ; que ce moyen doit donc être écarté ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'au cours du mois d'octobre 1982, une partie du quai aménagé sur les berges du Riou de l'Argentière, à MANDELIEU, s'est effondrée, entraînant des dommages aux bateaux qui se trouvaient ancrés en ces lieux ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et des expertises prescrites en référé que l'effondrement du quai est dû à la suppression de l'assise des blocs de support, à la suite d'un affouillement résultant du dragage du bassin par l'entreprise SHEMA, celle-ci n'ayant pas respecté les cotes de profondeur et les distances du quai qui lui avaient été impérativement fixées ; qu'il suit de là que la responsabilité de la société SHEMA est engagée dans la survenance de ce sinistre, et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de NICE l'a écartée ;
Considérant qu'il appartient à la cour, saisie du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur les autres moyens de défense invoqués, tant en première instance qu'en appel, par la société SHEMA ;
Considérant que si la société SHEMA ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la commune de ce que la façon dont elle conduisait les travaux n'a pas été surveillée par la commune lorsqu'elle les effectuait, il résulte de l'instruction que le quai dont s'agit était affecté de vices touchant à l'absence de fondations, lesquels ont contribué à la naissance et à l'étendue du sinistre ; que ce fait, imputable à la commune, est de nature à atténuer la responsabilité de la société SHEMA, dont il sera fait une exacte appréciation en la fixant à la moitié des conséquences dommageables du sinistre ;
Sur le préjudice :
Considérant qu'il résulte des expertises que la somme de 384 035 Francs doit être retenue au titre des travaux de remise en état ; que la commune justifie de dépenses d'hébergement des bateaux pendant la période d'indisponibilité des installations pour un montant de 100 456 Francs ; qu'elle n'établit pas en revanche avoir perdu des redevances de location de mouillages ; que le préjudice s'établit donc à la somme totale de 484 491 Francs ;
Sur la réparation :
Considérant qu'en raison du partage de responsabilité ci-dessus défini, la société SHEMA doit être condamnée à payer à la commune de MANDELIEU, la somme de 242 245,50 Francs ; que cette somme devra produire intérêts au taux légal, comme demandé, à compter de la date d'enregistrement de la demande au tribunal, soit le 8 juin 1984 ;
Considérant que la commune de MANDELIEU a demandé le 14 avril 1986, la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité à laquelle elle a droit ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande,
ARTICLE 1er : Le jugement du tribunal administratif de NICE, en date du 12 février 1986 est annulé.
ARTICLE 2 : La société SHEMA est condamnée à payer à la commune de MANDELIEU LA NAPOULE la somme de 242 245,50 Francs.
ARTICLE 3 : Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 8 juin 1984 ; les intérêts échus au 14 avril 1986 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.