Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 17 avril 1989, présentée par la SCP BOUT-CARET, GALAY, avocats, pour les époux X..., demeurant ... ; les époux X... demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 16 décembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Marseille n'a fait que partiellement droit à leurs demandes d'indemnisation des préjudices subis par leur fille mineur Cathie à l'occasion de l'accident dont elle a été victime le 27 mai 1984 et des préjudices matériels qu'il leur a occasionnés ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Cavaillon au paiement, outre intérêts et leur capitalisation, d'une indemnité de 171 000 francs pour l'enfant, et d'une indemnité de 41 769,44 francs réparant leurs préjudices matériels, ainsi que d'une somme de 6 000 francs au titre de l'article R. 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 22 mai 1990 :
- le rapport de M. ZUNINO, conseiller ;
- les observations de Me GABOLDE, avocat du centre hospitalier de CAVAILLON ;
- et les conclusions de M. JOUGUELET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requérants demandent l'annulation du jugement attaqué en tant seulement que ce dernier a prononcé contre le centre hospitalier de Cavaillon une condamnation qu'ils estiment insuffisante ;
Sur la régularité de la procédure devant le tribunal administratif :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 162 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, dans sa rédaction applicable à la date du jugement attaqué "Sauf disposition contraire, toute partie doit être avertie, par une notification faite conformément aux articles R. 107 et R. 108, du jour où l'affaire sera portée en séance. Lorsqu'elle est représentée devant le tribunal, la notification est faite à son mandataire. Dans les deux cas, l'avertissement est donné cinq jours au moins avant la séance. Toutefois, en cas d'urgence, ce délai pourra être réduit à deux jours par une décision expresse du président du tribunal administratif qui sera mentionnée sur la convocation." ;
Considérant qu'il résulte de l'avis de réception postal que le conseil des époux X... n'a reçu que le 6 décembre 1988, notification de la date d'audience fixée au 2 décembre 1988 ; que les époux X... sont donc fondés à soutenir, ainsi qu'ils le font expressément, que le jugement qu'ils attaquent a été rendu sur une procédure irrégulière ; qu'il y a donc lieu d'annuler ledit jugement en tant qu'il a arrêté le montant de la condamnation du centre hospitalier de Cavaillon ; qu'il y a lieu sur ces points de statuer immédiatement sur cette condamnation ;
Sur les préjudices et la condamnation :
Considérant qu'il est constant que l'enfant X... a été brûlée au dos, le 27 mai 1984, par suite de l'écoulement de l'eau chaude d'une bouillotte au cours de son transport, immédiatement après sa naissance, à l'intérieur du centre hospitalier de Cavaillon ; que de ce fait, elle a dû être hospitalisée au centre hospitalier d'Avignon et subir des soins prolongés ;
Considérant que la responsabilité du centre hospitalier, qui résulte de l'instruction, n'est pas contestée ; que la caisse de mutualité sociale du Vaucluse a expressément déclaré avoir été désintéressée des déboires occasionnés par l'accident survenu à Cathie X..., le 27 mai 1984 ;
Sur le préjudice de l'enfant :
Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise que Cathie X... a subi des brûlures qui lui ont occasionné une incapacité totale temporaire de 1 mois, une incapacité temporaire partielle de 25 % pendant 8 mois 1/2 et qu'il demeure une incapacité permanente partielle de 4 % ; que les douleurs ont été qualifiées d'assez importantes ; que persiste un préjudice esthétique important lié aux séquelles de brûlures sur près de la moitié du dos ; que ce dernier préjudice pourra toutefois être atténué par le recours à une chirurgie réparatrice appropriée, à la fin de la croissance de l'enfant ; que l'ensemble de ces préjudices est générateur de troubles dans les conditions d'existence ; qu'il sera fait une juste appréciation de ces préjudices en les évaluant à 110 000 francs, dont 30 000 francs correspondent au préjudice esthétique ; qu'il y a donc lieu d'accorder cette somme aux époux X..., en leur qualité d'administrateurs légaux des biens de leur fille mineure Cathie, étant précisé que s'il est recouru ultérieurement à la chirurgie réparatrice des lésions cutanées dont s'agit, il appartiendra à l'intéressée, et dans le cas échéant à la caisse d'assurance maladie, de réclamer, de ce chef, une réparation supplémentaire, cette intervention devant, si elle est pratiquée, être regardée comme directement imputable à l'accident sus-mentionné ;
Sur le préjudice des parents :
Considérant qu'il y a lieu de prendre en compte, pour évaluer le préjudice matériel des époux X..., les seuls débours ayant eu un lien direct avec l'accident dont a été victime leur enfant et résultant des soins et traitements nécessités par cet accident ; qu'ainsi le préjudice d'exploitation allégué, à le supposer établi, ne saurait, en tout état de cause constituer un préjudice indemnisable ; qu'il n'est pas établi que le montant des salaires versés à un ouvrier agricole du 1er au 13 juillet 1984, soit postérieurement à l'hospitalisation de l'enfant, soit la conséquence directe des troubles nés de cet accident ;
Considérant qu'il sera fait une exacte appréciation des préjudices matériels directement imputables à l'accident en les fixant à 9 064,50 francs ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il convient de mettre les frais d'expertise à la charge du centre hospitalier de CAVAILLON ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
Considérant que les époux X... ont droit aux intérêts au taux légal, sur les indemnités ci-dessus, à compter du 26 août 1986, date de réception, par le centre hospitalier, de leur demande d'indemnisation ;
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 17 avril 1989 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article R. 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article R. 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner le centre hospitalier de Cavaillon à payer aux époux X... la somme de 5 000 francs au titre des sommes exposées par eux et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 16 décembre 1988 est annulé en tant qu'il a statué sur le montant des préjudices des consorts X....
Article 2 : Le centre hospitalier de CAVAILLON est condamné à payer à M. et Mme X..., en leur qualité d'administrateurs légaux de leur fille mineure Cathie, la somme de 110 000 francs, et en leur nom personnel la somme de 9 064,50 francs. Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 26 août 1986 et les intérêts échus au 17 avril 1989 seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le centre hospitalier de CAVAILLON versera à M. et Mme X... une somme de 5 000 francs au titre des dispositions de l'article R. 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Les frais d'expertise sont mis à la charge du centre hospitalier de CAVAILLON.
Article 5 : Le surplus de la demande des époux X... est rejeté.