La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/1990 | FRANCE | N°89LY00536

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 12 juin 1990, 89LY00536


Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 20 janvier 1989 par laquelle le président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête visée ci-après ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 janvier 1988 présentée par Melle Béatrice X... demeurant Abbaye de Rosenland, Baccara III, ... ;
Melle X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 1987 p

ar lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes en déchar...

Vu la décision en date du 2 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 20 janvier 1989 par laquelle le président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête visée ci-après ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 janvier 1988 présentée par Melle Béatrice X... demeurant Abbaye de Rosenland, Baccara III, ... ;
Melle X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes en décharge des impositions à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1977 à 1981 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
3°) d'annuler la décision de rejet par le ministre du budget de son recours gracieux tendant à obtenir le bénéfice des dispositions d'une instruction en date du 7 septembre 1981 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 29 mai 1990 :
- le rapport de M. GAILLETON, conseiller ;
- et les conclusions de M RICHER, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement du tribunal administratif :
Considérant que pour contester la régularité du jugement attaqué Melle X... soutient que les premiers juges ont à tort fait application des dispositions de l'ancien article 179 du code général des impôts au lieu des articles L 66 et L 67 du livre des procédures fiscales ; que l'application par le juge des règles relatives à la procédure d'imposition est en tout état de cause sans incidence sur la régularité du jugement lui-même ; qu'ainsi le moyen invoqué est inopérant ;
Sur les conclusions tendant à obtenir la décharge des impositions taxées d'office au titre des années 1977 à 1980 :
En ce qui concerne la régularité de la procédure de taxation d'office utilisée :
Considérant qu'aux termes de l'article 179 du Code général des impôts applicable au présent litige : " Est taxé d'office à l'impôt sur le revenu tout contribuable qui n'a pas souscrit, dans le délai légal, la déclaration de son revenu global prévue à l'article 170. Il en est de même, sous réserve des dispositions particulières relatives au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux lorsque le contribuable s'est abstenu de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications de l'admi-nistration" ; qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 179 A du même code : "La procédure de taxation d'office en cas de défaut de production de la déclaration des revenus prévue à l'article 170 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure" ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que Melle X... s'est abstenue de souscrire sa déclaration au titre de l'année 1978 malgré la mise en demeure qui lui a été faite ; qu'ainsi, en vertu des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 179 et 179 A précités, l'administration a pu en tout état de cause procéder à la taxation d'office des revenus perçus par l'intéressée au titre de cette année, quel que soit par ailleurs le fondement légal ayant servi à la motivation des redressements notifiés ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par lettre du 9 octobre 1981, l'administration a, sur le fondement des dispositions de l'article 176 alors applicable, invité Melle X... à fournir des explications sur différentes opérations figurant à ses comptes bancaires ; que dans sa réponse en date du 9 novembre 1981, la redevable a indiqué qu'un délai supplémentaire lui était nécessaire pour satisfaire à cette demande en raison du retard mis par la banque à lui fournir l'un des relevés de ses comptes ; qu'à supposer établie la réalité du motif allégué, rien ne faisait obstacle à ce qu'elle apportât des explications sur les opérations des deux autres comptes bancaires faisant également l'objet de la demande ; que dans une réponse ultérieure présentée tardivement le 30 novembre 1981 l'intéressée s'est bornée à faire état d'un gain au jeu, d'avances ou de prêts qui lui auraient été consentis par des amis, d'erreurs dans le dépouillement de ses comptes bancaires sans que ces allégations soient assorties des justifications permettant à l'administration d'en vérifier le bien-fondé ; qu'il en va de même s'agissant d'une partie des bons anonymes dont il était également fait état dans la réponse ; qu'il suit de là que l'administration a pu à bon droit pour les années 1977, 1979 et 1980 estimer que l'intéressée n'avait pas satisfait aux prescriptions de l'article 176 du code et dès lors la taxer d'office en application des dispositions susmentionnées du deuxième alinéa de l'article 179 du même code ; qu'il appartient dès lors à la requérante d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant en premier lieu que Melle X..., en se bornant à indiquer pour 1977 que la somme de 85 420 francs, total des versements effectués à ses comptes bancaires, représente probablement des revenus professionnels, ne conteste ni le montant ainsi taxé ni n'indique la catégorie de revenus dans laquelle cette somme aurait dû être imposée ; qu'elle n'établit pas ainsi qu'elle ait fait à tort l'objet pour cette année d'une taxation d'office au titre des revenus d'origine indéterminée ; qu'elle fait par ailleurs état au titre des années 1979 et 1980 de remboursements de bons de caisse pour un montant total respectif de 36 100 francs et 208 125 francs ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que l'administration a effectivement tenu compte, en fonction des justificatifs fournis, des remboursements allégués à hauteur de 35 770 francs pour 1979 et 198 875 francs pour 1980 ; que, si la requérante soutient qu'une erreur a été commise par le service dans le dépouillement des ses comptes bancaires de l'année 1980, elle n'apporte elle-même aucun justificatif à l'appui de son propre décompte ;

Considérant en second lieu que la requérante fait état au titre des anées 1978 et 1980 de prêts ou de libéralités qui lui auraient été consentis pour un montant total respectif de 70 000 francs et 120 000 francs ; qu'il résulte de l'instruction que la réalité de ces prêts n'est établie par aucune pièce probante ; qu'en revanche il n'est pas contesté par l'administration que les sommes en cause présentent le caractère de subsides qui lui ont été versés par des tiers ; qu'il résulte de l'ensemble des circonstances de l'affaire que les subsides ainsi versés à Melle X..., qui a reconnu par ailleurs s'être livrée à la prostitution pour une partie de la période litigieuse, ne peuvent être regardés comme présentant un caractère de pure libéralité ; qu'en vertu de l'article 92-1 du code général des impôts ces subsides sont dès lors imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; qu'il s'ensuit qu'en procédant à leur taxation au titre des revenus d'origine indéterminée l'administration a méconnu le champ d'application de la loi ; qu'il y a lieu dès lors, sans qu'il soit besoin sur ce point d'examiner les moyens présentés, de réduire les bases d'imposition de 70 000 francs au titre de 1978 et de 120 000 francs au titre de 1980 ;
Sur les conclusions tendant à obtenir la décharge de l'imposition effectuée au titre de 1981 :
Considérant que Melle X... soutient qu'elle n'a accepté les bases de l'évaluation administrative du bénéfice non commercial se rapportant à son activité de prostituée qu'en raison des pressions exercées par le vérificateur ; qu'elle n'apporte toutefois à l'appui de ce moyen aucun élément de nature à établir que son consentement aurait été vicié ; qu'il sensuit qu'elle n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition serait irrégulière ; qu'elle n'apporte par ailleurs aucun élément permettant de démontrer l'exagération des bases retenues ; que les conclusions dirigées contre l'évaluation administrative fixant à 80 000 francs, le B.N.C. réalisé par Melle X... au titre de 1981 ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
Sur les conclusions en annulation de la décision de rejet du recours gracieux :
Considérant qu'une partie des conclusions de la requête doit être regardée comme tendant à obtenir l'annulation de la décision de rejet par le ministre chargé du budget du recours gracieux présenté par Melle X... aux fins d'obtenir le bénéfice des dispositions d'une instruction ministérielle en date du 7 septembre 1981 et d'une note en date du 7 mai 1982 ;
Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 de telles conclusions relèvent en appel de la compétence du Conseil d'Etat ; que ces conclusions n'apparaissant pas manifestement irrecevables il n'y a pas lieu en l'espèce de faire application des dispositions de l'article R 83 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; qu'il y a lieu dès lors, par application de l'article R 81 de ce code, de transmettre les conclusions susanalysées au Conseil d'Etat ;
Article 1er : Les conclusions de la requête de Melle X... tendant à l'annulation de la décision de rejet par le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget chargé du budget de son recours gracieux sont transmises au Conseil d'Etat..
Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu assignées à Melle X... au titre des années 1978 et 1980 sont réduites respectivemnt d'une somme de 70 000 francs et 120 000 francs..
Article 3 : Melle X... est déchargée des droits et pénalités correspondant à la réduction des bases d'imposition définies à l'article 2..
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 17 décembre 1987 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision..
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Melle X... est rejeté..


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 89LY00536
Date de la décision : 12/06/1990
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT OU INSUFFISANCE DE DECLARATION.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - RENVOI DE CONCLUSIONS A LA JURIDICTION COMPETENTE.


Références :

CGI 179, 179 A
CGI Livre des procédures fiscales L66, L67
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R83, R81
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: GAILLETON
Rapporteur public ?: RICHER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1990-06-12;89ly00536 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award