La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/06/1990 | FRANCE | N°89LY01065

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 13 juin 1990, 89LY01065


Vu la décision en date du 25 janvier 1989 enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989 par laquelle le président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour en application du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 la requête présentée le 2 novembre 1987 ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 2 novembre 1987 et 12 mars 1988, présentés pour la S.A. LES CHANTIERS MODERNES dont le siège social est ... (GIRONDE), représentée par ses président direc

teur général et administrateurs en exercice, par Me Y..., avocat aux co...

Vu la décision en date du 25 janvier 1989 enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989 par laquelle le président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour en application du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 la requête présentée le 2 novembre 1987 ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 2 novembre 1987 et 12 mars 1988, présentés pour la S.A. LES CHANTIERS MODERNES dont le siège social est ... (GIRONDE), représentée par ses président directeur général et administrateurs en exercice, par Me Y..., avocat aux conseils ;
Elle demande à la cour :
- à titre principal, d'annuler le jugement en date du 26 juin 1987 par lequel le tribunal administra-tif de MARSEILLE l'a condamnée solidairement avec l'Etat à payer à la ville de MARSEILLE une indemnité de 212 476,01 Francs T.T.C. avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 1985 et capitalisation des intérêts à la date du 15 avril 1986 et de l'exonérer de toute responsabilité ;
- à titre subsidiaire, pour le cas où serait maintenue la condamnation solidaire de l'Etat et de la société anonyme, d'annuler le jugement précité en ce qu'il la condamne à garantir l'Etat et de condamner l'Etat à la garantir de la condamnation prononcée par le tribunal administratif ;
- d'annuler le jugement en ce qu'il a mis les frais d'expertise à sa charge et de les mettre à la charge de l'Etat ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux de l'Etat ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 16 mai 1990 :
- le rapport de Mme DEVILLERS, conseiller ;
- les observations de Me X..., subs-tituant la S.C.P. COUTARD - MAYER, avocat de la ville de MARSEILLE ;
- et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par un jugement en date du 26 juin 1987, le tribunal administratif de MARSEILLE a condamné, d'une part, solidairement l'Etat en sa quali-té de maître d'ouvrage et la société anonyme LES CHANTIERS MODERNES en sa qualité d'entrepreneur, à payer à la ville de MARSEILLE une indemnité en réparation des désordres subis par la station de pompage des eaux usées dont elle est propriétaire, et d'autre part, la société LES CHANTIERS MODERNES à garantir l'Etat de la totalité de la condamnation et à supporter la charge des frais d'expertise ;
Considérant que la société LES CHANTIERS MODERNES qui n'avait pas, malgré une mise en demeure, produit de mémoire en défense en première instance demande en appel à être exonérée de toute responsabili-té, à être déchargée tant de l'obligation de garantir l'Etat que des frais d'expertise, ainsi que, subsidiai-rement, à être garantie par l'Etat ;
Considérant que la ville de MARSEILLE, par la voie de l'appel incident demande la condamnation de la société LES CHANTIERS MODERNES au paiement des frais du constat d'urgence ordonné par le président du tribunal administratif de MARSEILLE le 19 mai 1983 ;
En ce qui concerne l'appel principal :
Sur la responsabilité de l'entrepreneur à l'égard de la ville de MARSEILLE :
Considérant que l'Etat a confié par marché de travaux publics la construction de l'ouvrage d'art n° 32 de l'autoroute A 55 reliant MARSEILLE à FOS-SUR--MER à l'entreprise LES CHANTIERS MODERNES ; qu'il est constant qu'au cours de l'exécution des travaux de fo-rage du pieu sud-est n° 51, les installations de la station de pompage des eaux usées de la ville de MARSEILLE ont été endommagées le 3 mai 1983 par suite de la perforation par l'entreprise LES CHANTIERS MODERNES d'une ancienne canalisation qui a été envahie par le béton de remplissage du pieu, lequel après rupture du bouchon obturant ladite canalisation s'est répandu dans la fosse de pompage et en a bloqué les équipements électromécaniques ; qu'ainsi est établi un lien de causalité direct et certain entre les travaux exécutés par l'entreprise LES CHANTIERS MODERNES et les désordres constatés dans la station de pompage des eaux usées appartenant à la ville de MARSEILLE qui à la qualité de tiers par rapport à l'ouvrage public dont s'agit ; que dès lors, l'entrepreneur requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a déclaré responsable, solidairement avec l'Etat, des conséquences des désordres causés à la station de pompage appartenant à la ville de MARSEILLE ;
Sur la condamnation à garantir l'Etat :
Considérant, en premier lieu, que l'appel en garantie formulé par l'Etat avait pour fondement juridique la faute commise par l'entrepreneur dans l'accomplissement de ses obligations contractuelles ;
Considérant qu'il ne ressort pas de l'ins-truction et qu'il n'est d'ailleurs par allégué qu'à la date du dommage, l'entrepreneur pouvait se prévaloir de la réception sans réserve des travaux qui aurait eu pour effet de mettre fin aux rapports contractuels nés du marché ;

Considérant que le cahier des clauses techni-ques particulières du marché conclu entre l'Etat et l'entreprise requérante indiquait dans son arti-cle I O2 : "les ouvrages sont situés au-dessus d'une station de pompage des eaux usées appartenant à la ville de MARSEILLE. Cette station devra être, pendant toute la durée du chantier maintenue en service et ses accès dégagés, et dans son article I O3-4, alinéa 2 : "certains pieux recoupent des réseaux abandonnés qui devront être démolis et remblayés avant forage des pieux" ;
Considérant, en outre, qu'aux termes de l'ar-ticle 35 du cahier des clauses administratives généra-les applicables aux marchés de travaux publics de l'Etat : "l'entrepreneur a à l'égard du maître de l'ouvrage, la responsabilité pécuniaire des dommages aux personnes et aux biens" ; que ces stipulations ont pour conséquence de mettre à la charge de l'entrepre-neur requérant la réparation du préjudice subi par la ville de MARSEILLE dès lors qu'il résulte de l'instruc-tion que, d'une part, l'Etat n'était pas tenu par les stipulations du marché de remettre des plans à l'entrepreneur qui devait rechercher et démolir les réseaux abandonnés avant de forer les pieux et d'autre part, qu'il n'est pas établi que les plans remis aient comporté des erreurs constitutives d'une faute engageant la responsabilité du maître d'ouvrage ;
Considérant, en second lieu, que l'entrepre-neur ne peut utilement invoquer pour écarter sa respon-sabilité les stipulations d'un contrat auquel il est étranger, conclu en novembre 1982 entre l'Etat et la société des TUYAUX BONNA pour l'exécution des travaux de déviation d'une partie de la conduite d'amenée des eaux usées à la station de pompage ;
Considérant qu'il ne peut davantage invoquer un vice de conception, imputable à l'Etat, du batardeau d'obturation de l'ancienne canalisation, lequel réalisé pour retenir de l'eau a cédé sous la pression du béton qu'il n'était pas destiné à recevoir et qu'il n'aurait pas reçu sans la faute de l'entrepreneur dans l'accom-plissement de ses obligations contractuelles ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'entreprise LES CHANTIERS MODERNES n'est pas fondée à se plaindre que par le jugement attaqué, le tribunal administratif l'a condamnée à garantir l'Etat de la totalité de la condamnation prononcée ;
Sur l'appel en garantie :
Considérant que la société LES CHANTIERS MODERNES est irrecevable à demander pour la première fois en appel à être garantie par l'Etat de la condamnation mise à sa charge ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que l'entrepreneur requérant demeure en définitive le seul débiteur de la condamna-tion solidaire avec l'Etat prononcée par le tribunal administratif ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a mis à sa charge les frais d'expertise ;
En ce qui concerne l'appel incident :

Considérant que par la voie de l'appel incident, la ville de MARSEILLE demande la condamnation de l'entreprise LES CHANTIERS MODERNES au paiement des frais de constat d'urgence fixés à 5 368 Francs par une ordonnance en date du 25 juillet 1983 du président du tribunal administratif de MARSEILLE ;
Considérant que ce constat avait été ordonné le 19 mai 1983 et que l'article 3 de l'ordonnance du président de la 5ème chambre du tribunal administratif précisait : "les frais de constat après leur taxation seront avancés par la ville, sans préjudice de leur attribution définitive en cas d'instance éventuelle sur le fond" ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que le tribunal administratif saisi du litige a omis de statuer sur les conclusions de la ville de MARSEILLE tendant au paiement des frais du constat d'urgence ; qu'ainsi, le jugement du tribunal adminis-tratif de MARSEILLE en date du 26 juin 1987 doit, sur ce point, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la ville de MARSEILLE devant le tribunal administratif de MARSEILLE ;
Considérant que l'entreprise LES CHANTIERS MODERNES demeure en définitive le seul débiteur de la condamnation solidaire avec l'Etat prononcée par le tribunal administratif ; que dès lors la ville de MARSEILLE est fondée à soutenir que les frais du constat d'urgence doivent être mis en totalité à la charge de l'entreprise LES CHANTIERS MODERNES ;
Article 1er : Le jugement en date du 26 juin 1987 du tribunal administratif de MARSEILLE est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les frais du constat d'urgence.
Article 2 : La société anonyme LES CHAN-TIERS MODERNES est condamnée solidairement avec l'Etat à régler à la ville de MARSEILLE la somme de 5 368 Francs correspondant aux frais du constat d'urgence dont cette dernière à fait l'avance.
Article 3 : La société anonyme LES CHAN-TIERS MODERNES est condamnée à relever et à garantir l'Etat de la condamnation prononcée à l'article 2.
Article 4 : La requête de la société LES CHANTIERS MODERNES est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 89LY01065
Date de la décision : 13/06/1990
Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - PERSONNES RESPONSABLES - COLLECTIVITE PUBLIQUE OU PERSONNE PRIVEE.

TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - LIEN DE CAUSALITE - EXISTENCE.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: DEVILLERS
Rapporteur public ?: HAELVOET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1990-06-13;89ly01065 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award