La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/07/1990 | FRANCE | N°89LY00070

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 19 juillet 1990, 89LY00070


Vu la décision en date du 1er décembre 1988, enregistrée au greffe de la cour le 19 décembre 1988, par laquelle le président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée par M. Patrick ERBA ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 4 juin et 5 octobre 1987, présentés par la SCP PIWNICA - MOLINIE, avocat aux Conseils, pour M. Patrick ERBA, demeurant à MORET

SUR LOING (Seine et Marne) ;
M. ERBA demande à la Cour :
1) de réfo...

Vu la décision en date du 1er décembre 1988, enregistrée au greffe de la cour le 19 décembre 1988, par laquelle le président de la 5ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée par M. Patrick ERBA ;
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 4 juin et 5 octobre 1987, présentés par la SCP PIWNICA - MOLINIE, avocat aux Conseils, pour M. Patrick ERBA, demeurant à MORET SUR LOING (Seine et Marne) ;
M. ERBA demande à la Cour :
1) de réformer le jugement du 10 avril 1987 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a condamné l'hôpital de Sallanches à lui verser une indemnité de 922 054,46 francs outre intérêts qu'il estime insuffisante, en réparation du préjudice résultant pour lui de l'incapacité partielle dont il reste atteint à la suite d'une intervention chirurgicale subie par lui le 2 octobre 1979,
2) de condamner l'hôpital de Sallanches à lui payer la somme de 2 203 481 francs ainsi que les intérêts et les intérêts des intérêts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 27 juin 1990 :
- le rapport de M. CHANEL, conseiller ;
- les observations de la SCP PIWNICA - MOLINIE, avocat de M. Patrick ERBA, de Me X..., substituant la SCP C0UTARD - MAYER, avocat du centre hospitalier de Sallanches, de Me Pierre COHENDY, avocat de la C.P.A.M. de la Haute-Savoie et de Me GRANJON, substituant Me Etienne GRUMBACH, avocat de M. Alain Y... ;
- et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 10 avril 1987 le tribunal administratif de Grenoble a condamné l'hôpital de Sallanches à verser la somme de 922 054,46 francs, outre intérêts au taux légal au 21 février 1986, au titre du préjudice subi par M. ERBA à la suite d'une opération dont le Docteur Y... avait confié la charge à un chirurgien-stagiaire ainsi que la somme de 330 852,07 francs à la C.P.A.M. de la Haute- Savoie au titre du remboursement des prestations dues par elle consécutivement à cette opération ; que M. ERBA fait appel de ce jugement auquel il reproche d'avoir fait une évaluation insuffisante du préjudice qu'il a subi ; que la caisse demande à la cour d'augmenter le montant des sommes dont elle est en droit de réclamer le remboursement ;
Sur l'évaluation du préjudice subi par M. ERBA :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport en date du 18 juillet 1986 des experts désignés en référé en première instance, qu'âgé de 24 ans au jour de l'opération et, à la suite de celle-ci, amputé du membre inférieur gauche à la cuisse, M. ERBA demeure atteint d'une incapacité permanente partielle de 70 % ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de porter, comme le demande le requérant, ce taux de 70 % à 90 % ; qu'en fixant à 500 000 francs la perte de revenus postérieure au 26 février 1981, date à laquelle a pris fin la période d'incapacité temporaire totale qu'a subie M. ERBA, qui, si l'exercice d'une activité professionnelle ne lui est pas interdite, n'a pu poursuivre que quelques mois son activité dans le restaurant que possédaient son père et sa mère et qu'ils ont été obligés de vendre à leur retraite, ni trouver d'emploi depuis lors, le tribunal administratif a fait une évaluation insuffisante de la réparation à laquelle a droit l'intéressé au titre de ce chef de préjudice qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de porter à un million de francs ; qu'en estimant à 50 000 francs les montants, d'une part, du préjudice esthétique et, d'autre part, du préjudice résultant, compte tenu des sept interventions chirurgicales endurées début octobre 1979, des souffrances subies par M. ERBA, ainsi qu'à la somme de 300 000 francs les troubles apportés par les suites de l'opération dans les conditions d'existence de la victime, eu égard aux nombreuses activités sportives qu'elle pratiquait auparavant, le tribunal n'a pas fait une appréciation globalement insuffisante des chefs de préjudice susindiqués ; que M. ERBA n'établit pas que l'acquisition de vêtements pour un montant de 1 777 francs et d'un poste de télévision postérieurement à l'opération litigieuse ait été nécessitée par les suites de celle-ci ; que, s'il demande que lui soit allouée la somme de 21 022 francs au titre de ses frais de déplacement à Marseille trois fois par an pour le réappareillage de sa prothèse, il ne justifie pas de la réalité et du montant des frais qu'il invoque ;

Considérant qu'aux sommes retenues par le tribunal administratif pour un montant de 306 122,53 francs au titre des frais médicaux, pharmaceutiques, d'hospitalisation, de prothèse et de transport exposés par la caisse primaire, il y a lieu d'ajouter 7 458 francs au titre des frais d'hospitali- sation pour la période du 25 mai 1987 au 5 juin 1987, postérieure à l'introduction du jugement du tribunal administratif et 64 000 francs correspondant au renouvellement périodique du grand appareillage de la victime ; qu'ainsi le préjudice total qui doit être mis à la charge de l'hôpital de Sallanches s'élève à 1 824 364,53 francs ;
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie :
En ce qui concerne le principal de la créance de la caisse :
Considérant qu'en vertu de l'article L 376-1 du code de la sécurité sociale, la caisse est admise à poursuivre, contre le tiers responsable de l'accident, le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part de l'indemnité mise à la charge de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité qui présente un caractère personnel ;
Considérant que compte tenu des modifications apportées par le présent arrêt à l'estimation des frais médicaux et pharmaceutiques, des frais d'hospitalisation et des frais de prothèse et d'orthopédie, à celle des pertes de revenus et à celle des troubles de toute nature dans les conditions d'existence, déduction faite du préjudice d'agrément subi par la victime, la part de l'indemnité due par l'hôpital de Sallanches qui répare l'atteinte portée à l'intégrité physique de M. ERBA, et sur laquelle peuvent s'imputer les droits de la caisse, s'élève à 1 474 364,53 francs ; que la caisse justifie, au jour du présent arrêt, de 24 729,54 francs de débours au titre des indemnités journalières versées dont 7 037,52 francs correspondant à la période à la date de la consolidation et de 377 580,53 francs au titre des prestations en nature, soit au total 402 310,07 francs ; qu'il y a lieu de porter à ce montant la somme que l'hôpital de Sallanches a été condamné, par le jugement attaqué, à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie ;
En ce qui concerne les intérêts :
Considérant que la partie de l'indemnité correspondant aux prestations en nature nouvelles dont la caisse a justifié pour la première fois devant la cour doit porter intérêts à compter des dates auxquelles les sommes correspondantes ont été demandées, soit le 24 mai 1988 à concurrence de 64 000 francs et le 28 juin 1988 à concurrence de 7 458 francs ;
Sur le montant des indemnités dues à M. ERBA :
En ce qui concerne le principal :
Considérant que, compte tenu des remboursements dus à la caisse primaire qui, au titre des indemnités versées s'élèvent à 24 729,54 francs et non à 17 692,02 francs comme le soutient le requérant, le montant de l'indemnité que l'hôpital de Sallanches a été condamné à verser à M. ERBA doit être porté à la somme de 1 422 054,46 francs ;
En ce qui concerne les intérêts des intérêts :

Considérant que M. ERBA a demandé les 4 juin 1987 et 23 février 1989 la capitalisation des intérêts afférents à l'indemnité que le tribunal administratif de Grenoble lui a accordée ; qu'à chacune de ces dates, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Sur l'appel provoqué de l'hôpital de Sallanches :
Considérant que, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, l'hôpital de Sallanches, à qui il appartient s'il s'y croit fondé, d'émettre à l'encontre du Dr Y... un titre de recettes pour le recouvrement de la créance dont il se prévaut, n'est pas recevable à faire valoir cette créance directement devant le juge administratif, même par la voie de l'appel en garantie ; que, dès lors, l'hôpital de Sallanches n'est pas recevable à demander, par la voie de l'appel provoqué, que le Dr Y... soit condamné à le garantir des condamnations prononcées à son encontre ;
Sur l'application des dispositions de l'article R 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article R 222 et de condamner l'hôpital de Sallanches à payer à M. ERBA la somme de 5 000 francs au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu par contre, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article R 222 et de condamner l'hôpital de Sallanches à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie la somme de 5 000 francs au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : La somme que l'hôpital de Sallanches a été condamné à verser à M. ERBA par le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 10 avril 1987 est portée de 922 054,46 francs à 1 422 054,46 francs..
Article 2 : La somme de 1 422 054,46 francs mentionnée à l'article 1er ci-dessus portera intérêt au taux légal à compter du 21 février 1986. Les intérêts échus les 4 juin 1987 et 23 février 1989 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts..
Article 3 : La somme que l'hôpital de Sallanches a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du département de la Haute-Savoie, par le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 10 avril 1987, est portée de 330 852,07 francs à 402 310,07 francs..
Article 4 : Les sommes de 64 000 francs et 7 458 francs, demandées pour la première fois devant la cour par la caisse primaire d'assurance maladie du département de la Haute-Savoie, porteront intérêt à compter respectivement du 24 mai 1988 et du 28 juin 1988..
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 10 avril 1987 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision..
Article 6 : L'hôpital de Sallanches versera à M. ERBA une somme de 5 000 francs au titre de l'article R 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel..
Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête de M. ERBA et de la caisse primaire d'assurance maladie du département de la Haute-Savoie est rejeté ainsi que l'appel provoqué de l'hôpital de Sallanches..


Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RECOURS OUVERTS AUX DEBITEURS DE L'INDEMNITE - AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SECURITE SOCIALE - DROITS DES CAISSES DE SECURITE SOCIALE.


Références :

Code civil 1154
Code de la sécurité sociale L376-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222


Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: CHANEL
Rapporteur public ?: HAELVOET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Date de la décision : 19/07/1990
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 89LY00070
Numéro NOR : CETATEXT000007452776 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1990-07-19;89ly00070 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award