La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/01/1991 | FRANCE | N°89LY01080;89LY01081

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 08 janvier 1991, 89LY01080 et 89LY01081


Vu les décisions, en date du 10 février 1989, enregistrées au greffe de la cour le 3 mars 1989, par lesquelles le président de la 3e sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour la ville de SAINT-ETIENNE et celle présentée pour l'entreprise GUINET-DERRIAZ et Me X... ;
Vu 1°), sous le numéro 91305, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 septembre 1987 et le mémoire complémentaire enregistré le 13 janv

ier 1988, présentés pour la ville de SAINT-ETIENNE, représentée par so...

Vu les décisions, en date du 10 février 1989, enregistrées au greffe de la cour le 3 mars 1989, par lesquelles le président de la 3e sous-section de la Section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée pour la ville de SAINT-ETIENNE et celle présentée pour l'entreprise GUINET-DERRIAZ et Me X... ;
Vu 1°), sous le numéro 91305, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 septembre 1987 et le mémoire complémentaire enregistré le 13 janvier 1988, présentés pour la ville de SAINT-ETIENNE, représentée par son maire en exercice, par la S.C.P. LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation
La ville de SAINT-ETIENNE demande au Conseil d'Etat :
1) de réformer le jugement du 25 juin 1987 par lequel le tribunal administratif de LYON a condamné les architectes Y... et CLEMENT, d'une part, et les entreprises GUINET, CONVERS et SOGERE, d'autre part, à lui verser solidairement la somme de 305 000 francs, qu'elle estime insuffisante, en réparation de désordres affectant le perron sud de son hôtel de ville ;
2) de condamner solidairement les architectes Y... et CLEMENT et les entreprises GUINET, CONVERS et SOGERE à lui verser la somme de 644 651,27 francs avec les intérêts et les intérêts des intérêts ;
3) subsidiairement d'ordonner une expertise ;
Vu 2°), sous le numéro 91394, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 16 septembre 1987 et le mémoire complémentaire enregistré le 18 janvier 1988, présentés pour l'entreprise GUINET-DERRIAZ, dont le siège est situé ..., et Me X..., demeurant ..., agissant en qualité de syndic ou règlement judiciaire de la société GUINET-DERRIAZ, par la S.C.P. RICHE, BLONDEL, THOMAS-RAQUIN, avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation ; l'entreprise GUINET-DERRIAZ et Me X... demandent au Conseil d'Etat :
1) d'annuler le jugement susvisé du tribunal administratif de LYON du 25 juin 1987 en tant qu'il porte condamnation à l'encontre de l'entreprise GUINET-DERRIAZ ;
2) de rejeter la demande présentée par la ville de SAINT-ETIENNE devant le tribunal administratif de LYON et dirigée contre l'entreprise GUINET-DERRIAZ ;
3) subsidiairement d'ordonner toute mesure d'instruction utile ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviose an VIII ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et notamment son article R 27 en vertu duquel M. CHABANOL, président de chambre, absent, a été remplacé par M. JULLIEN, conseiller le plus ancien parmi les conseillers présents, ayant le grade de président de tribunal administratif ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience du 17 décembre 1990 :
- le rapport de M. JULLIEN, président-rapporteur ;
- les observations de Me GUILLET, substituant Me Denise LATRAICHE-GUERIN, avocat de la société SUD ASPHALTE SMAC ACIEROID ;
- et les conclusions de M. RICHER, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête de la ville de SAINT-ETIENNE et celle de l'entreprise GUINET-DERRIAZ assistée de son syndic, Me X..., sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de LYON du 25 juin 1987 ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, que l'entreprise GUINET-DERRIAZ n'a pas produit de mémoire en première instance ; qu'ainsi elle ne saurait utilement soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité faute d'avoir statué sur certaines de ses conclusions ni répondu à certains de ses moyens de première instance au demeurant non précisés ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort de la minute du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient l'entreprise GUINET-DERRIAZ, ledit jugement comporte bien le visa de l'ordonnance rendue par le président du tribunal administratif de LYON le 17 mars 1987 et fixant la clôture de l'instruction au 6 avril 1987 ;
Considérant, en troisième lieu, que l'entreprise GUINET-DERRIAZ admise au règlement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de LYON en date du 17 avril 1985 et qui ne saurait par ailleurs utilement prétendre que cette circonstance faisait obstacle à sa condamnation solidaire avec les autres constructeurs à indemniser la ville de SAINT-ETIENNE, n'a pas informé le tribunal de ce changement dans sa situation ni produit le mémoire en défense qu'elle avait été mise en demeure de présenter par décision du président du tribunal administratif en date du 4 mai 1984 ; que, par suite, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué aurait été rendu sur une procédure irrégulière, faute pour le tribunal d'avoir mis en cause d'office le syndic désigné pour l'assister ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné en première instance que, lors des travaux de restauration du perron sud de l'hôtel de ville de SAINT-ETIENNE, dont la réception définitive a été prononcée le 27 avril 1976, des malfaçons ont affecté la pose des revêtements en marbre des marches et des contre-marches ; que ces malfaçons, qui étaient difficilement décelables lors de la réception, ont entrainé des désordres imprévisibles consistant en des rétentions d'eau et de nombreuses cassures et fissures des revêtements de marbre ; que de tels désordres, par leur importance et leur généralisation, étaient de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination et à engager, par suite, même s'agissant d'un chantier ouvert avant l'entrée en vigueur de la loi du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et à l'assurance dans le domaine de la construction, la responsabilité des constructeurs sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;

Considérant que les malfaçons et les désordres qui en sont la conséquence sont imputables tout à la fois à la conception de l'ouvrage et la surveillance des travaux par les architectes Y... et CLEMENT et à l'exécution desdits travaux par les entreprises GUINET, CONVERS et SOGERE qui s'étaient engagées conjointement et solidairement envers la ville de SAINT-ETIENNE maître d'ouvrage ; que la responsabilité des uns et des autres est, dès lors, solidairement engagée envers la ville, même sans faute de leur part ;
Considérant qu'aucune faute susceptible d'exonérer, même partiellement, les constructeurs de leur responsabilité n'est établie à la charge de la ville, notamment pour avoir utilisé, malgré les mises en garde de l'entreprise GUINET, des quantités excessives de sels en vue d'assurer le déneigement du perron ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni les architectes Y... et CLEMENT, ni l'entreprise CONVERS, ni l'entreprise GUINET-DERRIAZ ne sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de LYON les a déclarés solidairement responsables avec l'entreprise SOGERE de l'intégralité du préjudice subi par la ville de SAINT-ETIENNE du fait des malfaçons affectant le perron sud de son hôtel de ville ;
Sur la réparation :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'une simple réfection à l'identique, chiffrée par l'expert à 305 000 francs, n'aurait pas garanti le maître d'ouvrage contre le renouvellement des désordres ; que si la ville de SAINT-ETIENNE a fait effectuer les travaux de réfection du perron sud, pour une somme de 644 651,27 francs (TTC), les dépenses supplémentaires provenant notamment de l'utilisation d'un mortier spécial a haute performance et de l'aménagement de joints à lisser et de joints de dilatation assurent à l'ouvrage une plus-value qui ne saurait être supportée par les constructeurs ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'affaire en évaluant cette plus-value à 20 % du montant des travaux ; qu'ainsi le préjudice indemnisable s'élève à la somme de 515 721,02 francs (TTC) ;
Considérant qu'eu égard au régime applicable aux collectivités locales en matière de récupération de la taxe sur la valeur ajoutée, il y a lieu d'allouer hors taxe les indemnités correspondant, comme en l'espèce, à des dépenses d'investissement ; qu'ainsi les sommes dont les constructeurs sont redevables envers la commune de SAINT-ETIENNE s'élèvent à 419 796,92 francs ; qu'il y a lieu, dès lors, de porter à ce montant l'indemnité allouée par le tribunal administratif ;
Sur les intérêts :
Considérant que la ville de SAINT-ETIENNE a droit aux intérêts de la somme susmentionnée à compter du 28 juillet 1983, date d'enregistrement de sa demande au greffe du tribunal administratif ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 31 juillet 1984, le 18 juillet 1986 et le 14 septembre 1987 ; qu'à chacune de ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Article 1er : La somme de trois cent cinq mille francs (305 000 francs) que les architectes Y... et CLEMENT, d'une part, et les entreprises GUINET-DERRIAZ, CONVERS et SOGERE, d'autre part, ont été condamnés à payer solidairement à la ville de SAINT-ETIENNE par le jugement du tribunal administratif de LYON en date du 25 juin 1987 est portée à 419 796,92 francs. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 28 juillet 1983, les intérêts échus le 31 juillet 1984, le 18 juillet 1986 et le 14 septembre 1987 seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de LYON du 25 juin 1987 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la ville de SAINT-ETIENNE est rejeté ainsi que la requête de l'entreprise GUINET-DERRIAZ et les recours incidents et les appels provoqués de MM. Y... et CLEMENT et de l'entreprise CONVERS.


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award