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28/02/1991 | FRANCE | N°89LY00811

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1e chambre, 28 février 1991, 89LY00811


Vu la décision en date du 17 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le recours visé ci-après ;
Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 octobre 1988, présenté par le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget ;
Le ministre demande à la cour :
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) d'annuler le jugement du 31 mai 1988, par lequel le tribunal administratif...

Vu la décision en date du 17 janvier 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, le recours visé ci-après ;
Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 11 octobre 1988, présenté par le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget ;
Le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 31 mai 1988, par lequel le tribunal administratif de Marseille a accordé à la SARL Vollaire Production la réduction des pénalités afférentes à une créance privilégiée de taxes sur le chiffre d'affaires produite par le receveur des impôts auprès de Me X..., syndic désigné par le tribunal de commerce de GAP qui a prononcé le règlement judiciaire de la société ;
2°) de remettre à la charge de la SARL Vollaire Production l'obligation de payer la totalité de la créance produite ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu l'article 61 de la loi de finances du 16 avril 1930 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 14 février 1991 :
- le rapport de M. GAILLETON, conseiller ;
- et les conclusions de M. RICHER, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le tribunal de commerce de GAP a, par jugement déclaratif en date du 5 octobre 1984, prononcé le règlement judiciaire de la SARL Vollaire Production ; que le receveur des impôts de GAP a produit à titre privilégié au passif de la société, auprès du syndic désigné par le tribunal, une créance de taxes sur le chiffre d'affaires et de taxe d'apprentissage pour un montant de 427 601,36 francs dont 204 331 francs de pénalités de retard ; que le ministre chargé du budget fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a substitué aux pénalités appliquées en matière de taxes sur le chiffre d'affaires les intérêts de retard afférents aux six mois précédent le jugement déclaratif ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L 281 du livre des procédures fiscales : "Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables du Trésor ou de la direction générale des impôts doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le tribunal de grande instance, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L 199" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Vollaire Production a soutenu devant le tribunal administratif que les pénalités dont elle était redevable n'étaient plus exigibles et qu'il y avait lieu de leur substituer les intérêts de retard afférents aux six mois précédant le jugement du 5 octobre 1984 susmentionné ; que, contrairement à ce que soutient le ministre, une telle contestation portait sur la seule exigibilité de pénalités mises à la charge de la société, et non sur l'étendue du privilège du Trésor, et constituait ainsi une opposition à contrainte relevant, en vertu de l'article L 281 précité, de la compétence de la juridiction administrative ; que relevait de même de la compétence de cette juridiction, lors même que ce texte aurait eu pour objet de fixer l'étendue du privilège du Trésor, l'appréciation par voie d'exception de la légalité du décret du 15 octobre 1982 qui, codifiant les dispositions de la loi du 31 décembre 1981, a abrogé le troisième alinéa de l'article 1926 du code général des impôts ;
Sur le fond du litige :

Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 1926 du code général des impôts, applicable en matière de taxes sur le chiffre d'affaires et de taxes assimilées, dans sa rédaction en vigueur antérieurement à l'intervention du décret susmentionné du 15 octobre 1982, "En cas de faillite, liquidation de biens ou règlement judiciaire, le privilège porte sur le montant du principal, augmenté des intérêts de retard afférents aux six mois précédant le jugement déclaratif. Toutes amendes encourues sont abandonnées" ; qu'aux termes de l'article 8-1 de la loi n° 81-1179 du 31 décembre 1981, codifiée à l'article 1929 sexies du code général des impôts par le même décret "Le privilège qui s'exerce en matière de taxes sur le chiffre d'affaires, de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière et de droits de timbre ainsi que de contributions indirectes, est étendu dans les mêmes conditions et au même rang que les droits en principal à l'ensemble des majorations et pénalités d'assiette et de recouvrement appliquées à ces droits" ;
Considérant que, si aucune disposition expresse de la loi du 31 décembre 1981 ne porte abrogation du 3ème alinéa de l'article 1926 précité du code général des impôts, le maintien des dispositions prévues par cet article, lesquelles sont issues de l'article 61 de la loi de finances du 16 avril 1930, reste subordonné à la condition qu'elles ne soient pas incompatibles avec les dispositions de la loi nouvelle ;
Considérant qu'en étendant, dans les mêmes conditions et au même rang que les droits en principal, le privilège à l'ensemble des majorations et pénalités d'assiette et de recouvrement applicables notamment en matière de taxes sur le chiffre d'affaires, la loi du 31 décembre 1981 a entendu viser l'ensemble des modalités d'exercice de l'action en recouvrement, sans en excepter celles qui sont mises en oeuvre dans le cadre d'une procédure d'apurement collectif du passif ; que, par suite, le maintien des dispositions du 3ème alinéa de l'article 1926 et notamment de celle selon laquelle "toutes amendes encourues sont abandonnées" est incompatible avec le caractère privilégié désormais reconnu à l'ensemble des pénalités par l'article 8-I de la loi du 15 octobre 1982 ; que cette dernière loi ayant dès lors implicitement mais nécessairement abrogé les dispositions de la loi du 16 avril 1930, la SARL Vollaire Production n'est pas fondée à soutenir que serait illégal le décret qui a constaté cette abrogation ;
Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les dispositions du 3ème alinéa de l'article 1926 du code général des impôts ont été abrogées ; que par suite, la SARL Vollaire Production n'est pas fondée à s'en prévaloir pour soutenir que les pénalités qui lui sont réclamées ne sont pas exigibles dans leur totalité ; que le ministre chargé du budget est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande de cette société ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 31 mai 1988 est annulé.
Article 2 : L'obligation de payer les pénalités de retard d'un montant de 204 331 francs produites par le receveur des impôts auprès du syndic chargé du règlement judiciaire de la SARL Vollaire Production est remise intégralement à la charge de la société Vollaire Production.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 89LY00811
Date de la décision : 28/02/1991
Sens de l'arrêt : Annulation droits maintenus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - RESPECT DES NORMES SUPERIEURES PAR LES DISPOSITIONS FISCALES - DECRETS - CONFORMITE AU DROIT NATIONAL - Décret de codification - Décret du 15 octobre 1982 - Légalité - en tant qu'il abroge le 3ème alinéa de l'article 1926 du C - G - I.

19-01-01-005-02-02, 19-01-05-01-03 L'article 8-1 de la loi n° 81-1179 du 31 décembre 1981 codifiée à l'article 1929 sexies du CGI, en étendant à l'ensemble des majorations et pénalités le privilège du Trésor qui s'exerce notamment en matière de TVA, a implicitement mais nécessairement abrogé les dispositions de l'article 61 de la loi de finances du 16 avril 1930 prononçant l'abandon de toutes les amendes encourues en cas de procédure d'apurement collectif du passif. Le décret du 15 octobre 1982, en codifiant les dispositions de la loi du 31 décembre 1981, a, dès lors, légalement supprimé le 3ème alinéa de l'article 1926 du CGI, qui codifiait les dispositions issues de la loi du 16 avril 1930.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - RECOUVREMENT - ACTION EN RECOUVREMENT - ACTES DE POURSUITE - Opposition à contrainte - Exigibilité des pénalités en cas d'ouverture d'une procédure d'apurement collectif du passif.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - CONTENTIEUX DU RECOUVREMENT - Compétence juridictionnelle - Compétence du juge administratif - Exigibilité des pénalités de droit commun en cas de règlement judiciaire.

19-02-05 Constitue une opposition à contrainte relevant de la compétence du juge administratif le litige portant sur l'exigibilité des pénalités de droit commun contestées par un contribuable admis au règlement judiciaire, alors même que la non exigibilité résulterait de l'application des dispositions de la l'article 1929 sexies du CGI relatives à l'étendue du privilège du Trésor.


Références :

CGI 1926, 1929 sexies
CGI Livre des procédures fiscales L281
Décret 82-881 du 15 octobre 1982
Loi du 16 avril 1930 art. 61
Loi 81-1179 du 31 décembre 1981 art. 8-1 Finances rectificative pour 1981


Composition du Tribunal
Président : M. Chabanol
Rapporteur ?: M. Gailleton
Rapporteur public ?: M. Richer

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1991-02-28;89ly00811 ?
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