La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/12/1992 | FRANCE | N°92LY00162

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3e chambre, 09 décembre 1992, 92LY00162


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 février 1992, présentée pour Mme X..., demeurant ..., par la SCP BONNARD-DELAY-GUILLAUMOND-GHINSBERG, avocats ;
Mme X... demande à la cour :
1°) d' annuler le jugement du tribunal administratif de LYON en date du 13 novembre 1991 en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce que le centre médico-chirurgical interdépartemental d'Hauteville soit déclaré responsable des conséquences dommageables de l'accident d'anesthésie dont elle a été victime le 31 octobre 1986 et soit condamné à lui verser outre intérêts ca

pitalisés la somme de 124 000 francs en réparation de son préjudice ;
2°)...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 février 1992, présentée pour Mme X..., demeurant ..., par la SCP BONNARD-DELAY-GUILLAUMOND-GHINSBERG, avocats ;
Mme X... demande à la cour :
1°) d' annuler le jugement du tribunal administratif de LYON en date du 13 novembre 1991 en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce que le centre médico-chirurgical interdépartemental d'Hauteville soit déclaré responsable des conséquences dommageables de l'accident d'anesthésie dont elle a été victime le 31 octobre 1986 et soit condamné à lui verser outre intérêts capitalisés la somme de 124 000 francs en réparation de son préjudice ;
2°) de déclarer l'établissement ci-dessus mentionné responsable dudit accident et de le condamner à lui verser l'indemnité en question et à lui rembourser les frais d'expertise majorés des intérêts de droit échus depuis la date de leur règlement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 1992 :
- le rapport de Mme DEVILLERS, conseiller ;
- les observations de la SCP BONNARD DELAY GUILLAUMOND GHINSBERG ET ASSOCIES, avocat de Madame X... ;
- et les conclusions de M. CHANEL, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X... a été admise le 29 octobre 1986 dans les services du centre médico-chirurgical interdépartemental d'Hauteville pour y subir une intervention ayant pour objet la pose d'une prothèse totale du genou droit ; que l'anesthésie générale qu'exigeait cette intervention nécessitait une intubation de la trachée artère ; que l'anesthésiste qui a réalisé ce geste médical le 31 octobre a accidentellement perforé l'oesophage de Mme X... juste en dessous de la bouche de Killian ; qu'il en est résulté des complications qui ont entraîné des soins ininterrompus dans plusieurs hôpitaux jusqu'au 2 mars 1987 et causé tant à l'intéressée qu'à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ain des préjudices dont elles demandent réparation ;
Sur la responsabilité du centre médico-chirurgical interdépartemental d'Hauteville :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert commis en référé par les premiers juges que l'intubation de la trachée artère de la patiente qui était alors âgée de 64 ans présentait un risque particulier en raison de la fragilité de la muqueuse de l'oesophage à cet âge ; que par ailleurs la raideur de sa nuque empêchait de la placer en hyperextension alors que cette position est la seule qui permette par la visualisation du parcours de la sonde de s'assurer de son cheminement correct dans la trachée ;
Considérant qu'il est constant que l'anesthésiste a dû effectuer plusieurs tentatives sans aucun repérage du parcours emprunté par la sonde avant de réussir l'intubation et que l'oesophage de Mme X... a été perforé au cours d'une de ces manoeuvres ; qu'eu égard aux risques ci-dessus mentionnés que présentait l'intubation de l'intéressée dans les conditions où elle a été réalisée et en l'absence de toute urgence concernant l'intervention chirurgicale qu'elle devait subir, l'insistance de l'anesthésiste, même expérimenté à réaliser cette intubation constitue une faute de nature à engager la responsabilité du centre médico-chirurgical interdépartemental d'Hauteville ; que Mme X... est par suite fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lyon en tant que qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'indemnité ;
Sur l'évaluation du préjudice :
En ce qui concerne Mme X... :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en raison de l'accident d'anesthésie dont elle a été victime, Mme X... a subi une incapacité totale du 3 novembre 1986 au 5 avril 1987 ; qu'après consolidation de son état elle demeure atteinte d'une incapacité permanente partielle de 18 % ; qu'il sera ainsi fait une exacte appréciation de ses troubles dans les conditions d'existence en fixant à 60 000 francs l'indemnité qui lui est dûe à ce titre ; qu'elle a enduré d'importantes souffrances et subit un préjudice esthétique lié aux deux cicatrices laissées par les interventions réparatrices qui ont été nécessaires ; qu'il sera fait une juste appréciation de ces deux préjudices en les fixant respectivement à 30 000 francs et à 5 000 francs ; qu'ainsi l'indemnité que le centre médico-chirurgical interdépartemental d'Hauteville doit être condamné à verser à Mme X... s'élève au total à 95 000 francs ;
En ce qui concerne la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ain :
Considérant que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ain a droit au remboursement par le centre-médico chirurgical interdépartemental d'Hauteville des seuls débours qui sont la conséquence directe de l'accident d'anesthésie litigieux ; que tel n'est pas le cas ainsi qu'il résulte de l'instruction des frais exposés du fait de l'hospitalisation du 29 octobre au 3 novembre 1986 ; que le préjudice dont la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ain est en droit d'obtenir réparation par l'établissement ci-dessus mentionné doit ainsi être fixé à 257 308, 40 francs ;
Considérant en revanche que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ain ne peut utilement saisir la cour de conclusions tendant à ce qu'il lui soit donné acte de réserves pour des prestations futures ;
Sur les intérêts :
Considérant que Mme X... a droit ainsi qu'elle le demande aux intérêts de la somme de 95 000 francs à compter du 15 juin 1988 date de l'introduction de sa requête devant le tribunal administratif ;
Considérant que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie a droit aux intérêts de la somme de 257 308,40 francs à compter du 27 décembre 1989, date de l'enregistrement de son mémoire devant le tribunal administratif de Lyon ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Considérant que Mme X... a demandé les 25 septembre 1989 et 21 septembre 1990 la capitalisation des intérêts ; qu'à la première de ces dates il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ; qu'en revanche à la deuxième de ces dates il n'était pas dû une année d'intérêts ; que dès lors conformément aux dispositions de l'article ci-dessus mentionné, il y a lieu de rejeter cette demande ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'affaire de mettre les frais de l'expertise ordonnée par les premiers juges en référé à la charge du centre médico-chirurgical interdépartemental d'Hauteville ;

Considérant qu'en l'absence de toute justification du réglement par Mme X... des frais d'expertise, ses conclusions tendant à ce que l'hôpital soit condamné à lui verser les intérêts de la somme correspondante doivent, en tout état de cause être rejetées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administrative de Lyon en date du 13 novembre 1991 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'indemnité présentées par Mme X....
Article 2 : Le centre médico-chirurgical interdépartemental d'Hauteville versera à Mme X... et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain respectivement les sommes de 95 000 francs et de 257 308,40 francs.
Article 3 : Les sommes ci-dessus mentionnés porteront respectivement intérêt à compter du 15 juin 1988 et du 27 décembre 1989.
Article 4 : Les intérêts de la somme de 95 000 francs échus le 25 septembre 1989 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 5 : Les frais de l'expertise médicale ordonnés en référé par les premiers juges sont mis à la charge du centre médico-chirurgical interdépartemental de l'Ain.
Article 6 : Le surplus des conclusions de Mme X... et de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ain est rejeté.


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award