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18/05/1993 | FRANCE | N°92LY00111

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4e chambre, 18 mai 1993, 92LY00111


Vu, enregistrée au greffe de la cour le 11 février 1992 la requête présentée pour la société G2DC société anonyme, dont le siège social se trouve ... à Nanterre, la société civile immobilière le "Pré de Bâtis" dont le siège social est ... et la S.A.R.L "Le Pré de Bâtis" dont le siège social se trouve ... par la SCP BORLOO-STORA et associés, avocat ;
Les sociétés demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 5 décembre 1991 qui a rejeté leurs demandes en indemnisation du préjudice qu'elles ont subi du fait du ret

rait de la délibération du conseil municipal de Valbonne approuvant la création d...

Vu, enregistrée au greffe de la cour le 11 février 1992 la requête présentée pour la société G2DC société anonyme, dont le siège social se trouve ... à Nanterre, la société civile immobilière le "Pré de Bâtis" dont le siège social est ... et la S.A.R.L "Le Pré de Bâtis" dont le siège social se trouve ... par la SCP BORLOO-STORA et associés, avocat ;
Les sociétés demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 5 décembre 1991 qui a rejeté leurs demandes en indemnisation du préjudice qu'elles ont subi du fait du retrait de la délibération du conseil municipal de Valbonne approuvant la création de la zone d'aménagement concerté du Pré de Bâtis;
2°) de condamner la commune de Valbonne à leur payer pour la SCI "Le Pré de Bâtis" une indemnité de 1 212 841, 68 francs, pour la S.A.R.L "Le Pré de Bâtis" une indemnité de 11 680,17 francs et pour la société G2DC une indemnité de 1 295 000 francs augmentées des intérêts au taux légal ainsi qu'une somme de 50 000 francs au titre de l'article 1er du décret du 2 septembre 1988 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 1993 :
- le rapport de M. QUENCEZ, conseiller ;
- les observations de Me Catherine MUSSO, substituant Me Dominique MUSSO, avocat de la commune de Valbonne ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par une délibération du 23 février 1989 le conseil municipal de Valbonne a décidé la création d'une zone d'aménagement concerté dont il a défini le périmètre, approuvé la convention définitive à conclure pour l'aménagement et l'équipement de cette zone et approuvé le plan d'aménagement de cette zone préalablement soumis à enquête publique ; que par une délibération du 29 septembre 1989, le nouveau conseil issu des élections municipales du mois de mars 1989 a rapporté cette délibération ; que la SARL Le Pré de Bâtis qui était intervenue en qualité d'aménageur, la SCI Le Pré de Bâtis qui avait acheté sous conditions suspensives le terrain d'assiette de la ZAC et avait déposé les demandes de permis de construire et la société G2DC associée dans ces deux précédentes sociétés, qui avaient saisi le tribunal administratif de Nice d'une demande unique tendant à ce que la commune de Valbonne soit condamnée à réparer les conséquences dommageables ayant résulté pour elles du revirement de la commune, font appel du jugement qui a rejeté leur demande ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la commune de Valbonne n'a jamais conclu de contrat avec la société civile immobilière Le Pré de Bâtis ou avec la société G2DC ; que, par ailleurs le retrait de la délibération du conseil municipal du 23 février 1989 a rendu caduque la convention signée le 24 février 1989 par le maire de Valbonne pour l'aménagement et l'équipement de la zone d'aménagement concerté et l'EURL SSD agissant à cette date pour le compte de la SARL Le Pré de Bâtis constituée le 28 octobre 1988 entre notamment la société G2DC et l'EURL SSD et que cette dernière avait pris l'initiative, acceptée par le maire le 24 novembre 1988 de se substituer en qualité d'aménageur ; qu'ainsi la responsabilité de la commune à l'égard de ces trois sociétés n'est éventuellement susceptible d'être engagée que sur le terrain extracontractuel ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision de création d'une zone d'aménagement concerté ne constitue pas un acte créateur de droit ; qu'ainsi la délibération du 23 février 1989 pouvait être légalement retirée pour tout motif d'intérêt général même relevant de l'opportunité ; qu'il ressort des termes mêmes de la délibération du 29 septembre 1989 que le conseil municipal de Valbonne s'est rangé à l'avis du préfet, exprimé le 25 septembre 1989 dans le délai imparti pour le contrôle de légalité sur la délibération du 23 février 1989, selon lequel le plan d'aménagement de zone n'était pas conforme aux objectifs régissant les ZAC situées dans le parc d'activités de Sophia Antipolis et en particulier à ceux concernant la densité des constructions et leur emprise au sol, et la proportion des équipements publics ; que les sociétés requérantes ne contestent pas les motifs d'illégalité invoqués par la commune ; qu'il ne résulte pas non plus de l'instruction que, contrairement à ce qu'elles allèguent, le délai mis par la commune, notamment après le renouvellement du conseil municipal en mars 1989, à transmettre au préfet toutes les pièces du dossier nécessaires à l'exercice du contrôle de légalité ait été, eu égard à l'importance et la complexité du dossier, abusif ; qu'il suit de là que le fait que le nouveau conseil municipal ait attendu le 29 septembre 1989 pour retirer la délibération du 23 février 1989, alors que la SCI avait déjà déposé les demandes de permis de construire n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, de nature à engager la responsabilité de la commune de Valbonne sur le fondement de la faute ;
Considérant, en troisième lieu, que la responsabilité d'une commune peut, il est vrai, être engagée, même en l'absence de faute, en cas de préjudice anormal et spécial directement causé à une personne physique ou morale par une décision prise par cette commune pour un motif d'intérêt général ; mais qu'en admettant même que les frais de notaire d'un montant de 11 600 francs dont la SARL Le Pré de Bâtis fait état, aient été exposés en vue de sa substitution à l'EURL SSD comme cocontractant de la commune en qualité d'aménageur, ils ne sont pas d'un montant tel que le fait de les avoir exposés en pure perte puisse être qualifié de dommage anormal ;
Considérant, en quatrième lieu, que la société civile immobilière Le Pré de Bâtis évalue son préjudice à 1 212 841 francs et la société G2DC associé prépondérante dans cette dernière société à 1 295 600 francs ; que toutefois, il résulte de l'instruction que les dépenses dont fait état la société G2DC correspondent, à l'exclusion d'honoraires versés directement à concurrence de 350 000 francs sur lesquels elle n'apporte aucune précision , ni justification, à sa participation au capital constitutif de la société à responsabilité limitée Le Pré de Bâtis et de la SCI Le Pré de Bâtis ainsi qu'aux appels de fonds de cette dernière pour régler les dépenses engagées dont celle-ci demande également à être indemnisée ; qu'ainsi la société G2DC ne justifie en réalité d'aucun préjudice directement imputable à la commune de Valbonne ;

Considérant que, par ailleurs, les dépenses dont fait état la société civile immobilière Le Pré de Bâtis ont pour cause directe, pour plus de la moitié de leur montant, le fait, auquel la commune de Valbonne est complètement étrangère, qu'elle a cru devoir exposer des frais de caution bancaires importants pour acheter dès le 28 novembre 1988 sous conditions suspensives à l'EURL SSD pour le prix de 37 387 850 francs le terrain de 6 hectares environ correspondant au périmètre de la ZAC projetée que, par acte notarié du 24 novembre 1988, la commune avait elle même vendu à cette dernière pour un prix de 16 645 000 francs sous conditions suspensives de l'approbation par le conseil municipal du plan d'aménagement de la zone et de la purge de tout recours sur la zone d'aménagement concerté ; qu'enfin la SCI Le Pré de Bâtis a déposé ses demandes de permis de construire et de démolir le 22 mai 1989 soit moins de deux mois après la publication dans un journal d'annonces légales le 24 mars 1989 de la délibération du conseil municipal du 23 février 1989 qui avait été reçue à la sous-préfecture le 6 mars 1989 ; qu'ainsi les frais divers et notamment les frais d'architecte qu'elle a exposés à hauteur de 600 000 francs environ en vue de la mise au point du dossier de permis de construire ont nécessairement été engagés à une date antérieure à la réalisation des conditions suspensives auxquelles était subordonnée son acquisition des terrains en cause, c'est à dire à une date où elle ne pouvait ignorer les aléas importants qui affectaient encore, au moins pour plusieurs semaines, l'utilité de ces dépenses, compte tenu notamment de l'exercice normal par le représentant de l'Etat du contrôle de légalité sur le plan d'aménagement de la zone ; que dans ces conditions, la SCI Le Pré de Bâtis, qui doit supporter les conséquences du risque qu'elle a pris en connaissance de cause ne peut utilement soutenir que le rejet de ses demandes de permis de construire et de démolir par voie de conséquence du retrait de la délibération approuvant le plan d'aménagement de la zone est de nature à engager la responsabilité sans faute de la commune à son égard ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Le Pré de Bâtis, la SCI le Pré de Bâtis et la société G2DC ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Valbonne ;
Sur l'appel incident de la commune de Valbonne :
Considérant que la commune de Valbonne demande à la cour d'annuler l'article 2 du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à verser à la SARL et la SCI Le Pré de Bâtis la somme de 5 000 francs à chacune d'entre elles sur le fondement des dispositions de l'article R. 222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Considérant qu'aux termes de cet article R. 222 dans sa rédaction alors applicable "Lorsqu'il paraît inéquitable de laisser à la charge d'une partie des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel peut condamner l'autre partie à lui payer le montant qu'il ou elle détermine." ; que sur le fondement de ces dispositions le tribunal administratif a pu à bon droit, alors même qu'il rejetait la demande d'indemnité des sociétés requérantes, condamner la commune de Valbonne à payer à la SARL et la SCI Le Pré de Bâtis la somme en cause ; que la commune de Valbonne n'est donc pas fondée à demander l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué ;
Sur les frais irrépétibles afférents à l'instance devant la cour :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel applicable à la date du présent arrêt : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la commune de Valbonne tendant à ce que chacune des sociétés requérantes soit condamnée à lui verser une somme de 8 000 francs sur le fondement de ces dispositions ;
Article 1er : La requête de la SARL Le Pré de Bâtis, la SCI Le Pré de Bâtis et la société G2DC est rejetée.
Article 2 : L'appel incident et les conclusions de la commune de Valbonne tendant au paiement des frais irrépétibles sont rejetés.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-02-02-01-02-02 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PROCEDURES D'INTERVENTION FONCIERE - OPERATIONS D'AMENAGEMENT URBAIN - ZONES D'AMENAGEMENT CONCERTE (Z.A.C.) - PLAN D'AMENAGEMENT DE ZONE (P.A.Z.) - EFFETS


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R222, L8-1


Publications
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. QUENCEZ
Rapporteur public ?: M. BONNAUD

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4e chambre
Date de la décision : 18/05/1993
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 92LY00111
Numéro NOR : CETATEXT000007456524 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1993-05-18;92ly00111 ?
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