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29/06/1993 | FRANCE | N°91LY00380

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4e chambre, 29 juin 1993, 91LY00380


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour les 15 avril et 12 juin 1991, présentés pour la société anonyme OTH Méditerranée dont le siège social est situé ... (13295) MARSEILLE, par Me Galissard, avocat ;
La société OTH Méditerranée demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 19 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamnée conjointement et solidairement avec d'autres constructeurs à payer à l'office public d'aménagement et de construction des Bouches-du-Rhône 845 961,94 francs en rép

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Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour les 15 avril et 12 juin 1991, présentés pour la société anonyme OTH Méditerranée dont le siège social est situé ... (13295) MARSEILLE, par Me Galissard, avocat ;
La société OTH Méditerranée demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 19 février 1991 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamnée conjointement et solidairement avec d'autres constructeurs à payer à l'office public d'aménagement et de construction des Bouches-du-Rhône 845 961,94 francs en réparation des désordres qui ont affecté les bâtiments "Nouméa" et "Miami" d'un ensemble immobilier réalisé ZAC La Rousse à Miramas, les frais d'expertise et 8 000 francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2°) de rejeter les conclusions de l'office public d'aménagement et de construction des Bouches-du-Rhône dirigées contre elle et, subsidiairement, de condamner d'une part des architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras, la société Colas venant aux droits de la société des grands travaux de l'Est (SGTE) et la société Ceramétal à la garantir de toute condamnation prononcée contre elle et, d'autre part, de fixer une part de responsabilité à la charge de l'entreprise Michou ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 modifiée fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 modifié portant règlement d'administration publique pour l'application de cette loi ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 1993 :
- le rapport de M. COURTIAL, conseiller ;
- les observations de Me Galissard, avocat de ma société OTH Méditerranée et de Me Lupo, avocat de la société Colas, de la société Ceramétal et de la société Saman ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par l'OPAC des Bouches-du-Rhône :
Considérant que la requête a été enregistrée au greffe de la cour le 15 avril 1991 avant l'expiration du délai de deux mois dont la société OTH Méditerranée disposait pour faire appel du jugement susvisé en date du 19 février 1991 qui ne lui a pas été notifié avant le 5 mars 1991 ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête doit être rejetée ;
Sur le fondement juridique de l'action intentée par l'OPAC des Bouches du Rhône :
Considérant que les bâtiments "Miami" et "Nouméa" de l'ensemble immobilier "Maisons et Jardins" réalisés à Miramas pour le compte de l'office public d'HLM des Bouches-du-Rhône aux droits duquel vient l'OPAC, par le cabinet d'architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras, le bureau d'études OTH Méditerranée et des entreprises groupées représentées par la SGTE aux droits de laquelle vient la société Colas, ont fait l'objet d'une réception définitive le 9 mai 1979 ; qu'à cette date les rapports contractuels nés des marchés passés entre le maître d'ouvrage et les constructeurs susmentionnés ont cessé de produire leurs effets ; qu'il s'ensuit que, d'une part, l'OPAC, qui ne pouvait plus se prévaloir, à la date de saisine du tribunal, d'une qualité pour agir sur le fondement des rapports contractuels, n'est pas davantage recevable à se placer en appel sur un autre fondement juridique que celui du régime de la responsabilité décennale sur lequel il a fondé exclusivement son action devant le tribunal administratif ; que, d'autre part, la société OTH Méditerranée requérante ne peut utilement invoquer le non respect par l'OPAC, dans le cadre d'une action en responsabilité décennale, d'une procédure pré-contentieuse organisée pour la prévention et le règlement des litiges contractuels ;
Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance tirée du défaut de qualité de l'OPAC pour agir en responsabilité décennale :
Considérant qu'il est constant que, suite à la décision du Conseil d'administration de l'OPAC du 22 décembre 1980 de transformer les bâtiments "Miami" et "Nouméa" en immeubles en accession à la propriété, plusieurs des appartements compris dans ces bâtiments avaient été effectivement vendus à la date de saisine du tribunal administratif le 25 février 1987 ; que, dès lors, à cette date, ces immeubles se trouvaient soumis de plein droit au statut de la copropriété conformément aux dispositions d'ordre public de l'article 1er de la loi susvisée du 10 juillet 1965 ; que l'action en garantie décennale avait été, par suite, en principe, transmise à la collectivité des copropriétaires constituée en syndicat ;

Considérant en premier lieu qu'en vertu de l'article 55 du décret susvisé du 17 mars 1967 modifié, sauf dans les cas énumérés au deuxième alinéa, le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier du procès-verbal de la réunion de l'assemblée générale du 13 mai 1988, que le syndicat des copropriétaires ait, avant l'intervention du jugement attaqué du tribunal administratif, donné mandat à l'OPAC d'agir en justice contre les constructeurs pour obtenir réparation des désordres liés à des infiltrations d'eaux pluviales à travers des toitures-terrasses ; que celui-ci n'est donc pas fondé à se prévaloir de sa désignation comme syndic par le règlement de la copropriété pour la période précédent la réunion de la première assemblée générale au soutien de la recevabilité de sa demande ;
Considérant en deuxième lieu que si, comme il a été rappelé ci-dessus, l'action en garantie décennale se transmet en principe avec la propriété de l'immeuble aux acquéreurs, le maître de l'ouvrage ne perd pas la faculté de l'exercer quand elle présente pour lui un intérêt direct et certain ; que l'OPAC soutient qu'en tant que vendeur des appartements compris dans les immeubles en cause il devait garantir, pendant une durée de dix ans à compter de la réception des travaux, les acquéreurs desdits appartements des vices de l'ouvrage conformément aux stipulations des contrats de vente qui se réfèrent expressément aux dispositions de l'article 1646-1 du code civil ; que, toutefois, l'OPAC, qui n'allègue pas avoir été attrait en justice par les acquéreurs, ne saurait être regardé comme démontrant avoir un intérêt personnel direct et certain pour agir en qualité de maître de l'ouvrage et vendeur sans produire devant le juge les documents attestant qu'il a effectivement supporté lui-même les dépenses de remise en état des bâtiments ; qu'il y a lieu sur ce point d'ordonner un supplément d'instruction aux fins d'inviter l'OPAC à produire lesdits documents ;

Considérant que l'OPAC invoque en dernier lieu sa qualité de copropriétaire des logements demeurés invendus à la date de la saisine du tribunal administratif ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport d'expertise, que lesdits logements, au moins certains d'entre eux, ont subi des dégradations à la suite des infiltrations d'eaux pluviales susindiquées ; que dans ces conditions et dans l'hypothèse où son action ne pourrait être jugée recevable pour le tout en qualité de maître de l'ouvrage et vendeur, l'OPAC justifierait de préjudices personnel et collectif l'autorisant à agir en responsabilité décennale contre les constructeurs dans la mesure où les désordres affectaient les parties privatives qu'il détenait et les parties communes comportant des malfaçons à l'origine de la détérioration desdites parties privatives ; que, toutefois, en raison de la poursuite des ventes après la date de saisine du tribunal administratif, la cour ne trouve pas au dossier les éléments lui permettant de déterminer l'étendue des droits de l'OPAC en cette qualité de copropriétaire ; qu'il y a donc lieu d'ordonner sur ce point un autre supplément d'instruction à l'effet d'inviter l'OPAC à produire une liste, accompagnée de toutes justifications utiles, de la totalité des lots comportant, pour chacun la quote-part (nombre de dix-millièmes) des parties communes qui lui a été affectée, le nom du copropriétaire à la date de notification du présent arrêt et s'il est autre que l'OPAC, la date de l'acte de vente de ce lot par l'OPAC ;
Article 1er : Avant-dire droit sur les conclusions des parties il est ordonné un supplément d'instruction aux fins pour l'OPAC de produire devant la cour, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, d'une part les pièces comptables et justificatives établissant qu'il a personnellement supporté les frais de réfection de l'étanchéité des terrasses des immeubles "Miami" et "Nouméa", d'autre part la liste des lots telle qu'elle a été décrite dans les motifs du présent arrêt.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 91LY00380
Date de la décision : 29/06/1993
Sens de l'arrêt : Supplément d'instruction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-01,RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - QUALITE POUR LA METTRE EN JEU -Existence - Mise en jeu de la responsabilité décennale par le maître de l'ouvrage - Action en qualité de copropriétaire des lots invendus - Existence éventuelle d'un intérêt direct et certain du maître de l'ouvrage pour agir nonobstant la transmission de l'action en garantie aux acquéreurs (1).

39-06-01-04-01 Bien que l'action en garantie décennale se transmette, en principe, avec la propriété de l'immeuble aux acquéreurs, le maître de l'ouvrage ne perd pas la faculté de l'exercer s'il démontre qu'elle présente pour lui un intérêt direct et certain, en particulier lorsque sa responsabilité, comme vendeur, est engagée envers les acquéreurs ou lorsqu'il a supporté effectivement et personnellement les dépenses de remise en état de l'immeuble (1). En cas de division de l'immeuble en lots, le statut de la copropriété est applicable de plein droit dès la première vente de lot. Le maître de l'ouvrage qui, à la date de la saisine du tribunal administratif, n'a pas vendu la totalité des lots, conserve un intérêt à agir en garantie décennale contre les constructeurs en qualité de copropriétaire, à raison des préjudices personnel et collectif qu'il subit dans l'hypothèse où les désordres affectent les parties privatives qu'il a conservées et où les parties communes comportent des malfaçons à l'origine de la détérioration desdites parties privatives.


Références :

Code civil 1646-1
Décret 67-223 du 17 mars 1967 art. 55
Loi 65-557 du 10 juillet 1965 art. 1

1.

Rappr. CE, Section, 1967-03-17, Imbert, p. 133 et Cass. civ., 3e, 1979-03-21, Servonnat c/ Zimmerli, Bull., n° 73, p. 53


Composition du Tribunal
Président : Mme Latournerie
Rapporteur ?: M. Courtial
Rapporteur public ?: M. Bonnaud

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1993-06-29;91ly00380 ?
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