Vu enregistrée au greffe de la cour le 18 octobre 1991, la requête présentée par la SCI de l'Europe dont le siège social est situé à AIX-EN-PROVENCE (13100), immeuble Euroffice, 38, avenue de l'Europe, représentée par son gérant en exercice ;
La SCI de l'Europe demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 7 août 1991 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'opération d'échange d'immeubles conclue avec l'administration,
- de lui accorder le remboursement de cette taxe, d'un montant de 1 235 614 francs ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 1993 :
- le rapport de Mme LAFOND, conseiller ;
- et les conclusions de M. CHANEL, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par un acte administratif d'échange passé le 18 juillet 1986 entre l'Etat et la SCI de l'Europe, cette dernière a acquis un ensemble immobilier comprenant un bâtiment à usage de bureaux achevé en 1968, et a cédé un bâtiment qu'elle a fait édifier en 1986 sur un terrain appartenant à l'Etat et sur lequel lui avait été conféré, par convention du 13 novembre 1985, un droit de superficie valable jusqu'à la signature de l'acte d'échange ; que les immeubles échangés ont été estimés d'égale valeur ; qu'en application de l'article 260, 2è du code général des impôts alors en vigueur la SCI a régulièrement opté le 8 septembre 1986 pour l'assujettissement à la T.V.A. à raison de la location de l'immeuble acquis ; qu'elle demande le remboursement de la T.V.A. afférente selon elle à l'opération d'échange, s'élevant à 1 235 614 francs, au motif que ladite opération, réalisée dans le cadre de son objet social, entre dans le champ d'application de la T.V.A., la livraison de l'immeuble qu'elle a construit constituant une modalité pratique de réglement du prix convenu, lequel comprend la taxe litigieuse ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'en estimant que, l'immeuble acquis par voie d'échange étant achevé depuis plus de cinq ans à la date de la transaction, la SCI de l'Europe n'était pas fondée à se prévaloir de l'option pour le paiement de la T.V.A. à raison de la location dudit immeuble, formulée en application de l'article 260-2è du code général des impôts, pour demander le remboursement d'un montant de taxe qu'elle n'avait pas supporté lors de l'acquisition de ce dernier, les premiers juges qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments des parties, n'ont entaché leur décision d'aucune omission de statuer ;
Sur le fond :
Considérant qu'au regard de la T.V.A. l'opération d'échange ci-dessus décrite doit être regardée comme une double vente ;
Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : "I La T.V.A. qui a grévé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la T.V.A. applicable à cette opération" ; qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts : "sont également soumises à la T.V.A ... 7° les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles ... 1. sont notamment visés : ... - les ventes d'immeubles ... 2. les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables : - aux opérations portant sur des immeubles ... qui sont achevés depuis plus de cinq ans ..." ; qu'il s'ensuit que dès lors qu'elle portait sur un immeuble achevé depuis plus de cinq ans la cession par l'Etat de l'ensemble immobilier que la SCI de l'Europe donne en location n'entrait pas dans le champ d'application de la T.V.A. et n'ouvrait dès lors aucun droit à déduction au profit de la requérante ;
Considérant en second lieu qu'aux termes de l'article 213 de l'Annexe II : "lorsqu'un assujetti a des secteurs d'activités qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regard de la T.V.A., ces secteurs font l'objet de comptes distincts pour l'application du droit à déduction" ; que la construction par la SCI de l'Europe de l'immeuble qu'elle a échangé contre celui qu'elle donne en location constitue une activité distincte de celle de loueur ; que par suite, en application des dispositions précitées, la T.V.A. qui a grèvé des travaux qui serait déductible de la taxe afférente à la livraison de cet immeuble ne peut l'être de la taxe applicable au produit de la location de l'immeuble dont elle est devenue propriétaire ;
Considérant en troisième lieu que la SCI n'est, en tout état de cause pas fondée à se prévaloir, sur le fondement des articles L.80 A et L.80 B du livre des procédures fiscales, de la décision du directeur du 31 mars 1987 dès lors d'une part, que celle-ci est postérieure à la date à laquelle la société requérante a entendu exercer le droit à déduction de la T.V.A. litigieuse, d'autre part, que l'interprétation invoquée provenant d'une autre source que les instructions et circulaires administratives publiées, le bénéfice de la mesure édictée auxdits articles ne serait applicable qu'en cas de rehaussement d'une imposition antérieure, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré des conséquences économiques de la situation fiscale de la SCI est inopérant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de la SCI de l'Europe est rejetée.