La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/2014 | FRANCE | N°11LY23605

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 22 mai 2014, 11LY23605


Vu l'ordonnance n° 372825 du 18 novembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Lyon le dossier de la requête, présentée pour la société Braja Vesigne dont le siège est situé 21 avenue Frédéric Mistral, BP 71 à Orange (84102), enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 septembre 2011 ;

La société Braja Vesigne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902888 du Tribu

nal administratif de Nîmes du 12 juillet 2011 ;

2°) de condamner la commune ...

Vu l'ordonnance n° 372825 du 18 novembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Lyon le dossier de la requête, présentée pour la société Braja Vesigne dont le siège est situé 21 avenue Frédéric Mistral, BP 71 à Orange (84102), enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 septembre 2011 ;

La société Braja Vesigne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902888 du Tribunal administratif de Nîmes du 12 juillet 2011 ;

2°) de condamner la commune d'Avignon à lui verser la somme de 487 904,32 euros TTC outre les intérêts moratoires à compter de la date de la réclamation ;

3°) de condamner la commune d'Avignon à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le bordereau de prix unitaires pour les tranchées de hauteur supérieure à 1 m 30 prévoit un prix de 10 euros par m³ pour l'ensemble du volume nécessaire et non pas sur la partie de volume excédant cette hauteur ; que la formule de révision est en réalité une formule d'actualisation et qu'un marché à prix ferme doit en tout état de cause obligatoirement comporter une clause d'actualisation ; qu'il convient d'appliquer la clause de révision dès lors que le marché a connu un dépassement de six mois ; que l'index TP 01 a connu une augmentation exceptionnelle de 7,8 % en octobre 2007 et de 17 % en juillet 2008 ce qui a généré un surcout des charges contractuelles qui a bouleversé l'économie générale du marché ; que l'indemnité compensatrice prévue par l'avenant n° 1 de 4,82 % des prix des prestations effectuées après le 1er janvier 2008 n'est pas représentative de ce surcoût extracontractuel ; que le sinistre survenu lors de la construction du parking souterrain, à l'origine du retard du chantier lui-même, constitue une sujétion imprévue ; que l'entreprise a dû mobiliser un directeur des travaux pendant 22 mois sans interruption ; qu'enfin la chute globale de rendement est indemnisable du fait de ce retard à hauteur de 227 157,36 euros HT ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 15 mars 2012, le mémoire en défense présenté pour la commune d'Avignon, qui conclut au rejet de la requête, et à la condamnation de la société Braja Vesigne à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'avenant n° 1 a déjà indemnisé la société Braja Vesigne pour un montant de 446 963,50 euros HT soit 14,92 % du montant du marché initial pour tenir compte de l'allongement du délai après le 31 décembre 2007 ; que la société a ainsi été indemnisée pour les travaux supplémentaires ; que l'allongement du délai d'exécution a déjà été indemnisé également ; qu'en ce qui concerne le prix supplémentaire de 10 euros par m³, celui-ci ne peut s'appliquer qu'à partir de la hauteur contractuellement prévue de 1 m 30 ; qu'aucune révision du marché n'a été prévue au contrat ; que le prix était ferme et actualisable ; que le marché litigieux a été conclu en application du code de 2004 et non pas de celui de 2006 ; que le retard indemnisé n'a pas bouleversé l'économie générale du marché ; que durant la période d'allongement, la société ne rapporte pas la preuve de l'immobilisation permanente du directeur de travaux ; qu'elle ne rapporte aucun élément permettant d'apprécier la réalité de son allégation concernant une éventuelle chute globale de rendement ;

Vu l'ordonnance du 16 janvier 2014 fixant la clôture de l'instruction au 24 février 2014 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 avril 2014 :

- le rapport de M. Gazagnes, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

- les observations de Me C...pour la société Braja-Vesigne et de Me A...pour la ville d'Avignon ;

1. Considérant que la ville d'Avignon a confié à la société Braja Vesigne le lot n° 1 " Voirie Réseaux Divers " dans le cadre de l'opération de réaménagement du cours Jean Jaurès ; que les travaux devaient contractuellement se terminer à la fin du mois d'octobre 2007 ; que, toutefois, suite à un sinistre survenu sur le chantier de construction d'un parking souterrain auquel le projet de réaménagement était lié, le chantier a connu un retard de six mois ; que, par ailleurs, la ville d'Avignon a demandé la réalisation de travaux supplémentaires ; que les parties ont conclu le 17 juin 2008 un avenant d'un montant de 446 963 euros HT pour tenir compte de l'allongement du délai de réalisation et des travaux supplémentaires ; qu'estimant que cet avenant ne couvrait qu'insuffisamment ses frais supplémentaires, la société Braja-Vésigne l'a contesté auprès du maître d'oeuvre ; qu'elle a de même contesté le décompte général notifié le 20 février 2009 arrêté à la somme de 3 431 820,74 euros HT en présentant un mémoire en réclamation pour 573 368,34 euros TTC ; que, suite au rejet par la commune de sa réclamation, elle a saisi le Tribunal administratif de Nîmes d'une demande tendant à l'indemnisation de son préjudice ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté l'ensemble des réclamations supplémentaires présentées par la société Braja Vesigne ; que la société Braja Vesigne relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par la ville d'Avignon :

En ce qui concerne les sommes demandées au titre de l'article 3.80 du bordereau de prix unitaire pour les tranchées supérieures à 1,3 mètre :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3.01 du bordereau de prix unitaire du marché en cause, l'exécution des tranchées pour l'installation ou la construction à ciel ouvert de canalisations est payée 32 euros le m3 " quelle que soit la profondeur ou le remblaiement " ; que cet article a été complété par un article 3.80, pour tenir compte de la " plus-value pour le terrassement " pour les tranchées d'une profondeur supérieure à 1m30, fixant un prix de 10 euros le m3 ; qu'ainsi que l'a souligné le Tribunal, ce prix a pour objet de tenir compte des mesures de sécurité supplémentaires imposées pour les tranchées d'une profondeur supérieure à 1m30 et ne peut, en conséquence, que s'appliquer au volume affouillé au-delà de 1m30 de profondeur de ces tranchées, comme l'a retenu la ville d'Avignon, et non pas, ainsi que le demande à tort la société Braja Vesigne, à la totalité du volume affouillé ;

En ce qui concerne la variation du prix :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 23 août 2001 applicable au marché en litige : " Lorsqu'un marché est conclu à prix ferme pour des fournitures ou services autres que courants ou pour des travaux, il doit prévoir :- que ce prix sera actualisé si un délai supérieur à trois mois s'écoule entre la date d'établissement du prix figurant dans le marché et la date d'effet de l'acte portant commencement d'exécution des prestations ;- que l'actualisation se fera aux conditions économiques correspondant à une date antérieure de trois mois à la date d'effet de l'acte portant commencement d'exécution des prestations ;- les modalités de cette actualisation (...) Le prix ainsi actualisé reste ferme pendant toute la période d'exécution des prestations et constitue le prix de règlement " ; qu'aux termes de l'article 3.5.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché : " Les prix sont réputés établis sur la base du mois précédant le mois de remise de l'offre appelé " mois zéro ". L'index de référence choisi en raison de sa structure pour l'actualisation du prix des travaux faisant l'objet du marché est le suivant, concernant le lot n° 1 : TP 01 : index général tous travaux - L'actualisation est effectuée par application d'un coefficient donné par la formule : C(n) = 0,15 + 0,85 X TP01 (0) dans laquelle : au dénominateur figurent la valeur des indices correspondante au mois tel que défini à l'article 3.5.2 ; au numérateur figurent les valeurs de ces mêmes indices afférentes au mois n qui est égal à la date de lancement des prestations - 3 mois sous réserve que cette date soit postérieure de plus de trois mois au mois zéro ; "

4. Considérant que si la société Braja Vesigne soutient que la formule d'actualisation du marché serait irrégulière en ce qu'elle prévoirait une partie fixe de 15 % hors actualisation, cette société n'a émis aucune réserve sur le bien-fondé de cette clause dont elle a au contraire demandé l'application en l'état par courrier du 21 mai 2008 préalable à la signature de l'avenant ; que dès lors, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles et compte tenu de ces circonstances, la société requérante n'est pas fondée à invoquer, pour écarter l'application de cette clause du contrat, la circonstance, à la supposée établie qu'elle méconnaîtrait les dispositions sus-rappelées de l'article 1er du décret du 23 août 2001 ;

5. Considérant que, ainsi que l'a relevé à bon droit les premiers juges, la société Braja Vesigne ne soutient pas que la ville d'Avignon aurait fait une application inexacte de la formule d'actualisation ;

6. Considérant, enfin, qu'il est constant que le marché en litige, passé avant l'entrée en application des décrets des 1er août 2006 et 19 décembre 2009, ne comporte aucune clause de révision ; que la société Braja Vésigne ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du 25 janvier 2005 ou d'un usage de la profession pour demander l'application d'une clause de révision à son marché ; qu'enfin, il ne résulte pas de l'instruction que la commune intention des parties aurait été de prévoir une clause de révision présentée à tort comme une clause d'actualisation ;

En ce qui concerne l'indemnisation au titre des sujétions imprévues :

7. Considérant que l'indemnisation des sujétions imprévues n'est possible que si les difficultés rencontrées dans l'exécution du contrat présentent un caractère à la fois exceptionnel, imprévisible et extérieur aux parties et, pour les marchés à forfait, si en outre ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l'économie générale du contrat ;

8. Considérant que si la société Braja Vesigne fait valoir que le retard du marché du au sinistre survenu au chantier voisin de construction d'un parking souterrain ont provoqué une augmentation de ces charges, il ne résulte pas de l'instruction que l'évolution de l'index TP01 dont se prévaut la société requérante, aurait présenté un caractère imprévisible et exceptionnel de nature à justifier une indemnisation au titre des sujétions imprévues ; qu'en tout état de cause, ainsi qu'il a été dit, une partie des coûts liés à l'allongement de la durée des travaux a été prise en charge par l'avenant du 17 juin 2008 ;

En ce qui concerne les frais généraux supplémentaires du chantier et la perte de rendement :

9. Considérant d'une part que la société Braja Vesigne ne justifie pas plus qu'en première instance que la durée prolongée du chantier l'aurait obligée à maintenir sur place, de manière permanente et exclusive, un directeur de travaux ;

10. Considérant d'autre part que la société Braja Vesigne ne justifie pas, par un calcul purement théorique et sommaire, de la réalité et du montant de la perte de rendement qu'elle allègue alors que, comme il a été dit, l'avenant du 17 juin 2008 a tenu compte des conséquence de l'allongement des travaux ;

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société Braja Vesigne n'est pas fondée à prétendre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté l'ensemble de ses demandes indemnitaires ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la ville d'Avignon, qui n'est pas la partie perdante, soit condamnée à verser une somme quelconque à la société Braja Vesigne ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société Braja Vesigne à verser à la ville d'Avignon la somme de 2 000 euros en application de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Braja-Vesigne est rejetée.

Article 2 : La société Braja-Vesigne est condamnée à verser à la ville d'Avignon la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Braja-Vesigne et à la ville d'Avignon.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2014, où siégeaient :

- M. Wyss, président,

- M. Gazagnes et M. B...D..., présidents-assesseurs.

Lu en audience publique, le 22 mai 2014.

''

''

''

''

N° 11LY23605 2


Type d'affaire : Administrative

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Règlement des marchés.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Philippe GAZAGNES
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCP CHARREL et ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 22/05/2014
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11LY23605
Numéro NOR : CETATEXT000029096464 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-05-22;11ly23605 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award