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16/10/2014 | FRANCE | N°14LY00127

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 16 octobre 2014, 14LY00127


Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014 au greffe de la Cour, présentée pour M. C... D..., domicilié ...;

M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304407 du 18 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 28 mars 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de son renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté du préfet du Rhône du 28 mars 2

013 ;

3°) d'enjoindre à ce préfet de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et fa...

Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014 au greffe de la Cour, présentée pour M. C... D..., domicilié ...;

M. D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1304407 du 18 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 28 mars 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de son renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté du préfet du Rhône du 28 mars 2013 ;

3°) d'enjoindre à ce préfet de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

Le requérant soutient que :

- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée ce qui révèle un défaut d'examen de sa situation ; qu'elle méconnaît, en outre, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour qui la fonde ; elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de son renvoi est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour et de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 28 mars 2014 fixant la clôture de l'instruction au 30 avril 2014 à 16 heures 30, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2014, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requête est irrecevable et que les moyens invoqués par M. D...ne sont pas fondés ;

Vu l'ordonnance du 7 mai 2014 reportant la clôture de l'instruction du 30 avril 2014 au 28 mai 2014 à 16 heures 30, en application des articles R. 613-1 et R.613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de Grande Instance de Lyon (section administrative d'appel), en date du 5 décembre 2013, accordant à M. C...D..., l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application des articles L. 732-1 et R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Mear, président ;

- et les observations de MeB..., substituant MeA..., pour M. D...;

1. Considérant que M.D..., de nationalité albanaise, né le 23 avril 1972, est, selon ses déclarations, entré en France le 26 septembre 2009, accompagné de son épouse et de leurs deux enfants mineurs ; que M. et Mme D...ont déposé, le 29 septembre 2009, des demandes d'asile, qui ont été rejetées par des décisions du 12 mai 2010 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmées par des décisions du 12 janvier 2011 de la Cour nationale du droit d'asile ; que, par des décisions du 4 mai 2011, le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de leur renvoi ; que ces décisions ont été confirmées par un jugement du Tribunal administratif de Lyon du 10 novembre 2011 et par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon en date du 10 janvier 2013 ; que M. et Mme D...ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade pour MmeD..., soit sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et au titre de la vie privée et familiale, pour M.D..., soit sur le fondement du 7° du même article, ce dernier se prévalant de l'état de santé de son épouse ; que, par arrêtés du 28 mars 2013, le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a prescrit l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ; que, par jugement du 18 septembre 2013, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande présentée par M. D...tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 28 mars 2013 pris à son encontre ; que M. D...relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. D...comporte les motifs de droit et de fait qui la fondent ; qu'elle mentionne en particulier, d'une part, " qu'après instruction et avis du médecin de l'agence régionale de santé ", que son épouse ne remplit pas les conditions requises pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, un traitement approprié existe dans son pays d'origine vers lequel elle peut voyager sans risque ; qu'elle indique, d'autre part, que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile et qu'il n'établit pas que sa vie ou sa liberté sont menacées ou qu'il serait exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, M. D... n'est fondé à soutenir ni que le préfet du Rhône n'aurait pas suffisamment motivé la décision attaquée en ce qui concerne l'état de santé de son épouse et les risques qu'il encourt en cas de retour en Albanie ni qu'il n'aurait pas par suite procédé à un examen particulier de sa situation ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

5. Considérant que M. D...soutient qu'il ne peut reconstituer sa vie privée et familiale en Albanie ; que, d'une part, il fait valoir qu'il encourt des risques de représailles de la part des habitants de Lazarate à la suite de l'action qu'il a menée, en tant que policier, contre le trafic de cannabis, ainsi qu'en témoigne le pillage et l'incendie de sa maison le 22 janvier 2011 ; que, toutefois, par la seule production de deux articles de journaux, de deux attestations émanant d'un collègue de travail et d'une voisine, rédigées en des termes peu circonstanciés et de la copie d'une attestation selon laquelle il aurait exercé les fonctions de policier de mai à septembre 2009, il n'établit ni le fait que la destruction de sa maison en 2011 serait liée à son activité de policier dont il a démissionné en 2009 ni la réalité et l'actualité des risques qu'il pourrait encourir en cas de retour dans son pays d'origine ; que, d'autre part, si M. D...entend faire valoir que son épouse ne pourrait bénéficier de soins appropriés à son état de santé en Albanie et que cet état de santé serait lié aux évènements survenus dans ce pays, il ne l'établit pas en se bornant à produire l'attestation d'une psychologue qui reprend pour une large part les propos de son épouse alors au demeurant que la demande de titre de séjour présentée par Mme D...a été rejetée, le même jour que la décision le concernant, et que le préfet soutient, sans être contesté, qu'elle n'a pas contesté cette décision ; que, par suite, il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pourrait reconstruire sa vie familiale en Albanie avec son épouse et ses enfants ; que, par ailleurs, si M. D...soutient souffrir d'une maladie qui ne pourrait être traitée dans son pays d'origine, il ne ressort pas du rapport médical joint au dossier que cette maladie, qui a été diagnostiquée postérieurement à la décision attaquée, présentait, à la date de la décision attaquée, un caractère d'une particulière gravité ; que, dans ces conditions, compte tenu notamment de la durée et des conditions du séjour en France de M.D..., la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vu desquels elle a été prise ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la décision qu'il conteste a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui vient d'être exposé, le moyen tiré par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III " ;

8. Considérant que le préfet du Rhône a, dans un même arrêté, refusé à M. D...la délivrance d'un titre de séjour et fait obligation à ce dernier de quitter le territoire français ; que, d'une part, la décision de refus de séjour dont cette mesure d'éloignement découle nécessairement est régulièrement motivée ; que, d'autre part, l'arrêté contesté vise le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que M. D...ne remplit pas les conditions pour séjourner en France, circonstance qui justifie l'application à l'intéressé des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 autorisant le préfet à assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français en litige doit être écarté ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.D..., de nationalité albanaise, s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 28 mars 2013, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ; qu'il ressort des termes mêmes de la décision contestée que le préfet du Rhône, qui n'a pas considéré être tenu d'assortir sa décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français, a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé ;

11. Considérant, en quatrième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux susmentionnés relatifs à la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

12. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par la voie de l'exception, de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

13. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

14. Considérant que, si M.D..., dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, soutient qu'il sera exposé à des traitements contraires aux stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Albanie, les pièces qu'il produit au dossier ne sont pas de nature à établir le bien-fondé de ses dires ainsi que cela est susmentionné ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la décision attaquée a été prise en violation des stipulations précitées ne peut qu'être écarté ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de la requête opposée par le préfet de Rhône, M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 18 septembre 2013, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône en date du 28 mars 2013 ; que ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour, doivent, par suite, être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2014, à laquelle siégeaient :

Mme Mear, président,

Mme Bourion, premier conseiller,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique le 16 octobre 2014.

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N° 14LY00127

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00127
Date de la décision : 16/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-10-16;14ly00127 ?
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