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16/10/2014 | FRANCE | N°14LY00248

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 16 octobre 2014, 14LY00248


Vu la requête, enregistrée le 27 janvier 2014 au greffe de la Cour, présentée pour Mme B...A..., domiciliée... ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301598 en date du 27 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 septembre 2013 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait éloignée ;


2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 9 septembre 2013 ;

3°) d'enjoindre ...

Vu la requête, enregistrée le 27 janvier 2014 au greffe de la Cour, présentée pour Mme B...A..., domiciliée... ;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301598 en date du 27 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 septembre 2013 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait éloignée ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 9 septembre 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trente jours à compter de l'arrêt à intervenir, ou, subsidiairement, de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge, pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient :

- que le tribunal a omis de statuer sur les moyens tirés, d'une part, de l'insuffisante motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et, d'autre part, de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination ;

- que la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- que la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une part, parce que le préfet, qui contredit l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, n'apporte pas la preuve qu'elle pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié, d'autre part, parce qu'en cas de retour dans son pays elle risque " une réactivation grave de sa symptomatologie " et, enfin, parce qu'elle réside de manière habituelle en France depuis plus de neuf mois ;

Vu l'arrêté et le jugement attaqués ;

Vu la décision du 20 mars 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme A...;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2014, présenté par le préfet du Puy-de-Dôme qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont suffisamment motivées ;

- que la décision portant refus de titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il n'a pas procédé à une inexacte appréciation matérielle des faits ; que la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir sa résidence habituelle en France ;

- que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation de la requérante ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 mai 2014, présenté pour Mme A...qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens et précise, en outre, que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont entachées d'un défaut d'examen complet de sa situation et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu l'ordonnance du 10 juillet 2014 fixant la clôture d'instruction au 1er août 2014 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application des articles L. 732-1 et R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Bourion, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme B...A..., ressortissante haïtienne, née le 7 juin 1953, est entrée en France sous couvert d'un visa de court séjour le 29 décembre 2012, pour rendre visite à sa famille ; qu'elle a déposé une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui a été rejetée par un arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 9 septembre 2013 ; que Mme A... relève appel du jugement du 27 décembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité du 9 septembre 2013 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée à l'issue du délai de départ volontaire ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que Mme A...soutient que le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français était insuffisamment motivée ; que, toutefois, en écartant le défaut de motivation dont serait entaché " l'arrêté, qui concerne plusieurs décisions " le Tribunal a répondu au moyen de la requérante ; que cette dernière n'est donc pas fondée à invoquer à ce titre une omission à statuer ;

3. Considérant, en second lieu, que Mme A...soutient que le Tribunal administratif a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle serait renvoyée étaient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation personnelle ; qu'il ressort de la lecture du jugement attaqué que le Tribunal n'a pas répondu à ce moyen qui n'était pas inopérant et qu'il a ainsi entaché son jugement d'une omission à statuer sur ce point ; qu'il y a lieu, dès lors, pour la Cour, d'annuler ce jugement en ce qu'il a rejeté les conclusions de Mme A...dirigées contre ces décisions du préfet du Puy-de-Dôme ; qu'il y a lieu, dès lors, pour la Cour de statuer par voie d'évocation sur lesdites conclusions et, pour le surplus, au titre de l'effet dévolutif de l'appel ;

Sur le fond :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de son article 3 : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ; que la décision attaquée, en tant qu'elle refuse de délivrer à Mme A...un titre de séjour, comporte, exposées de façon suffisamment détaillée, les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; que, si la requérante conteste la motivation de cette décision en faisant valoir que c'est à tort qu'elle mentionne un document qui ne serait pas actualisé, cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur la motivation de cette décision ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour serait insuffisamment motivée au regard des exigences des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979, doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...) " ;

6. Considérant que par un avis du 1er Juillet 2013 le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressée ne pouvait avoir accès à un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet du Puy-de-Dôme, qui n'était pas tenu par cet avis, a considéré que Mme A...pouvait bénéficier des soins nécessaires à son état de santé dans son pays d'origine en se fondant sur la fiche pays établie par le ministère de l'intérieur détaillant l'offre de soins en Haïti et sur un courriel émanant de l'ambassade de France à Haïti du 25 avril 2013 qui affirme que Haïti dispose " d'une offre psychiatrique limitée, essentiellement à Port-au-Prince (...) et qu'au total pour le pays, [officient] une dizaine de psychiatres et une trentaine de psychologues " ; que pour contredire ces informations, Mme A... soutient, d'une part, que le certificat médical du 9 décembre 2013 qu'elle a produit au dossier précise qu'elle présente un tableau sévère d'un syndrome post traumatique constitué dans les mois qui ont suivi le séisme de décembre 2010, qu'elle suit un traitement associant neuroleptiques et anxiolytiques, qu'elle est suivie par un psychiatre depuis septembre 2013 et qu'un retour dans son pays d'origine serait suivi d'une " réactivation grave de sa symptomatologie " et, d'autre part, que la fiche pays sur laquelle se fonde le préfet n'est pas actualisée et que le courriel du 25 avril 2013 émanant de l'ambassade de France indique que " de nombreuses molécules ne sont pas disponibles " ; que, toutefois, les deux certificats produits, au demeurant postérieurs à la décision attaquée se bornent, pour l'un, en date du 9 décembre 2013, à relater les récits de la requérante sans pour autant lui prescrire de médication, et pour l'autre en date du 8 novembre 2013 à indiquer qu'elle est suivie régulièrement dans le service des maladies infectieuses ; que, dans ces conditions, Mme A... n'apporte pas d'éléments de nature à infirmer les informations produites par le préfet ; qu'enfin, Mme A...n'établit pas que le tremblement de terre subi en 2010 soit la source de sa pathologie dépressive et qu'un retour dans ce pays risquerait de provoquer une aggravation de son état de santé ; que, dans ces conditions et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le caractère habituel de sa résidence en France, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313­11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas fondé ;

En ce qui concerne la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

7. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des décisions attaquées que le préfet du Puy-de-Dôme a procédé à un examen complet de sa situation de santé et de sa situation familiale ; que, par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait entaché, pour ce motif, les décisions précitées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle ;

8. Considérant, en second lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au considérant 6 du présent arrêt en ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour, le moyen tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ces décisions sur sa situation personnelle, doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 9 septembre 2013 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi, ni à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté le surplus de ses conclusions ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1301598 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 27 décembre 2013 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme A...dirigées contre les décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 9 septembre 2013 l'obligeant à quitter le territoire français, fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination.

Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand tendant à l'annulation des décisions du préfet du Puy-de-Dôme du 9 septembre 2013 portant obligation de quitter le territoire français, fixation du délai de départ volontaire et du pays de destination et le surplus de ses conclusions présenté devant la Cour sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au Préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2014, à laquelle siégeaient :

Mme Mear, président,

Mme Bourion, premier conseiller,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique le 16 octobre 2014.

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N° 14LY00248

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00248
Date de la décision : 16/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Isabelle BOURION
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : BORIE et ASSOCIES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-10-16;14ly00248 ?
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