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16/10/2014 | FRANCE | N°14LY01440

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 16 octobre 2014, 14LY01440


Vu I, la requête, enregistrée le 7 mai 2014 au greffe de la Cour, sous le n° 14LY01441, présentée par le Préfet de la Drôme ;

Le Préfet de la Drôme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1400194 du 29 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 17 octobre 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. C..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire mention " vie pr

ivée et familiale " dans un délai de deux mois et de lui délivrer, dans l'attente, un...

Vu I, la requête, enregistrée le 7 mai 2014 au greffe de la Cour, sous le n° 14LY01441, présentée par le Préfet de la Drôme ;

Le Préfet de la Drôme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1400194 du 29 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 17 octobre 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. C..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et a condamné l'Etat à verser une somme de 1 000 euros à l'avocat de M.C..., en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...devant le Tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation de son arrêté du 17 octobre 2013 ;

Le préfet soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal administratif a considéré que ses décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. C...et lui faisant obligation de quitter le territoire français ont méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; M.C..., qui s'est marié avec une compatriote titulaire d'une carte de résident, le 3 novembre 2012, ne pouvait, à la date de la décision attaquée, justifier d'une communauté de vie avec son épouse antérieure à la naissance de leur premier enfant, le 31 mars 2012, soit supérieure à dix neuf mois ; il ne travaille pas et ne justifie d'aucune insertion socio-professionnelle ; il peut retourner temporairement à Madagascar, où réside sa mère, le temps nécessaire à l'instruction d'une demande de regroupement familial ;

- il s'en remet à ses écritures de première instance en ce qui concerne le rejet des moyens invoqués par M. C...devant les premiers juges ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 6 juin 2014 fixant la clôture d'instruction au 30 juin 2014 à 16 heures 30, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 juillet 2014, présenté pour M. B...C..., qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

- le Tribunal administratif a fait une exacte appréciation de sa situation personnelle et familiale en annulant l'arrêté litigieux pour violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de l'ancienneté de sa présence en France, de la durée de sa vie commune avec son épouse, de la naissance de leur premier enfant et du fait que son épouse était enceinte de leur deuxième enfant à la date de l'arrêté attaqué ; il est entré régulièrement en France sous couvert d'un visa étudiant, il s'est marié le 3 novembre 2012 avec une compatriote, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 6 février 2020, avec laquelle il vivait déjà maritalement depuis 2011, et dont il a eu deux enfants, nés respectivement les 31 mars 2012 et 13 novembre 2013 ; c'est à tort que le préfet conteste la durée de sa vie commune avec son épouse car l'examen de ses bulletins de salaire démontre qu'il a rejoint la ville de Valence en 2011 ;

- sa présence auprès de son épouse et de leurs enfants est indispensable car sa fille Emilie, née le 13 novembre 2013, est suivie pour une anorexie du nourrisson d'origine psychologique et a été hospitalisée à plusieurs reprises ; il résulte des certificats médicaux produits que sa situation reste très préoccupante ; le certificat du docteur Samson, pédiatre, praticien hospitalier, atteste du caractère indispensable de la présence de ses deux parents auprès d'elle pour son rétablissement ;

- le préfet a entaché son arrêté d'illégalité en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour au seul motif qu'il entre dans la catégorie des étrangers susceptibles de bénéficier du regroupement familial ;

- l'arrêté pris à son encontre est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu l'ordonnance en date du 7 juillet 2014 portant réouverture de l'instruction, en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu les mémoires en défense complémentaires, enregistrés les 17 juillet, 25 août et 11 septembre 2014, présentés pour M. B...C...; il persiste dans ses précédentes conclusions par les mêmes moyens ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de Grande Instance de Lyon (section administrative d'appel), en date du 12 juin 2014, accordant à M. B...C...l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu II, la requête, enregistrée le 7 mai 2014 au greffe de la Cour, sous le n° 14LY01440, présentée par le préfet de la Drôme ;

Le préfet de la Drôme demande à la Cour de prononcer le sursis à l'exécution du jugement n° 1400194 du 29 avril 2014 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 17 octobre 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M.C..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et a condamné l'Etat à verser une somme de 1 000 euros à l'avocat de M.C..., en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; le préfet de la Drôme s'en rapporte aux moyens invoqués dans le cadre de sa requête, enregistrée le 7 mai 2014, au greffe de la Cour, sous le n° 14 LY01441 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 6 juin 2014 fixant la clôture d'instruction au 30 juin 2014 à 16 heures 30, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 3 et 17 juillet 2004, 25 août et 11 septembre 2014, présentés pour M. B...C..., qui conclut au rejet de la requête, en premier lieu, pour irrecevabilité et, en second lieu, au motif que les moyens invoqués par le préfet de la Drôme n'apparaissent pas sérieux et de nature à remettre en cause l'annulation ou la réformation du jugement attaqué ; il demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

- la requête à fin de sursis à exécution du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 29 avril 2014 est irrecevable car la requête au fond à laquelle il est renvoyé n'a pas été jointe à la requête à fin de sursis ;

- les moyens invoqués par le préfet n'apparaissent pas sérieux et de nature à remettre en cause l'annulation du jugement attaqué ; le sursis à exécution du jugement rendu aurait des conséquences difficilement réparables sur sa situation personnelle et familiale et méconnaîtrait l'intérêt supérieur de ses enfants ;

- il a bénéficié d'une autorisation provisoire au séjour le 4 août 2014 ;

Vu l'ordonnance en date du 7 juillet 2014 portant réouverture de l'instruction, en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de Grande Instance de Lyon (section administrative d'appel), en date du 12 juin 2014, accordant à M. B...C...l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Mear, président-rapporteur ;

- et les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...C..., ressortissant malgache, est entré régulièrement en France le 31 août 2010 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité d'étudiant renouvelé une fois et valable jusqu'au 30 juin 2012 ; que, le 10 juillet 2012, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet de la Drôme a rejeté sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination par un arrêté du 17 octobre 2013 ; que, par jugement du 29 avril 2014, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté, enjoint au préfet de la Drôme de délivrer à M. C...une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros à l'avocat de l'intéressé en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ; que le préfet de la Drôme demande par requête, enregistrée sous le n° 14LY01441, l'annulation de ce jugement du Tribunal administratif de Grenoble ; que, par une requête distincte, enregistrée sous le n° 14LY01440, il demande également que soit prononcé un sursis à l'exécution de ce même jugement ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes dirigées contre le même jugement, pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête n° 14LY01441 tendant à l'annulation du jugement attaqué :

2. Considérant que le Tribunal administratif a annulé l'arrêté litigieux au motif qu'il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le Tribunal s'est ainsi fondé sur les circonstances qu'à la date à laquelle l'arrêté attaqué a été pris, M. C...résidait depuis trois ans en France et était marié depuis près d'un an avec une compatriote, titulaire d'une carte de résident, dont il a eu un premier enfant " né le 7 novembre 2011 " et qui était enceinte d'un second enfant, " né le 13 décembre 2013 " ;

3. Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...est entré en France le 31 août 2010 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour valant titre de séjour en qualité d'étudiant et qu'il n'y résidait que depuis trois ans à la date de l'arrêté attaqué ; que s'il a épousé, le 3 novembre 2012, une compatriote dont il a eu une fille née le 31 mars 2012, et qui était enceinte à la date de l'arrêté, il ne justifie pas toutefois de l'existence d'une vie commune avec son épouse depuis 2011, ainsi qu'il le prétend ; qu'il ne pouvait ainsi se prévaloir d'une vie familiale suffisamment stable et ancienne à la date de l'arrêté litigieux ; qu'il ne peut utilement faire valoir que son second enfant a des problèmes graves de santé dès lors que cet enfant est né le 13 novembre 2013, soit postérieurement à l'arrêté attaqué ; que, dans ces conditions, eu égard notamment à la durée et aux conditions du séjour de M. C...en France et à la durée de sa vie commune avec son épouse, l'arrêté contesté n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vu desquels il a été pris ; que, dès lors, le préfet de la Drôme est fondé à soutenir que cet arrêté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté du préfet de la Drôme du 17 octobre 2013 ;

5. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. C..., tant devant le Tribunal administratif de Grenoble que devant la Cour ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté attaqué :

6. Considérant que, par arrêté n° 2013273-0040 du 30 septembre 2013 régulièrement publié le 3 octobre 2013 au recueil spécial n° 84 des actes administratifs de la préfecture de la Drôme, le préfet de la Drôme a donné à Mme Alice Coste, secrétaire général de cette préfecture, délégation pour signer, tous actes et documents administratifs relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Drôme, à l'exception de certaines matières au nombre desquelles ne figurent pas les décisions attaquées ; que Mme A...avait compétence pour signer l'arrêté contesté ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :

7. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que le préfet de la Drôme aurait entaché la décision attaquée d'une erreur de droit " au seul motif qu'il rentre dans la catégorie des bénéficiaires du regroupement familial " doit être écarté comme manquant en fait dès lors que la décision ne mentionne pas, en tout état de cause, un tel motif ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

9. Considérant qu'il n'est pas contesté que M. C...entre dans catégorie des étrangers qui ouvre droit au regroupement familial ; qu'il ne peut, dès lors, utilement faire valoir que la décision qu'il conteste a méconnu les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 dans le champ d'application desquelles il n'entre pas ni, par suite, utilement faire valoir que le préfet de la Drôme était tenu de saisir la commission du titre de séjour au motif qu'il aurait rempli les conditions de ces dispositions ;

10. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus invoqués en ce qui concerne la légalité de l'arrêté au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le moyen tiré de ce que la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C...doit être écarté ;

11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

12. Considérant que, compte tenu de qui précède, relatif à la légalité de la décision attaquée au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et du fait que la décision en cause portant refus de délivrance d'un titre de séjour n'a ni pour objet ni pour effet de séparer M. C...de ses enfants, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cette décision méconnaît les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

13. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III " ;

14. Considérant que le préfet de la Drôme a, dans un même arrêté, refusé à M. C... la délivrance d'un titre de séjour et fait obligation à ce dernier de quitter le territoire français ; que, d'une part, la décision de refus de séjour dont cette mesure d'éloignement découle nécessairement est régulièrement motivée ; que, d'autre part, l'arrêté contesté vise le I de l'article L. 511-1 du code de l' entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que l'intéressé ne remplit pas les conditions pour séjourner en France, circonstance qui justifie l'application à l'intéressé des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 autorisant le préfet à assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par ailleurs, M.C..., qui ne soutient pas que les dispositions du I. de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont incompatibles avec les objectifs fixés par les stipulations des articles 5, 7 et 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée, ne peut utilement invoquer à l'encontre de la décision individuelle qu'il conteste ces stipulations qui ont été transposées en droit interne par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français en litige doit être écarté ;

15. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;

16. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.C..., de nationalité malgache, s'est vu refuser le renouvellement d'un titre de séjour par décision du 17 octobre 2013 ; qu'ainsi, à la date de la décision en cause, le 17 octobre 2013, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ; qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux que le préfet de la Drôme n'a pas estimé avoir compétence liée pour assortir sa décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ni ainsi méconnu l'étendue de ses compétences;

17. Considérant, en troisième lieu, que lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont issues de la transposition en droit national de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, le préfet doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales ; que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, y compris au titre de l'asile, l'étranger, du fait même de l'accomplissement de cette démarche qui vise à ce qu'il soit autorisé à se maintenir en France et ne puisse donc pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement forcé, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il sera en revanche susceptible de faire l'objet d'une telle décision ; qu'en principe il se trouve ainsi en mesure de présenter à l'administration, à tout moment de la procédure, des observations et éléments de nature à faire obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement ; qu'en tout état de cause, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative en cause aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir ;

18. Considérant que la seule circonstance que le préfet, qui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité par M. C...en assortissant cette décision d'une obligation de quitter le territoire français, n'a pas, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement, de sa propre initiative, expressément informé l'intéressé qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité, n'est pas de nature à permettre de regarder ce dernier comme ayant été privé de son droit à être entendu, notamment énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que, pour les mêmes motifs les moyens invoqués par M. C...tirés de la violation des articles 47 et 48 de la même Charte, relatifs au droit à un recours effectif et aux droits de la défense, et le moyen tiré d'une méconnaissance des droits de la défense doivent, en tout état de cause, être écartés ;

19. Considérant, en quatrième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus mentionnés en ce qui concerne la légalité de l'arrêté au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C... doit être écarté ; que ce dernier ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de la décision portant l'obligation de quitter le territoire français et ne peut, en tout état de cause, en bénéficier ainsi que cela est susmentionné ;

20. Considérant, en cinquième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus en ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours :

21. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du II de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 16 juin 2011 : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

22. Considérant que la décision litigieuse mentionne qu'aucun élément de la situation de M.C..., ne justifie, qu'à titre exceptionnel, un délai supérieur lui soit accordé et vise les dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par ailleurs, ces dispositions n'impliquent pas que l'autorité administrative, lorsqu'elle prend une décision de retour prévoyant un délai de départ volontaire, comme c'est le cas en l'espèce, de trente jours, démontre l'absence de circonstances particulières qui auraient pu, le cas échéant, justifier une prolongation de ce délai ; que, par suite, M.C..., qui n'allègue ni n'établit avoir sollicité un délai d'une durée supérieur à trente jours, n'est fondé à soutenir ni que la décision qu'il conteste n'est pas suffisamment motivée ni qu'elle n'est pas fondée ;

23. Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui sont susmentionnés en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français, les moyens tirés de ce que cette décision litigieuse méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C...doivent être écartés ;

24. Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui sont susmentionnés en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français, les moyens tirés de ce que la décision en cause méconnaît les articles 41, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les droits de la défense, doivent, en tout état de cause, être écartés ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

25. Considérant, en premier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux-ci-dessus retenus en ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, et alors que M.C..., de nationalité malgache, n'allègue pas qu'il serait admissible ou aurait souhaité être reconduit dans un autre pays, les moyens tirés de ce que la décision en cause méconnaît les articles 41, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les droits de la défense, doivent, en tout état de cause, être écartés ;

26. Considérant, en second lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui sont susmentionnés en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français, les moyens tirés de ce que cette décision méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. C...doivent être écartés ;

27. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Drôme est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a, d'une part, annulé son arrêté du 17 octobre 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. C..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination, d'autre part, lui a fait injonction de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et, enfin, a condamné l'Etat à verser une somme de 1 000 euros à l'avocat de M.C..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administratif et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée ;

Sur la requête n° 14LY01440 tendant au sursis à l'exécution du jugement attaqué :

28. Considérant que le présent arrêt statue sur la requête à fin d'annulation du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 29 avril 2014 ; que, dès lors, la requête du préfet de la Drôme tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement est devenue sans objet ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de ces conclusions, il n'y pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

29. Considérant que la demande présentée par le conseil de M. C...tendant à l'application à son profit des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peut qu'être rejetée dès lors que M. C... est la partie perdante à l'instance ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1400194 du 29 avril 2014 du Tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le Tribunal administratif de Grenoble et le surplus de ses conclusions présentées en appel sont rejetés.

Article 3 : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 14LY01440 du préfet de la Drôme.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au Préfet de la Drôme, à M. B...C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2014 à laquelle siégeaient :

Mme Mear, président,

Mme Bourion, premier conseiller,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique, le 16 octobre 2014.

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N° 14LY01440, ...

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01440
Date de la décision : 16/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Josiane MEAR
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : BORGES DE DEUS CORREIA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-10-16;14ly01440 ?
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